kti 0 Posté(e) le 29 mai 2006 Le divorce est d’abord un mot, qu’on prononce par défi, une première fois. Puis ce mot devient un chantage. Puis ce mot répété devient une évidence, et un fait qu’il est urgent d’accomplir. Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 30 mai 2006 — Rochmann-Davy bonjour — Allo ? Bonjour madame. Je suis Victoire Lévy, j’ai appelé en début de semaine. Pourrais-je parler à monsieur Deligny ? — Je vous le passe tout de suite, veuillez ne pas quitter. Victoire tombe aussitôt sur une voix mâle, distinguée, d’une cinquantaine d’année : — Oui, bonjour mademoiselle… «Le soleil Rose» dites-vous ?… Non, ça ne me rappelle rien… (ils l’ont perdu). — Un roman ? insiste-t-il, gros ? — 286 pages. — Victoire Lévy dites-vous ?… Décidément, je ne vois pas… — Pourtant j’ai appelé en octobre et rappelé lundi dernier : votre secrétaire est formelle : après avis du comité de lecture, le manuscrit est maintenant dans votre bureau. — C’est curieux… Elle raccroche, déconfite. L’espoir était trop beau, demesuré… Les Editions Rochmann-Davy ?… Ils l’ont perdu, à tous les coups… Ou bien son «Soleil Rose» n’a pas laissé de souvenir transcendantal à ce cher monsieur Deligny. — Allo maman ?… Tu te rends compte ?… Monsieur Deligny des Editions Rochmann-Davy m’a proposé un rendez-vous !!! Victoire explose de joie : la semaine suivante, elle a appelé comme convenu la Grande Maison. Son Soleil Rose s’empoussiérait sur l’une des étagères du bureau du lecteur et monsieur Deligny, confus, s’est empressé de le lire : — Je l’ai lu, c’est vrai : il y a un certain entrain, d’un bout à l’autre du roman… Mais une fois la dernière page tournée, on est un peu déçu… Vos personnages restent superficiels, ils ne sont définis que grâce à leurs «coucheries»… — C’était le but recherché, s’explique Victoire. Mon sujet est le sexe et mes personnages baisent. — En tous cas, dans cet état, je ne prends pas. Il faudrait travailler… Si vous voulez, je peux vous recevoir jeudi, pas celui-là mais l’autre. — Jeudi en quinze !!! Tu réalises maman ??? Zina sape l’enthousiasme : — Tu veux que je te donnes mon avis ?… Puisque tu m’as toujours demandé d’être sincère… Eh bien, d’après moi, il a envie de te sauter. — De me sauter ? — Oui : ton livre l’a excité et il a envie de te rencontrer. Mais tu vas perdre ton temps, ce type-là ne t’apportera rien… — Il est quand même premier lecteur !… Et Chez Rochmann-Davy, tu réalises !!! Non, non, Zina n’en démord pas. Elle ne «sent» pas ce rendez-vous, comme elle ne sentait pas «Bellefontaine», ni Kundera, d’ailleurs. Elle ne convainc pas Vic. Vic qui se pince : un monsieur lecteur numéro un des Editions Rochmann-Davy, chez lequel a atterri son livre par la poste, la reçoit dans quinze jours ??? Et si c’était sa VRAIE VRAIE chance ??? La semaine suivante et comme prévu, elle rappelle la Maison pour confirmer. Monsieur Deligny est en comité. La secrétaire propose à Victoire de laisser son numéro, il la joindra dès qu’il pourra. Et à 19 heure 13, dring ! Le téléphone sonne et Vic exulte : — C’est pour moi, c’est Rochmann-Davy ! crie-t-elle à Phil avec une incrédule satisfaction. Et elle décroche, haletante : — Oui, madame Lévy ? Je suis monsieur Deligny. Son cœur bat à tout rompre, il confirme, et elle le laisse parler, sonnée. Rendez-vous est donc pris pour jeudi 12 décembre, 16 heures ! Elle rêve, ne sait où aboutira cette rencontre, mais elle remercie le lecteur, tout bas, pour cet espoir nouveau, pour ce feu qu’il ravive, pour cette chance qu’il lui offre. Elle en profite, profite, pour se remettre à travailler. Elle a commencé un troisième bouquin avant l’Ile-de-Ré, alors elle tape, écrit, corrige, elle y croit de nouveau, il ne faut pas abandonner. Que devient Philippe dans l’histoire ? Il dort de l’autre côté du mur. A propos d’une boîte de sel que personne n’a voulu descendre acheter, monsieur s’est engueulé avec madame et depuis monsieur dort dans le canapé. Victoire en a hurlé de rage au huitième jour. Seule dans sa chambre, Philippe dehors et les garçons couchés, elle s’est pliée en deux de douleur. Ils n’y arriveront jamais ! Pourtant, l’avenir s’annonce prospère, Rochmann-Davy lui tend la main et Vic va peut-être enfin publier. Mais qui dit publier, dit travailler. Elle hurle du choix imposé, encore et toujours. Ce ne sont plus ses parents, à présent, qui lui coupent les bras, mais le mari, qui préfèrerait l’envoyer au labo, et qu’elle ramène du vrai argent, clinquant, plutôt que des espérances. Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 30 mai 2006 C’est le Réveillon et Victoire a sept ans. Rituellement, les parents puisque c’est leur tour, ont invité famille etc… Pour calmer les gamins (Vic a trois frères), Zina a invité aussi quelques enfants. Certains resteront la nuit pour dormir, d’autres repartiront dans leur foyer. Comme par hasard, et parce que Vic n’a pas de sœur, l’entourage est essentiellement masculin. A vrai dire, il n’y a pas d’autre fillette qu’elle, cette nuit de la Saint-Sylvestre, dans l’espace réservé aux enfants. Zina présente les petits fours, Charles emplit les coupes de champagne, tandis que les enfants s’amusent, de l’autre côté de la cloison. Les enfants s’amusent et rigolent. Victoire n’a pas encore saisi la différence des sexes. Elle se sent garçon parmi les garçons, elle fait le clown, et danse et rit avec les autres. Bientôt, deux clans s’organisent pourtant : Vic d’un côté et les garçons de l’autre. Ils sont environ sept à menacer. Ils n’ont bientôt plus qu’une seule envie : lui baisser sa culotte. Pourquoi ? Victoire ne comprend pas. Juste sait-elle qu’elle ne souhaite pas se déshabiller. Le cercle s’arrondit, six à sept petits mâles veulent voir. Voir quoi ?… Six à sept petits mâles s’emparent de la gamine, la giflent parce qu’elle résiste, baissent son pyjama, la traînent dans le couloir, tirent ses cheveux pour qu’elle lâche sa culotte, l’un d’eux lui crache dessus, a moitié nue et sous les quolibets. Bonne année, bonne année… Charles et Zina emplissent les coupes. Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 30 mai 2006 Vic ne peut partager sa joie qu’avec Coco. A 22 heure 18 de ce grand jour, il lui reste le choix entre Coco et son cahier. Elle est injuste, la satisfaction de Marie-Prune, à 18 heure 12, n’était pas feinte et son patron l’a félicitée à 18 heure 26… Mais il a vite conclu par un «très bien» professionnel et Marie-Prune n’avait que dix minutes à lui consacrer. Elle exagère, ses bambins, tout joyeux de l’allégresse de leur mère, ont dansé avec elle dans la cuisine. Les gosses sont extraordinaires : une semaine qu’elle était à cran et la voilà pardonnée ce soir. Se foutent de ses sautes d’humeur, la lâchent un peu lorsqu’elle est rauque et dansent avec maman lorsque maman délire. Vic est injuste, elle a ses fils. Mais Philippe et Zina la cassent. Philippe n’a pas desserré les dents malgré l’annonce de la nouvelle (onzième jour). A juste répondu : «J’ai avalé ma langue», et Zina l’a découragée : — Hum, hum, a-t-elle articulé d’une petite voix lasse, ne te fais pas trop d’illusions ma fille… Y’a du travail… Il va tirer dix pour cent de ton manuscrit, et peut-être avec un peu de chance, en te faisant bosser à mort, parviendra-t-il à te publier… Pourtant Victoire n’en rajoute pas lorsqu’elle chante l’avènement du 12 décembre 91 : elle a vu monsieur Deligny aujourd’hui même. Et monsieur Deligny lui a donné rencart après les fêtes, et monsieur Deligny lui a proposé un contrat… A 22 heure 18, Coco l’écoute avec gentillesse, la félicite et l’encourage. Elle l’a même entendu sourire, il semble heureux pour elle. Il pense aussi que Vic avance. Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 31 mai 2006 Trêve de Noël ! Pour cette nuit magique, Vic s’est permis le luxe. A revêtu l’une de ses plus belles robes, s’est longuement maquillée. Surexcités, David et Nicolas ont aidé à la confection du sapin et ont tendu les boules qu’elle a accroché sur les murs. Zina n’a pas convié sa fille à la dinde traditionnelle. Elle se souvient de Noël dernier et ne veut plus du gentil couple (il faut toujours retenir ton mari par la manche) mais Vic, chez elle, s’est permis le luxe puisque Charles régale. Au menu : jambon-chips pour les enfants, sole au champagne pour les parents, arrosée de champagne évidemment. Victoire fête Noël quoiqu’il arrive — c’est son côté bourgeois. Et si Philippe à J22 persiste à dormir dans le salon, s’il n’a pas encore retrouvé sa langue, Victoire n’y voit pas d’excuses suffisantes pour frustrer ses bambins. Le père Noël passera, comme tous les ans, par le balcon, puisqu’ils n’ont pas de cheminée, Victoire le sait puisqu’elle est le père Noël. Philippe est mal à l’aise. Vautré sur son fauteuil, il assiste muet à l’exubérant bonheur de ses gosses, il se gratte le menton et se demande peut-être à quoi il sert. Vic a crié «Trêve de Noël» en remplissant les coupes, pourtant, lorsqu’après les cadeaux il se jette sur elle, elle le repousse : — Eh !… Et les enfants !… Parvient-elle à placer entre deux baisers saliveux. — On se fiche des enfants !… Allez, viens dans la chambre cinq minutes… Il l’a saisie au vol, coincée contre le fauteuil et à présent il viole sa bouche et de ses doigts fébriles, s’attaque à sa culotte. L’espace d’une seconde, Victoire hésite. — Allez ! Insiste Phil, les mains pleines de sa chair, t’en crèves d’envie !… Non, elle n’en crève pas d’envie. En tous cas pas comme ça. — Non !… Je ne veux pas !… Tu déchires ma robe !… Elle le bouscule et se dégage : — Non mon vieux, trop facile, trop facile… Phil abandonne. Allume la télé et se vautre, muet, dans son fauteuil. Trois jours plus tard, il récidive. Sous le prétexte de sa thèse, qu’il a enfin finie, et qu’il balance à Vic tandis qu’elle travaille sur le lit : — Ca t’intéresse de la lire ? lui aboie-t-il. — Bien sûr, répond-elle courtoise. — Et puis au moins, tu seras informée pour mardi. — Mardi ?… Mardi ?… Tu la soutiens mardi ? — Mais non banane ! Pour le nouvel an à Montmorency… Enfin, si tu veux venir. Il sort. Vic s’envoie les 96 pages. Pourtant, dès la première, elle ressent un pinçon : A mes frères A mes parents A ma famille et amis, a-t-il dédicacé… Lorsqu’il revient, il s’allonge sur le lit : — Alors ? — C’est bien (elle est sincère : court, mais bien). Le compliment l’émeut, probablement, puisqu’il tente encore, de ses mains maladroites, il retrousse la jupe jusqu’au slip. — Arrête ! L’arrête Vic. — Mais tu en as envie !… Je suis sûr que tu en as envie !… — Non, répond Victoire sans mentir. — Tu n’as plus de désir pour moi ? — Tu boudes depuis 25 jours, que veux-tu que je te dise ?… Une femme n’a pas envie sans sollicitations… — Mais je te sollicite, je te sollicite… Et Philippe s’emballe de nouveau, et lui pétrit les cuisses, et lui broie les genoux. — Non, j’ai pas envie comme ça. — Mais j’en ai marre, moi, de dormir dans le salon ! — Alors reviens. Reviens dans le lit si tu veux… — Mais si je reviens, si je dors à côté de toi, je vais avoir envie de baiser moi !!!! Allez Bouboule… Supplie-t-il. Pour l’hygiène !… — Non, je suis désolée… Pas envie. — Bon, c’est le divorce que tu veux ? Et il se redresse avec fierté. — Tout de suite les grands mots ! Soupire Vic. — Dis-le, tu veux le divorce ? — Non, j’ai besoin de faire le point. — Oui, c’est ça, tu veux divorcer. Et il part en claquant la porte. Puis sort. Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 31 mai 2006 Le 31 décembre midi, Victoire appelle Rachel pour prévenir qu’elle ne viendra pas ce soir. Ni elle, ni les enfants. La pauvre mère balbutie : — Mais, mais… Et Phil ?… — Philippe m’a dit hier qu’il resterait avec nous. — Ecoutez, ce n’est pas le moment… Victoire regarde ses bras couverts de bleus. Lorsqu’elle s’est révoltée, la veille, parce qu’elle n’avait pas vu Philippe depuis 48 heures, qu’il était parti à Montmorency décorer le sapin, et avec les enfants, il l’a ruée de coups. — Je sais, avec vous, ce n’est jamais le moment. Mais figurez-vous que j’en ai marre !… Marre parce qu’il dort sur le canapé depuis trois semaines, vous le savez, qu’il dort sur le canapé depuis trois semaines ?… Marre de mes dimanche seule à la maison… Vous trouvez ça normal qu’il me prenne mes enfants tous les dimanche ?… Ca ne vous choque pas ?… Donc, je répète, nous ne venons pas ce soir, et de surcroît, j’accepte la séparation. Samuel prend le combiné et tonitrue : — Ecoutez : que vous ne veniez pas ce soir, nous, on s’en fiche… Mais les enfants viendront !!! Vous n’avez pas le droit de les priver de la fête !… — Et vous, vous avez le droit de les priver de leur mère la nuit du Nouvel An ?… Vous avez le droit de me les voler chaque dimanche ?… — C’est à Philippe qu’il faut vous adresser, nous, on n’a rien à voir là-dedans… — Mais votre pauvre fils, on ne peut plus lui dire un mot… Elle regarde ses bras. Et vous êtes responsables : vous l’avez complètement castré, il n’a plus de couilles votre pauvre fils !!! — Oh ! s’offusque Samuel !… Qu’est-ce-que c’est que cette vulgarité ?… Je n’ai jamais été grossier, moi, que je sache… — Si ! Le jour de la Sainte Victoire, vous m’avez traitée de «mère dénaturée» et devant Nicolas ! — Mère dénaturée ?… Mère dénaturée ?… Mais je n’ai jamais dit ça ! — Alors je n’ai jamais dit couilles. Samuel raccroche au nez de Victoire. Par mesure de sécurité, elle dépose les enfants chez Zina. Lorsqu’elle passe les reprendre, à 18 heures, Zina l’invite, pour changer d’année avec Charles. Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 31 mai 2006 Ce soir de réveillon 1991, Victoire tremble de peur dans l’ascenseur. Peu habitué à veiller si tard, Nico est fatigué. Il envoie un violent coup de pied à son petit frère David : — Non, c’est moi pour monter ! David Hurle et Victoire en oublie un instant l’essentiel : — Calmez-vous les enfants, on arrive. Elle est trop lasse pour expliquer à ses deux rejetons, une fois de plus, que le petit appuie sur le bouton zéro lorsqu’ils descendent et que le grand se charge du deux pour