Max|mum-leterrarium 0 Posté(e) le 22 août 2012 Environnement. Une soirée auprès des tortues marinesIl est 20 heures. Seule la lune pleine éclaire encore la plage de Grande-Anse, à Trois-Rivières. Un petit groupe d’animaux se présente dans la pénombre. Ce sont des humains qui viennent « patrouiller » pour regarder les tortues pondre. Equipé d’une lampe à lumière rouge, le chef de cette bande d’indiscrets commande : « Pour éviter de faire fuir les tortues, nous n’allumons pas de lampe torche à lumière blanche et nous restons groupés. Si nous voyons une tortue, nous ne bougeons plus et nous restons à distance. » Bryan est l’un des éco-volontaires de l’association Kap’Natirel. Il guide notre groupe de curieux venu découvrir la ponte des tortues, qui a lieu de mai à fin août. Ce n’est pas seulement une sortie contemplative. Les patrouilles de nuit ont un but scientifique : « Compter sur un site le nombre de femelles par espèce, le nombre de pontes par femelle, l’intervalle entre deux pontes, entre deux saisons de ponte, la distribution des tortues en mer ou leur durée de vie. » Le réseau tortues marines a défini un protocole d’étude, et des éco-volontaires sont formés chaque année. « Le protocole prévoit des patrouilles entre 20 heures et 0 h 30. Et comme nous estimons qu’une tortue met 45 minutes minimum pour sortir de l’eau, creuser son nid, pondre et retourner à l’eau, nous faisons en sorte d’être au même point toutes les 45 minutes », explique Olivia Giuliani, permanente de Kap’Natirel. Ce soir-là, après six allers-retours sur la plage, les « patrouilleurs » repartent bredouilles.« Une tortue pond 100 à 200 œufs dans un nid. »Quelques jours plus tard, les plus motivés sont de retour sur la même plage, à la même heure. Leur patience sera récompensée. A la troisième patrouille, l’éco-volontaire Bryan s’agenouille soudain dans le sable mouillé. Une trace fraîche de 80 centimètres de large sort de la mer et monte vers le sous-bois. Au bout, une tortue imbriquée est en train de piocher dans le sable. « Nous l’observons de loin jusqu’à ce qu’elle arrête de creuser. Nous attendrons deux minutes, puis nous approcherons », explique le jeune homme. A 21 h 30, la tortue creuse un premier trou, puis un deuxième, sans pondre. Au troisième, elle est dérangée par un passant bruyant. Au quatrième, n’y tenant plus, elle dépose sa progéniture. « Une tortue pond 100 à 200 œufs dans un nid. Après une vingtaine d’œufs, elle a une telle montée d’hormones qu’on peut s’en approcher sans qu’elle s’en rende compte. » Les éco-volontaires en profitent pour mesurer la carapace, prélever un échantillon de peau pour des recherches génétiques et poser une bague numérotée sur une patte avant.En un quart d’heure, la tortue karet achève son office. Les spectateurs ont tout vu, et de près. Ils sont autorisés à s’asseoir à quelques mètres du nid à condition de ne plus bouger. « Elle va prendre vingt bonnes minutes pour recouvrir ses œufs et brouiller les traces autour d’elle », dit une éco-volontaire. Vingt-cinq minutes, top chrono. A 23 h 30, le reptile se traîne jusqu’à l’océan, après deux heures de travail.Au cours de cette soirée à succès, les éco-volontaires verront un peu plus loin une tortue verte en pleine ponte. Ils sont étudiants en métropole en biologie, ou en école d’infirmière, et sont venus, le temps des grandes vacances, observer les tortues guadeloupéennes. Ils ont suivi une formation à Marie-Galante, le rendez-vous incontournable des tortues marines, où ils ont appris à « reconnaître les traces, à distinguer les différentes espèces, à baguer, à faire un prélèvement ADN ». La saison 2012 est presque terminée et les éco-volontaires vont retourner à leurs études, après avoir servi la science et guidé le public guadeloupéen pendant de longues nuits.Où et quand ? La saison de la ponte des tortues se termine fin août. Pour prendre contact avec une association du réseau, rendez-vous sur www.tortuesmarinesguadeloupe.org.Le long voyage des tortuesEn Guadeloupe, toute l’année, il suffit de se munir de palmes, d’un masque et d’un tuba pour observer les tortues marines. Les vertes broutent dans les herbiers peu profonds. Les imbriquées mangent des éponges sur les récifs coralliens. Mais selon les observations du réseau tortues marines, ce ne sont pas ces tortues-là que l’on voit monter sur les plages pour pondre. « Les tortues de la baie de Malendure, par exemple, ne sont pas en âge de se reproduire, assure une éco-volontaire. Par contre, nous avons observé la ponte d’une tortue du Nicaragua, qui a fait 2 500 km pour venir pondre en Guadeloupe. » Selon cette hypothèse, les tortues adultes emménageraient loin de leur lieu de naissance, où elles reviendraient tous les deux à quatre ans pour déposer leurs œufs.Le réseau tortues marinesLe réseau tortues marines regroupe plusieurs associations réparties sur tout le littoral de l’archipel : entre autres, Kap Natirel patrouille de Vieux-Fort à Goyave, Evasion Tropicale sur la côte Sous-le-Vent, La Gaïae à Deshaies et Aeva sur l’est de la Grande-Terre. A Marie-Galante, terre de prédilection des testudines, l’association Ecolambda dirige les observations. De nombreux clubs de plongée sous-marine sont également partenaires du réseau. Ils participent au protocole de suivi des tortues marines en alimentation, assurent une veille ou partagent leurs photographies. Les contacts de toutes ces structures sont disponibles sur le site internet www.tortuesmarinesguadeloupe.org. On y trouve aussi : la présentation des actions du réseau, une banque d’images et de documents techniques, des jeux et des activités pédagogiques…Source Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites