Max|mum-leterrarium 0 Posté(e) le 26 avril 2011 Les élèves se mobilisent pour la tortueL'animal fait l'objet d'une campagne de recensement, d'études et d'opérations de sensibilisation. L'un des enjeux de la recherche scolaire est aussi de définir des principes de cohabitation harmonieuse entre tortues et agriculteursLes services de l'État, le monde associatif insulaire, la communauté scientifique et le lycée agricole de Sartène à la rescousse. La tortue d'Hermann, espèce vulnérable, a désormais basculé dans le cursus des étudiants de BTSA Gestion et protection de la nature, option animation nature. Pour la bonne cause de sa sauvegarde. Le ministère de l'agriculture en partenariat avec le ministère de l'écologie a joué un rôle majeur dans l'évolution. « En 2007 nos autorités de tutelle ont lancé un appel à projet sur le thème de la préservation d'une espèce protégée, auprès des lycées agricoles », rappelle Céline Boulongne, professeur de biologie et d'écologie au sein de l'établissement.Les enseignants et les étudiants se mobilisent d'emblée en faveur de la tortue d'Hermann. Tant pis pour le discoglosse - un crapaud - pour la pie d'Europe et pour le merle bleu aussi présents sur l'exploitation du lycée mais moins attractifs. Le reptile sous sa carapace noire et jaune a fait valoir des arguments convaincants. D'abord parce que la relation nouée avec les élèves est ancienne. « En 2006, nous avions participé à l'inventaire régional des tortues initié par la Direction régionale de l'environnement (Diren) », précise l'enseignante.Mesures et peséesLa prise en compte des caractéristiques de l'animal conforte l'élan pédagogique. La tortue est une bonne cliente qui combine de multiples avantages en marge d'une salle de classe. « Sur notre exploitation cette espèce est facile à trouver et à attraper. Elle ne nécessite pas la mise en oeuvre d'un système de piégeage. Il suffit d'être curieux et attentif pour la débusquer. Elle vit longtemps. Elle se laisse étudier, sans contrainte spécifique », énumère Céline Boulongne. La nature statique et accommodante du sujet séduit les responsables ministériels de l'opération nationale. En 2008, le projet du lycée agricole de Sartène est accepté.L'accord s'accompagne d'une enveloppe de 5000 euros, destiné à financer l'achat de petit matériel et le suivi scientifique. Le schéma de travail intègre trois objectifs à atteindre. Aux étudiants de garantir une meilleure connaissance de la population de tortues, d'évaluer des atouts et des obligations inhérents à sa présence sur une exploitation agricole. L'observation et la réflexion doivent également conduire à raisonner en termes de cohabitation harmonieuse entre agriculteurs et tortues d'Hermann. Autant de préconisations qui inciteront les étudiants à retenir l'option enquête de terrain, menée de préférence aux heures les plus chaudes de la journée, de mi-mars jusqu'aux premiers jours de novembre. Au-delà, la tortue hiberne. L'hiver ne se conçoit qu'à une dizaine de centimètres sous terre et dans l'inactivité totale. Chacun son style.La démarche d'inventaire associe capture et marquage. « Nous sommes partis en prospection sur des zones délimitées par avance », explique Samantha. Chaque acteur du projet est responsable de son petit territoire. Il a des gestes bien précis à accomplir à l'égard de la tortue. La rencontre avec l'animal, à proximité d'un roncier, dans une ancienne suberaie pâturée le plus souvent, se déroule sur un mode invariable. « La première chose a faire est de mesurer la tortue à l'aide d'un pied à coulisse. Ensuite nous procédons à la pesée, puis aux photographies », détaille l'étudiante.Urbanisation galopanteLe processus fait appel à la localisation du spécimen, « à partir de données GPS », à un double marquage, grâce à une encoche réalisée sur la partie morte d'une écaille marginale et à un coup de pinceau. « Nous utilisons de la peinture acrylique dans les tons verts - marron de manière à ne pas créer de perturbation pour l'animal dans son environnement. » Une fois les données consignées sur une fiche, « nous replaçons la tortue à l'endroit exact où elle a été découverte ». On compte les individus, on les identifie mais on ne les déplace pas. Au final, près de 70 tortues d'Hermann seront répertoriées sur une superficie de 45 hectares.L'effectif est le reflet de la réalité écologique insulaire. « La population corse se porte plutôt bien. Elle comporte un nombre équivalent de mâles et de femelle. Elle affiche un taux de reproduction excellent, de l'ordre de 96,8 %, et une structure démographique prometteuse », se félicitent les experts de la Dreal et les Amis du Parc, chargés de la mise en oeuvre du plan national de restauration de la tortue. Le constat chatoyant mérite toutefois d'être nuancé. Les années passent aux dépens de la « testudo hermanni ». « Nous sommes confrontés à un déclin de l'espèce au plan local. Le processus est modéré mais bien réel. A moyen terme, il risque de s'avérer très préoccupant », déplorent les scientifiques.Les traces des tortues s'estompent peu à peu dans le nord de l'île, en Balagne. « Elles ont disparu de la région bastiaise par exemple. Les densités sont très faibles sur le littoral occidental. L'espèce résiste surtout dans la partie sud et sur la plaine orientale. Une population isolée subsiste dans le Cortenais », résume Agnès Testor, étudiante en BTSA.La régression territoriale s'explique par une conjonction de menaces. La communauté s'étiole là où sévissent les incendies et où se dressent des constructions neuves. Les animaux font les frais de la modernité. « L'urbanisation