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Céline13

T . Le Non

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De manière relativement universelle, que l’on soit professionnel ou pas, le quotidien auprès des chiens comporte une omniprésence très remarquée : le mot «non».

Si petit soit-il, ce terme engendre souvent de grands et ardents débats entre les défenseurs et détracteurs de son utilisation.
Au travers de cet article, nous allons tenter de faire la lumière sur ce court adverbe qui, lorsqu’il est utilisé dans la communication Humains/Chiens a pour fonction d’indiquer un refus, un mécontentement.

Qui est-il ?
Techniquement, le «non» est un inhibiteur de comportement.
Quand il est utilisé, son rôle est juste de «faire cesser», ce qui le place dans la grande famille des réprimandes.
Plus précisément, il est assimilable à une punition positive (P+) puisqu’il est «un ajout désagréable ayant pour objectif l’arrêt de ce qui est en oeuvre».
Ne cherchez pas en lui une fibre éducative, il n’en a pas. Le «non» intervenant toujours après la production d’un comportement, on peut aisément comprendre que sa vocation n’est pas d’apprendre quoi que ce soit !

Une popularité incontestable
Malgré un portrait peu flatteur, ce répresseur jouit d’une popularité sans limites, ayant une place de choix dans le quotidien de chacun.
Les raisons sont assez simples à appréhender : il est facile à utiliser et, ne le cachons pas, il paraît immédiatement efficace.

«Facile à utiliser», car il ne demande pas de réflexion, d’apprentissage préalable, ni même le développement d’une quelconque forme de dextérité, pour l’utilisateur.
«Immédiatement efficace», car en bon inhibiteur, il stoppe tout comportement volontaire en cours incluant de facto celui «qui dérange».

Malheureusement ces points sont indéniables et permettent ainsi au dictat du «non» de continuer à trôner royalement dans la communication entre les humains et leurs poilus.

L’arbre qui cache la forêt
Encore plus répandu que décrié, «Monsieur Non» se présente comme un ami toujours prêt à rendre service! Mais il n’est pas si honnête qu’il le laisse paraître...
Derrière son apparente efficacité «Monsieur Non» est en fait un manipulateur, qui détruit progressivement vos relations pour se faire une place de plus en plus forte et permanente à vos côtés.
Sa nature perverse vous pousse à le penser indispensable! Et plus vous le côtoierez plus il s'immiscera dans votre relation avec votre chien, se glissant entre vous en perturbant votre compréhension mutuelle, vous conduisant ainsi à faire à nouveau appel à lui, et ainsi de suite.

Comment fonctionne-t-il ?
Pour comprendre la perniciosité de cet intime plein de faux semblants, il est important d’observer son mode de fonctionnement.

Je vous propose en premier lieu d’effectuer une analogie purement humaine : si tout de suite, à vous qui lisez cet article, je vous dit «non».

Bien que nous soyons de la même espèce, et que nous ayons le même langage, je suis prêt à parier que vous n’êtes pas en mesure de comprendre ce que je vous veux.
Tout ce que la situation vous permet de savoir, c’est seulement que quelque chose ne me convient pas.
Est-ce votre façon de vous tenir?
Est-ce parce que vous portez des lunettes?
Est-ce parce que vous venez de soupirer à la lecture de cet article qui commence à être long?
Vous pouvez supposer, ou même tenter de déduire, dans tous les cas vous avez trop peu d’éléments en votre possession pour «comprendre».

Finalement, face à cette incompréhension, seule mon intonation aura un impact sur votre comportement. Et plus elle sera agressive, plus vous pourrez percevoir mon degré de désaccord, et éventuellement plus vous aurez peur de moi, mais cela s’arrête là!
Vous ne comprendrez pas pour autant l’objet de mon désaccord, pas plus que vous ne saurez ce que j’attends de vous.

Il en sera exactement de même pour le chien!

