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Max|mum-leterrarium

Le crapaud accoucheur en péril

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Le crapaud accoucheur en péril



Progressiste, attachant, papa poule, le crapaud accoucheur a tout pour plaire. Mais il est aussi menacé de disparition, la faute à l’assèchement du paysage. Sonnette d’alarme.

Il est petit, puisqu’il tient tout entier sur une pièce de cinq francs. Il a la peau couleur gris sable, l’œil irisé d’or et un chant flûté. Qui est-ce?

Celui que les contes mettent souvent à l’honneur vient d’être sacré animal de l’année par Pro Natura, après l’abeille à longues antennes, le lombric et l’oreillard brun.

«On choisit toujours un animal qui illustre une problématique, qui est porteur d’un message», explique Bastien Amez-Droz, ingénieur en gestion de la nature à Pro Natura. Ainsi le crapaud accoucheur sera pendant 365 jours le prince des amphibiens, puisqu’il incarne à lui tout seul la fragilité de la biodiversité.



On trouve vingt espèces d’amphibiens en Suisse, quatorze d’entre elles sont menacées, dont neuf sont en danger de disparition. Le crapaud fait partie de cette dernière catégorie, puisque sur ces vingt-cinq dernières années, la moitié de sa population a disparu.
Un recul d’autant plus inquiétant que, lorsqu’une population se retrouve isolée suite à la disparition de ses voisines, elle est condamnée à s’éteindre à cause de la consanguinité qui s’y développe même si son habitat reste propice.

Ce serait dommage. Car le pustuleux animal a tout pour plaire, puisqu’il fait avancer la cause féminine et l’égalité des sexes au royaume des batraciens.



En effet, c’est le seul anoure qui se reproduise sur la terre ferme en Suisse. Et dont le mâle s’occupe véritablement des œufs. Contrairement à la grenouille rousse, par exemple, qui pond des milliers d’œufs à même l’étang et dont seuls 2 à 4‰ deviendront adultes, la femelle du crapaud accoucheur ne pond qu’une cinquantaine d’œufs, puis les confie à son conjoint, qui les enroule aussitôt autour de ses pattes arrière. Il les gardera enchaînés à ses mollets pendant toute la période d’incubation, soit trois à six semaines, avant de les mettre à l’eau pour l’éclosion. Les têtards ont alors plus de chances d’échapper aux risques de la prédation. «C’est une stratégie particulière, qui augmente les chances de survie», observe Bastien Amez-Droz.

L’habitat de l’amphibien se raréfie

Et pourtant, malgré ce comportement astucieux, le crapaud accoucheur est en voie de disparition, parce qu’il a besoin d’un habitat particulier et que celui-ci se raréfie. Forcément, en tant qu’amphibien, il lui faut de l’eau, mais pas sous n’importe quelle forme.

Un lac, une rivière? Non, ces eaux profondes contiennent trop de prédateurs. Un grand étang? Non plus, ce dernier abritant très souvent des poissons, notamment le carassin doré, plus connu sous le nom de poisson rouge, que les gens relâchent n’importe où au grand dam des espèces indigènes. «Ils sont très adaptables, survivent même à un assèchement et sont de terribles prédateurs!» assène le spécialiste.

Non, le crapaud accoucheur a besoin d’un terrain meuble, exposé sud, avec un plan d’eau à proximité à moins de 200 mètres. Or 90% des plans d’eau, dont les mares temporaires, ont disparu en Suisse: drainages, corrections fluviales, assèchement des prairies, le château d’eau est devenu trop sec. Ce qui nuit aux espèces liées au milieu aquatique, comme les amphibiens, les éphémères et les écrevisses indigènes.

Le crapaud accoucheur aime les milieux pionniers à la végétation éparse, les zones alluviales ou les gravières avec talus bien exposés. C’est une espèce qui peut supporter une année de sécheresse, mais pas une modification complète de son habitat.
A cette menace s’ajoutent d’autres fléaux comme les pesticides employés pour l’agriculture, qui sont nocifs même utilisés à la dose recommandée, et la chytridiomycose, un champignon qui s’attaque à la peau des batraciens et peut leur être fatal. Une maladie qui fait des ravages en Amazonie et en Espagne, où le crapaud accoucheur est plus sévèrement touché qu’en Suisse.

Alors, que faire? Vite installer un étang artificiel dans son jardin? Pas suffisant. «Mieux vaut avoir un jardin naturel sans produits chimiques, avec des murs en pierres sèches, des plantes vivaces indigènes et un plan d’eau riche en structures variées dont les berges sont en cailloux. Idéalement placé si l’on habite à proximité de la nature ou en bordure de forêt.»

Un animal à sauver en urgence donc, avec son biotope, d’autant qu’il est lui-même notre potentiel sauveteur. En effet, une étude vient de montrer que sa peau sécrète des peptides, dont l’une de ses molécules, l’alytesin, a un effet sur le staphylocoque doré. Pourra-t-il nous offrir une arme contre ce redoutable germe? Le crapaud n’a peut-être rien d’un prince charmant, mais il sera peut-être utile un jour dans la grande pharmacopée naturelle.



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