monter. Elle a hâte de rentrer, d’enlever sa tenue de fête, d’enfiler leurs pyjamas aux enfants. Elle a hâte de s’enfermer dans sa chambre. En ce jour de décembre, le dernier de l’an 91, elle a commis «La Faute». On ne défie pas la Mafia… A 23 heures, les enfants sont au lit. Victoire respire un peu. Elle a décidé, pour une fois, de les garder contre elle toute la nuit. Le père lui interdit d’ordinaire cette marque d’affection qu’il juge incestueuse mais Victoire n’est plus à ce détail près, elle a besoin de leur force pour assumer le lendemain, elle a besoin de leur odeur pour fêter, à sa façon, cette année qui commence, loin des flonflons et du champagne, juste eux contre elle, juste l’amour de ses deux fils, juste le réconfort de leur existence… Panique : à 23 heures 03, la clef tourne dans la serrure de la porte d’entrée. Les enfants bondissent hors du lit, sensé matrimonial il y a trois semaines encore, les enfants, insouciants, accueillent leur père avec des cris de sioux. Philippe franchit le seuil les bras lourds de paquets. Victoire sait qu’il n’y a rien pour elle. Elle suit son mari des yeux, elle le regarde se décharger devant le magnifique sapin qu’elle a décoré pour Noël. Sous les banderoles et d’un geste nerveux, Philippe, sans même lui avoir dit bonsoir, s’attaque au bolduc qui entoure les paquets. Les enfants hurlent de joie : — Chic ! Un déguisement de cow-boy ! Super ! Une voiture téléguidée !… Vic assiste, impuissante, au délirant bonheur de ses gosses. Le Père Noël est passé chez mamy, le Père Noël passera chez maman… Victoire le sait, rigole, prend des photos. Elle a saisi au vol le regard lourd de son époux. Elle va payer, Victoire le sait. Philippe a recouché ses deux fils dans leurs lits et fermé la porte de leur chambre. Victoire revient de chez ses parents où elle a grignoté sans boire. S’est avalé un Lexomil entre deux petits fours puis a demandé à son père de la reconduire sans attendre le douzième coup de minuit. Elle voulait rentrer avant Phil mais puisqu’il était là : — Philippe, il faudrait que nous parlions, calmement… Préfères-tu attendre demain ou discutons-nous maintenant ? Très posément, Philippe répond : — Je suis à ta disposition, «mon amour». Vic s’installe donc dans le fauteuil tandis que lui s’assied en face, sur le canapé. Bon, commence-t-elle avec courage : tu n’es pas sans savoir que j’accepte la séparation, et que j’en ai parlé avec ta mère au téléphone ce midi. — Oui, se contente de répondre Philippe. — Bon (et chaque nouvelle phrase est un effort). Tu sais peut-être aussi que j’ai proposé deux solutions : tu te trouves un appartement et me laisses celui-ci pour les enfants, ou je pars, moi, dans quelque chose de plus petit, avec les enfants… — Oui. — J’aimerais connaître ton choix et ce qu’en dit ta mère. — Mon choix est clair : je cherche l’appartement depuis un mois, je ne l’ai pas encore trouvé, et j’ai pris contact avec un avocat. L’idéal serait un divorce à l’amiable. — Qu’entends-tu par là ? — Nous nous mettons d’accord sur tout, nous n’avons plus qu’à signer, pour 6000 fcs, le divorce est réglé en trois semaines. — D’accord sur tout ?