Pour garder son pouvoir, «Monsieur Non» doit faire peur, il n’a pas le choix.
Attention, cela ne fait pour autant de lui un colérique démonstratif, il est beaucoup plus malin que ça. Bien rodé à la vie en société, «Monsieur Non» agit toujours «à couvert», prenant soin d’être juste suffisamment menaçant pour être efficace, sans pour autant perdre en discrétion.
En véritable caméléon, il s’exprimera différemment en fonction des environnements et de l’image qu’il a vis-à-vis des personnes présentes, se présentant d’abord sur la pointe des pieds pour se faire accepter, et ne montrant son vrai visage qu’une fois accepté par le plus grand nombre.

Pour résumer, le fonctionnement du «non» est assez simple : il doit faire peur pour exister.
Ceci au détriment de la relation qui se ternit un peu plus à chaque nouvelle occurrence.

Comment le remplacer ?
Tout d’abord, il est important de comprendre que ne pas utiliser le «non» n’est en rien synonyme de laxisme.
Il est tout à fait possible d’exprimer votre état de satisfaction (in-) sur un mode explicatif qui sera compris par le chien.

Pour bien comprendre ce qui va suivre, une parenthèse me semble importante : Avez-vous déjà eu l’idée d’apprendre un nouveau comportement à votre chien en lui disant seulement «oui» ?
Peut-être êtes-vous une exception, mais mon expérience me permet d’affirmer que l’immense majorité des lecteurs de cet articles répondront à cette question par la négative. Cette réponse est logique, car le «oui» est un excitant qui permet seulement d’exprimer un contentement, rien de plus.
Certains diront probablement qu’ils valident régulièrement des comportements avec un «oui», ou avec des outils le simulant, ce qui est en effet possible. Mais dans tous les cas il sera indispensable d’ajouter un code-clé (mot, geste, son, etc...) pour que le comportement appris se reproduise à un moment désiré.

Il en va de même pour le «non».
Une fois associé à un code-clé, il pourra avoir la capacité d’indiquer au chien la raison de votre mécontentement.

Cependant, il faut garder à l’esprit qu’il reste efficace uniquement parce qu’il représente le prémisse d’une menace. Ceci étant toujours un accroc supplémentaire que la relation devra surmonter à défaut de pouvoir l’oublier.

Envoyer «Monsieur Non» squatter ailleurs
Ignorer les mauvais comportements et/ou détourner positivement l’attention du chien sont les deux substituts au «non» que l’on rencontre le plus souvent.
Théoriquement ils sont séduisants, mais en pratique, on observe que leur belle apparence cache des limites d’efficacité rapidement atteintes, car ils sont incapables de travailler seuls, et finissent toujours par demander de l’aide à «Monsieur Non» quand ils ne s’en sortent pas seuls.
Afin de ne pas trop m’éloigner du sujet initial, je n’entrerai pas plus dans le détails des défauts de ces deux remplaçants, vous proposant simplement d’imaginer ce que vous pourriez faire avec «Melle Ignorance» et «M. Détournement», face à la situation suivante : «vous êtes dans un parc public partiellement clos, votre chien en liberté suit frénétiquement une odeur la truffe au sol, et d’un seul coup, sans aucun signe avant-coureur perceptible, il fonce à la poursuite d’un pigeon qu’il a aperçu au loin, de l’autre côté de l’avenue...»

La solution qui semble être la plus efficace pour vivre en se passant du «non» est pourtant toute simple. Elle peut se résumer en un mot : «Anticipation».

Cette bonne fée va permettre, avant que le comportement ne soit présent, avant même que le chien soit placé dans un environnement potentiellement «à problème», de le préparer en lui apprenant ce que l’on attend de lui.
Accompagné d’Anticipation, vous ne placerez plus jamais votre chien dans un environnement pouvant être problématique, et votre divorce avec «Monsieur Non» pourra être prononcé.
Bien traitée et considérée, Anticipation vous projettera dans une spirale vertueuse qui vous mènera dans un monde où les besoins de votre chien sont compris et assouvis avant même qu’ils ne se manifestent !