galopante observée au sud de Bastia, à la périphérie de Porto-Vecchio a causé du tort aux tortues, en altérant leur habitat naturel », relève Julien étudiant en BTSA. La fragmentation écologique, consécutive à des aménagements routiers par exemple, instaure à son tour un régime de destruction.Un délit et une peine maximaleDans le même temps, les braconniers font un sort à la tortue. Le phénomène dépasse le cadre de l'île. La tortue d'Hermann comme ses cousines cistudes, originaires de Floride ou de La Réunion souffre de la convoitise des hommes. Les gendarmes connaissent bien le problème. « Au plan national, 40 % des animaux saisis sont des tortues. Il s'agit d'un trafic très lucratif qui a désormais trouvé ses marques sur Internet ». À brève échéance, « les contrôles vont s'intensifier et un traçage ADN sera envisageable ».Le commerce illégal mais aussi les dérives sentimentales des amis des bêtes ont rattrapé la tortue d'Hermann. L'animal subit le contrecoup de son capital sympathie. « Il n'est pas exclu que des vacanciers ramènent une tortue en guise de souvenir de voyage. Des promeneurs peuvent être tentés de ramasser un animal et de la ramener à la maison », remarque-t-on. Dans les deux cas, le prélèvement est « considéré comme un délit selon le code de l'environnement », précise les gendarmes. Peine maximum encourue, 15000 euros d'amende et un an d'emprisonnement. Les renards, les chiens, les fouines et les sangliers collaborent à leur tour à la perte de la tortue d'Hermann. Les pratiques agricoles, à l'image du gyrobroyage ou du débroussaillage à lame, le passage du tracteur, sont susceptibles de générer des tensions.Dans le paysage agricole la vigilance a valeur de prévention de l'accident, fatal dans la majorité des cas. « Les animaux évoluent souvent en lisière des ronciers et des champs. Il est bon, avant de commencer le fauchage de procéder à un tour d'inspection », insistent les porteurs du projet. Une autre solution consiste à caler, dans la mesure du possible, l'activité agricole sur celle de la tortue.La poursuite de l'aventureLorsque les calendriers sont concordants, le démaquisage se situe entre novembre et mars. Et l'idéal serait de faire son foin entre 6h et 8 h du matin, à la fraîche, avant les déplacements des représentants de l'espèce protégée. Les défenseurs de la tortue d'Hermann plaident pour « un fauchage qui débuterait au milieu de la parcelle afin de laisser aux animaux de temps de s'enfuir ». Ils préconisent l'utilisation « un réglage plus approprié des outils. La coupe réalisée quelques centimètres plus haut suffit à épargner des individus ». Des passages à tortues dans les clôtures, des buses entretenues avec soin relèvent de la sauvegarde de l'espèce. Les mesures de protection et de gestion penchent en faveur de la tortue mais génèrent un manque à gagner pour les agriculteurs. Les élèves de BTSA du lycée agricole laissent aux pouvoirs publics le soin d'imaginer un système compensatoire.Pour leur part, ils recherchent un nouveau modèle d'action écologique. La liaison avec la paisible tortue s'annonce durable. « Notre projet s'achève cette année. Mais nous comptons poursuivre l'aventure. Cet été un stagiaire de BTS va travailler sur le thème de la tortue. Nous allons reprendre nos inventaires. Nous espérons participer aux programmes Life et au plan de Restauration de la tortue d'Hermann. »En attendant, le projet lycéen 2008-2011 sera valorisé par une plaquette éditée avec le ministère de l'agriculture. La démarche grand public se fonde sur la qualité des travaux effectués ainsi que sur l'appartenance de l'établissement à un réseau national de prise en compte de la biodiversité sur les exploitations des lycées agricoles.80 mètres parcourus par jourLa tortue d'Hermann, classée en danger au sein de l'union internationale de la conservation de la nature, comme à l'échelon national et européen, s'est repliée sur la Corse et dans une moindre mesure sur le massif de l'Estérel. « La population insulaire est la plus stable et la plus nombreuse », remarque-t-on. L'animal a déserté les Pyrénées-Orientales dès le début des années 1970.Très attaché à son territoire d'une superficie comprise entre 0,6 et 2 hectares et situé à une altitude inférieure à 600 mètres, l'animal privilégie les déplacements courts, de l'ordre de 80 mètres par jour en moyenne. La recherche d'un point d'eau est une motivation suffisante pour rallonger le circuit de plusieurs centaines de mètres.Le rythme de vie d'une tortue dépend de la météo et des saisons. De mars à mi-juin, l'existence de l'animal se transforme en quête de chaleur. Durant l'été, il s'accorde une pause à partir de midi avant de recouvrer sa vitalité dès que le thermomètre baisse, c'est-à-dire une à deux heures avant le coucher du soleil.46 familles de plantes figurent à son menu. Quelques escargots, cloportes et vers de terre forment une parenthèse carnivore dans son régime.Le mâle au gabarit plus modeste que celui de la femelle connaît la maturité sexuelle entre 10 et 11 ans. Sa partenaire devra attendre deux ans de plus pour atteindre ce stade physiologique. Elle pond en moyenne entre 3 à 6 oeufs. En Corse jusqu'à trois pontes par an sont observées. Ce qui fixe le taux de fécondité a 7,7 oeufs par an contre 4,2 dans l'Estérel. La clémence du climat accroît la fertilité.Le commerce de l'espèce est interdit en France. À une exception près, des individus d'élevage, issus de parents et de grands parents nés en captivité. La troisième génération est soumise à des règles administratives strictes.Source Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites