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Chiens et chats : le grand trafic

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Chiens et chats : le grand trafic


HENRI BARBE, PRÉSIDENT DE L'ASSOCIATION NATIONALE CONTRE LE TRAFIC DES ANIMAUX DE COMPAGNIE.


« Mon caniche s'est évaporé sous mon nez », s'inquiète Gisèle Jacquier, 61 ans, de Manhac dans l'Aveyron. Malheureusement, elle n'est pas la seule à s'être fait voler son animal de compagnie. Depuis plusieurs mois, les « rapts » de chiens et de chats se multiplient dans le Grand Sud comme dans le reste de la France. Mais qui en a après ces animaux ? Certains les kidnappent pour obtenir une rançon facile auprès de maîtres très affectés par la disparition de leur fidèle compagnon ; d'autres les monnaient à l'étranger auprès des « négociants » peu regardants. D'autres encore, travaillent pour des ateliers de fourreurs souvent situés en Europe de l'Est.

Le trafic de chiens, comme de chats, est un fléau en recrudescence. On ne sait pas où vont ces animaux./ Photo DDM.

À Pessac, près de Bordeaux, le cocker primé de Laurence a été dérobé lors d'un cambriolage. « Les instructions étaient de déposer de l'argent près d'un arbre devant chez moi. » Elle versera deux fois 2 500 € mais ne reverra jamais Diego. À Toulouse et dans sa banlieue, plusieurs propriétaires se sont vus demander des sommes entre 400 € et 500 € pour récupérer leur animal.

Mais il est parfois plus inquiétant de ne pas avoir de nouvelles. Le 2 juin, « Chounoir », le compagnon à quatre pattes de Gisèle Jacquier a disparu. « J'ai été victime d'un repérage, estime-t-elle. Tout à coup, mon chien a poussé violemment le portail. Il a couru très vite vers la place du village puis j'ai entendu des véhicules démarrer. On avait dû l'attirer avec quelque chose. » Le 7 juin, à Mirepoix-sur-Tarn (Haute-Garonne), Mathias Jambu était à son tour victime. « On a emporté Gigi, mon bouledogue anglais. Elle était dans le jardin de mon père. On la surveillait par la fenêtre mais il a suffi de 10 minutes d'inattention. Quand on s'en est aperçus, on s'est souvenus qu'une personne était venue sonner. Elle disait qu'elle cherchait du travail. Après coup, on a compris que c'était une équipe de voleurs. »

Le plus souvent, les propriétaires n'ont jamais de nouvelles de leurs chiens ou chats. Norbert Rouquette a eu plus de chance. « On m'a pris mon chien de chasse alors que j'étais absent. Quand je suis revenu, il n'était plus attaché au bout de sa chaîne. ça s'est passé le 14 septembre dans le Gard. Dix jours plus tard, quelqu'un m'a appelé pour me dire qu'il l'avait retrouvé dans une forêt de Colomiers. Il était sévèrement touché avec plusieurs fractures et la queue sectionnée. » À Tarbes, un collectif de propriétaires de félins s'est récemment monté. Il a déposé une cinquantaine de plaintes en quelques mois. « Au début, des tigrés disparaissaient puis ça a changé de couleur, rapporte Noelia Llacer. On ne sait pas si c'est pour des fourreurs ou des laboratoires. Mais, pour nous, il y a un trafic »

Les propriétaires sont aux abois. Malheureusement, faute de preuves et de moyens, peu d'enquêtes aboutissent.



Le chiffre : 70 000

Depuis plusieurs mois, les vols de chiens et de chats sont en recrudescence dans la région. Les réseaux de trafiquants sont très actifs. Certains propriétaires sont rançonnés, d'autres ne revoient jamais leur animal.

Chiens > Volés. Selon certaines associations, chaque année, environ 70 000 chiens seraient volés en France. Le trafic représente des millions d'euros.

« On m'a demandé une rançon. Les instructions étaient de déposer 2 500 € près d'un arbre devant chez moi. »

Laurence, propriétaire d'un chien volé



Une cellule spécialisée à la SPA

La société protectrice des animaux (SPA) a mis en place une cellule anti-trafic. Elle est basée à Vichy, pour pouvoir se déplacer au mieux dans les quatre coins de France. Celle-ci confirme une recrudescence « des disparitions groupées depuis plusieurs mois. Il semble qu'il y ait des vols groupés par des bandes organisées ».

« Il y en a énormément mais on ne connaît que la partie émergée de l'iceberg, estime Julien Soubiron, responsable adjoint de la cellule. Il est impossible de donner des chiffres, la fourchette est énorme car ces informations ne sont centralisées par aucun organisme, les plaintes ne sont pas toujours prises par manque de preuves et tout le monde n'a pas le réflexe de nous contacter. Nous avons bien un fichier par département mais il ne peut pas être exhaustif. Alors, comme ces vols ne sont pas répertoriés, les pouvoirs publics ne sont pas alertés. »

Midi-Pyrénées est particulièrement touché par le fléau des vols de chiens et chats. « Il y a beaucoup de chiens de chasse qui ont une valeur marchande. C'est peut-être pour la reproduction ». À Tarbes, face aux disparitions massives de chats, une association a d'ailleurs été créée, le « collectif des propriétaires de félins ».

La cellule anti-trafic travaille avec les particuliers. « Nous les orientons afin qu'ils récupèrent des témoignages pour que leur plainte soit prise en compte par le parquet. »

Quant à savoir à quel usage sont destinés les animaux, Julien Soubiron ne s'avance pas : « Rien n'est prouvé, on ne sait pas. »

Renseignements : 04 70 96 23 06.


« Personne n'est à l'abri »

Le phénomène des vols de chiens et de chats est-il récent ?

En 1988, quand j'ai créé mon association dans le Lot-et-Garonne, j'ai recueilli 60 témoignages sur 120 chats disparus sur la moitié du département. Sur la France, nous avons déposé 8 000 plaintes en 20 ans. Actuellement, on observe une recrudescence de ce phénomène. À Tarbes, en 2009, 150 disparitions suspectes ont été signalées.

Les chiens dits « de race » sont-ils particulièrement menacés ?

Non, personne n'est à l'abri, le chien « tout venant » peut être volé qu'il s'agisse d'un bâtard, d'un croisé ou d'un labrador. On sait que les chiens de chasse sont aussi très recherchés. On les envoie à destination de l'Espagne, de l'Italie et même de l'Europe de l'Est. Ils sont loués avec la chasse à des chasseurs qui n'emmènent pas leurs chiens dans des déplacements de plusieurs centaines de kilomètres.

Que font les trafiquants de ces animaux ?

Il y a plusieurs pistes. Par exemple, nous avons porté plainte quand un stock de 1 500 peaux de chats a été retrouvé dans les Deux-Sèvres chez un tanneur. Ces peaux peuvent servir par exemple pour des cols de manteaux. Il y a aussi le problème de l'approvisionnement de laboratoires en chiens et chats. On voudrait de la transparence. Nous ne sommes ni pour, ni contre l'expérimentation animale mais pas sur des animaux volés. On sait qu'ils servent à des tests de résistance à la fatigue notamment. Certains évoquent aussi la piste de la reproduction ainsi que les combats de chiens et les paris.

Ces trafics sont-ils lucratifs ?

Tout dépend de l'importance des vols. Mais si les 60 000 ou 70 000 chiens volés chaque année sont vendus à un prix moyen de 100 €, on monte à plusieurs millions.

Que peut-on faire ?

Il faut que le politique s'en saisisse pour qu'il y ait plus de moyens.
Source : http://www.ladepeche.fr/articl et http:/journal du chien.com

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