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Max|mum-leterrarium

Des chenilles se servent de la nicotine du tabac pour éloigner leurs prédateurs

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Les chenilles du sphynx du tabac se nourissent de feuilles de tabac sauvage, dont elles se servent comme bouclier biologique ©️ MPI f. Chemical Ecology/ P. Kumar

Si les Hommes aiment le tabac mais en meurent massivement, les larves du sphynx du tabac (Manduca sexta) l'utilisent avec parcimonie et efficacité pour éloigner certains prédateurs. Pour ce faire, les chenilles rejettent une petite fraction de la nicotine présente dans les feuilles de tabac qu'elles consomment. Explications.

Les chenilles emploient différentes stratégies pour se protéger de leurs ennemis ; certaines se camouflent, d'autres ont recours à des couleurs vives pour éloigner leurs prédateurs, se hérissent de poils piquants voire urticants, secrètent des substances toxiques ou adoptent des postures menaçantes.

Des scientifiques du Max Planck Institute for Chemical Ecology viennent de découvrir un mécanisme de protection encore insoupçonné : les larves du sphynx du tabac exhalent une petite fraction de la nicotine qu'elles ingèrent en mangeant les feuilles de tabac. Elles transfèrent une partie de la nicotine qu'elles ingèrent dans leur hémolymphe (le sang des insectes) et à partir de cette substance, génèrent une haleine fétide capable de repousser la majorité de leurs prédateurs. Ces découvertes résultent de la combinaison de techniques moléculaires et d'une approche d'histoire naturelle dans des expériences dans l'habitat natif des organismes étudiés.

Pour les besoins de leur expérience sur le terrain, les chercheurs ont sélectionné des plants de tabac pauvres en nicotine et il ont employé un procédé de bio-ingénierie d'interférence ARN pour neutraliser une enzyme cytochrome P450 présente dans l'intestin des larves du sphynx du tabac, enzyme qui est habituellement activée par la nicotine issue de l'ingestion des feuilles de tabac. Ce procédé a permis aux scientifiques de voir ce qui arrivait aux chenilles qui se nourrissent de plantes pauvres en nicotine par rapport à des chenilles ayant bien consommé de la nicotine mais sont dépourvues du catalyseur actif de la toxine dans leur intestin.

La fonction de la cytochrome P450 a été difficile à montrer dans les expériences en laboratoire, mais les chercheurs ont reçu une aide providentielle de l'araignée-loup Camptocosa parallela. En effet, ce prédateur nocturne choisissait de préférence les larves nourries aux feuilles pauvres en nicotine, mais également celles dépourvues de cytochrome P450 active, celles-là mêmes qui présentaient un déficit de réaction à la nicotine de leur alimentation. Ceci a mis en évidence le rôle important du gène dans le mécanisme de défense contre cette araignée, qui ne figure habituellement pas dans la liste des prédateurs de la Manduca sexta.


L'araignée loup Camptocosa parallela chasse activement sa proie, contrairement à d'autres prédateurs ©️ MPI f. Chemical Ecology/ P. Kumar

Une analyse approfondie montre que l'enzyme joue un rôle dans le transport de la nicotine ingérée depuis l'intestin jusque dans l'hémolymphe qui permet d'exhaler la nicotine par les spiracles, qui correspondent à l'organe nasal des chenilles. Les chenilles exhalent une petite fraction de cette nicotine. Et cette odeur fonctionne comme un signal anti-araignée. Par contre, d'autres prédateurs de la Manduca sexta, tels que les punaises ou les fourmi-lions, semblent parfaitement indifférents à cette halitose défensive.

La nicotine, substance défensive dans leur plante hôte, est trop toxique pour que les larves puissent la stocker. Le gros est excrété. Le fait que les larves recyclent une quantité minuscule de toxine pour leurs propres besoins défensifs pour écarter les araignées en produisant une halitose toxique a surpris les scientifiques : "Cette stratégie d'haleine toxique comme moyen de défense est sans précédent," rapporte Ian Baldwin.

L'exemple de l'araignée loup illustre l'efficacité d'une combinaison de l'approche biologie moléculaire et de l'histoire naturelle pour comprendre la fonction des gènes au niveau de l'organisme. Les scientifiques du Service d'Ecologie Moléculaire que dirige Baldwin, un pionnier de cette approche, y voient une approche objective : il "ne faut donc pas hésiter à interroger l'écosystème. La Nature est notre meilleur professeur," résume le Pr Baldwin. "Elle est l'arbitre dans la lutte pour la survie. La mise en lumière des onctions du gène passe par l'étude des organismes dans leur environnement d'origine, ce qui est vrai aussi de tout ce que nous ignorons de la vie sauvage."

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