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Le réchauffement menace le lézard pyrénéen de Bonnal

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Le réchauffement menace le lézard pyrénéen de Bonnal

Les Pyrénées abritent trois espèces de lézards endémiques que le réchauffement climatique global met en péril. Menacées d'extinction, elles sont les sujets d'un plan national d'actions qui sera présenté dès le trimestre prochain. Zoom sur l'une d'elles : le lézard de Bonnal.

C’est un petit lézard qui ne paie pas de mine. Plutôt gris brun, avec des petites nuances métallisées, or, bronze, platine, explique Gilles Pottier de l’association Nature Midi-Pyrénées. Il ressemble assez au lézard des murailles. Son corps mesure entre cinq et six centimètres, sa queue atteint le double. » De la tête à la queue, l’adulte atteint donc une longueur de quinze centimètres.

Le lézard pyrénéen de Bonnal hiberne entre 6 à 7 mois
S’il ressemble au lézard des murailles, le lézard de Bonnal n’a pas la même vie que son cousin des plaines. A son encontre, c’est un montagnard. L’espèce vit à l’étage alpin des Pyrénées, en haute et moyenne altitude. L'homme ne la connaît que depuis 1922, année où elle fut découverte par Jean-Louis Bonnal sur les rives du lac Bleu de Bigorre.

C’est une espèce endémique du pic du Midi d’Ossau dans les Pyrénées-Atlantiques au massif des Encantats dans la province de Lleida en Catalogne. Si la plupart des populations de ce petit lézard vit au dessus de 2000 mètres, certaines prennent plus ou moins d’autres hauteurs. « Nous en trouvons au cirque de Gavarnie à 1550 mètres, mais ces populations restent anecdotiques. »

Certains lézards de Bonnal ne s’effraient pas de franchir les 3000 mètres d’altitude. Ils se débrouillent pour ne point y geler. En fait l’hiver, les lézards pyrénéens hibernent. Entre six et sept mois d’ailleurs pour échapper aux températures glaciales, ils font le gros dos sous quelques mètres de neige qui les protègent du gel.

Comme les autres reptiles, les batraciens ou les poissons, les lézards sont des animaux ectothermes ou plus simplement à sang froid. Leur température corporelle et leurs fonctions internes dépendent de la température extérieure. « Lorsque le froid s’installe sur le massif, ils se contentent de laisser leur température corporelle baisser, leurs fonctions vitales sont au ralenti. Ils dépensent très peu d’énergie pendant leur hibernation » explique Gilles Pottier.

Le lézard pond entre entre trois et quatre œufs
Le printemps sonne la course à la reproduction. Les lézards de Bonnal ont peu de temps pour assurer la survie de leur espèce. Au fur et à mesure que la neige fond sur les montagnes, les populations se réveillent. Et les individus partent à la recherche de leurs partenaires.

La reproduction se déroule entre mai et juin. Les femelles pondent leurs œufs début juillet qui vont éclore en août. « Elles déposent leurs trois ou quatre œufs sous des pierres bien orientées, sur des sols bien drainés, poursuit Gilles Pottier. Le lieu de ponte ne doit pas être trop chaud, ou les œufs vont cuire pour devenir durs ! Ni trop humide où ils risquent de pourrir ! »

Et l’herpétologue d’ajouter : « ces lézards seraient susceptibles de se reproduire à l’automne parfois. Mais faute de températures optimales pour l’incubation et la naissance, les femelles seraient capables de garder les spermatozoïdes en elles. Et la fécondation n’interviendrait qu’au printemps suivant. Comme la vipère aspic. »

Les invertébrés pour toute nourriture
A leur naissance, les petits lézards sont des adultes miniatures. Capables de se débrouiller seuls. Ils ont été élevés à bonne enseigne puisque ni leur père ni leur mère n’ont veillé à leur incubation. Les tout jeunes ne pèsent même pas un gramme, leur corps long de deux à trois centimètres. Prédateurs ils le sont aussitôt pour se nourrir.

Mouches, criquets, guêpes, chenilles voire papillons, les lézards de Bonnal aiment les invertébrés. « Ils chassent un peu comme les félins. Ils s’approchent lentement de leurs proies avec une gestuelle un peu mécanique. Puis ils fondent sur elles dès qu’ils sont assez près. Ces reptiles sont très opportunistes : ils font des festins d’invertébrés quand ils le peuvent. Ectothermes, les lézards ont besoin de chaleur minimum pour que leurs fonctions physiologiques fonctionnent. Leur digestion aussi : s’il fait trop froid, ils ne pourront pas digérer leur proie et la vomiront. Autrement cette proie dans leur organisme va pourrir. »

Le réchauffement climatique menace les trois espèces de lézards pyrénéens
Comme le lézard du Val d’Aran et le lézard d’Aurelio, le lézard de Bonnal est une espèce à part entière. Toutes trois endémiques donc des Pyrénées, elles ne vivent nulle part ailleurs. Et toutes trois sont menacées. « D’abord par le réchauffement climatique global, se désole Gilles Pottier. Ces trois espèces sont apparues voilà quatre millions d’années environ. Elles ont déjà supporté des changements climatiques mais ces changements n’ont pas été aussi rapides que celui que nous connaissons aujourd’hui. »

Pour échapper au réchauffement actuel de leurs habitats, certains lézards remontent. Jusqu’à se retrouver coincés à des sommets comme celui du Pic de Montaigu. Or si les animaux grimpent vers de plus hautes altitudes, la végétation aussi et le domaine alpin tend à disparaître. Trop vite peut-être pour que les lézards pyrénéens aient le temps de s’adapter à un nouvel écosystème. Les spécialistes craignent à terme leur extinction.

Sans oublier que le réchauffement climatique va entraîner une pression plus importante des prédations et des agents pathogènes. : « Le lézard de Bonnal a une longue espérance de vie : jusqu’à 17 ans pour certains. Parce qu’il vit dans un milieu alpin où la prédation et les agents pathogènes sont supportables. Mais une température plus haute, et il devra affronter une pression plus importante de ces deux facteurs. »

Un plan national d'actions concerne les trois lézards endémiques des Pyrénées
Enfin une autre menace plane sur les trois espèces pyrénéennes : la modification ou la destruction de leurs habitats liés aux activités humaines : routes ou pistes, urbanisation...

Aussi pour conjurer ces mauvaises fortunes, la France concocte un plan national d’actions pour assurer la survie des trois espèces de lézards pyrénéens. Le projet de ce plan a été soumis à une consultation publique du 15 juillet au 15 septembre derniers. « Il devrait être finalisé d’ici le début de l’année prochaine, estime Jacques Hyppolite de la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement (Dreal) Midi-Pyrénées qui pilote ce plan. Nous le présenterons à tous les acteurs concernés au cours du premier trimestre 2013. »

« Contrairement à d’autres espèces, les lézards pyrénéens sont sédentaires. Ils ne se déplacent pas. Leurs populations restent isolées entre deux vallons rappelle Gilles Pottier. Ce plan sera un peu une vigie écologique. » Si une population de lézard de Bonnal s’éteint localement, elle sera perdue à jamais.

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