Que faire en cas de rechute
Il n’est pas toujours facile de se séparer d’un compagnon qui partage notre vie depuis des années, avec lequel une routine quotidienne bien implantée donne une apparente sensation de confort.
Si toutefois «Monsieur Non» venait à nouveau frapper à votre porte, et que dans un moment de faiblesse, face à une situation difficile à gérer parce que mal anticipée, vous acceptiez qu’il reprenne place à vos côtés, ne vous culpabilisez pas!
Laissez-le intervenir, uniquement pour écarter tout danger, et jetez-le aussitôt. N’ayez pas de scrupules, cela fait des années qu’il vous manipule, vous êtes donc bien en droit de jouer un peu avec sa personne.

Cet écart ne sera pas dramatique, si :
vous prenez suffisamment de recul pour étudier quelle négligence vous a conduit à la réprimande, et que votre réflexion vous amène à préparer à nouveau les futures situations identiques
vous pensez à revaloriser votre relation, en félicitant l’arrêt du comportement dérangeant, dès que «Monsieur Non» se sera manifesté. De cette façon, vous pourrez constater que les quelques apparition de «Non» engendreront un comportement d’approche guillerette de votre chien, au lieu de la fuite ou des oreilles basses habituelles.

Quand «Monsieur Non» s’associe a un professionnel de l’éducation
Un seul conseil : Fuyez !
Le professionnel étant là pour apprendre à votre chien et à vous-même, «Monsieur Non» ne devrait pas faire parti de ses amis, et ne devrait pas être invité à vos séances de travail.
En toute logique, un apprentissage respectueux ne devrait pas passer par la case «ne fait pas», mais plutôt par une communication indiquant «fais comme ça, tu verras que c’est bien pour toi».
Souvenez vous que «Monsieur Non» est dans l’incapacité de se faire comprendre, imaginez donc les difficultés qu’il aurait pour enseigner.

Dans tous les cas, comme pour toute forme de réprimande, il ne doit jamais être utilisé si le chien ne sait pas parfaitement ce que l’on attend de lui. En d’autres termes, il est impératif de fixer les règles et de procéder aux apprentissages, avant d’indiquer au chien que ce qu’il fait «n’est pas bien»...

Une approche qui peut être débattue
Pour conclure cet article, il me semble important de rappeler qu’en matière de compréhension canine, il n’y a pas de vérité absolue.
Ce que l’on pense juste aujourd’hui pourrait tout à fait s’avérer faux dans quelques temps, et ce n’est pas parce que, en tant que personne et professionnel, j’adhère à une vision de la relation que celle-ci est «la bonne» ou qu’il faut l’imposer.
C’est avec cet état d’esprit que je trouve logique d’évoquer une objection qui est parfois soulevée par des personnes n’étant pas totalement convaincues par l’idée de remplacer «Non» par «Anticipation». Elle se manifeste généralement sous la forme interrogative suivante :
«Si je n’indique pas à un chien que ce qu’il fait n’est pas bien, comment saura-t-il que c’est mal ?»
L’exemple qui accompagne le plus souvent cette question est : «si j’anticipe suffisamment et que mon chiot ne fait jamais le moindre pipi en intérieur, comment peut-il comprendre que c’est un interdit ?»
Par expérience, ma réponse s’oriente principalement autour du fait que «si je ne laisse pas l’opportunité d’une nouvelle possibilité, elle n’existera pas dans l’esprit du chien», mais je ne détaillerai pas plus ici, me permettant seulement de vous conseiller de ne jamais oublier de tester ce que vous lisez et de ne pas hésiter à en débattre si vous en ressentez le besoin.

Bien sûr, les avocats de «Monsieur Non» auront des arguments pour le défendre, le présentant comme un «mal nécessaire», au même titre que certains affirment encore de nos jours «qu’une bonne guerre fera du bien»... Le propre d’une opinion est que chacun possède la sienne, et le propre du respect est d’essayer de la comprendre, même si l’on n’est pas d’accord.

Maïorga Josselin , Cynologiste et formateur CynoPsy

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