… Alors, commençons par les enfants. — On se les partage. — C’est-à-dire ? — La garde conjointe, moitié chez toi, moitié chez moi. — Donc nous ne pouvons pas divorcer à l’amiable. — Pourquoi ? — Parce que moi, je veux la garde de mes enfants. Ils seront domiciliés chez moi, je te les laisserai un week-end sur deux et tous les mercredi, plus la moitié des vacances. — Donc tu comptes m’empêcher de revoir mes enfants ? (le ton devient grinçant). — Je n’ai pas dit ça. Je veux le système classique : l’autorité parentale conjointe et la garde à la mère. Ils ont deux et quatre ans, à cet âge-là, ils ont plus besoin de leur mère que de leur père. Et ils sont trop petits pour naviguer d’une maison à l’autre. Lorsqu’ils atteindront dix, douze ans, on pourra changer de méthode… — Donc, je répète, tu veux m’empêcher de voir mes enfants ? (le ton monte dangereusement). Vic joue les fatalistes, son mari commence à l’effrayer mais elle ne doit pas le lui laisser percevoir, elle ne doit pas surenchérir : — Si tu veux comprendre les choses comme ça, comprends-les comme ça… — OK, OK. Mais je te préviens (il menace des yeux) : chaque week-end que je les aurai, chaque vacances que je les aurai, tous les jours, je leur répèterai : «Si vous ne voyez pas plus souvent papa, c’est à cause de maman». Et tu verras comme ils seront tordus au bout du compte… — Effectivement, si tu dis ça… — C’est donc ce que tu souhaites : que tes enfants soient tordus… Tu te fiches complètement de leur équilibre. — Je suis loin de m’en fiche, mais l’idée du bourrage de crâne n’est pas de moi… Si tu le prends comme ça, que veux-tu que j’y fasse ? — Accepte la garde conjointe. — Il n’en est pas question dans l’immédiat. — Bon. (et ses yeux sont des poignards, et ses masséters sont serrés, comme un Berger Allemand prêt à bondir). La peur s’emballe d’un coup, le feu patiemment attisé prend enfin, Vic maîtrise de justesse ses tremblements tandis que Philippe continue : — OK, OK… Tu vas faire des enfants dégénérés, je te répète que tous les jours, je leur dirai ces mots… Elle l’interrompt, se lève du fauteuil : — Je crois qu’il vaudrait mieux aller se coucher, tu es en train de perdre ton sang-froid et je suis fatiguée… Surtout, il a ses yeux de fou, comme le jour où il a manqué de la tuer, où il a serré si fort ses doigts autour de son cou qu’elle a senti le sang lui battre aux tempes ; comme le jour où, devant Nico bébé, il s’est emparé d’elle et l’a violemment projetée sur le lit. Elle se dirige vers sa chambre, lentement, et pourtant elle a hâte d’y être pour s’enfermer à clef. Elle entend : — C’est ça, va te coucher conasse ! Elle ne doit pas répondre à l’insulte, elle ne doit pas relever l’affront, elle s’est faite aux injures, depuis cinq ans qu’elle les subit, depuis cinq ans qu’elle a conçu Nico… Et pourtant elle répond, plutôt que de courir s’enfermer, elle perd trois secondes à répondre au dément, l’orgueil sans doute, l’orgueil qui va la perdre : — Oh tu sais, articule-t-elle avec lassitude, conasse, poufiasse, flemmasse, trou-du-cul merdeux… j’ai l’habitude… Son flegme quoique artificiel encourage Philippe à la suivre. Dans le couloir, il continue : — C’est ça que tu souhaites, avoue-le, c’est tordre tes enfants, n’est-ce-pas ? Tu n’en as rien à foutre, dans le fond… Ce que tu veux, c’est te les approprier, les avoir pour toi toute seule, de toutes façons, c’est pour TOI et uniquement pour TOI que tu les as faits !!! La voix de Philippe explose à présent. Vic est derrière la porte de sa chambre, au lieu-dit «sécurité» mais lorsqu’elle tente de la fermer, Philippe la bloque avec son pied. La minute est insupportable mais Victoire la supporte : — Allons nous coucher Philippe, retourne sagement dans ton salon, nous en reparlerons, j’ai sommeil. Mais lui insiste, le pied coincé : — Tu n’as pas honte ? Tu veux les garder sans même voir leur intérêt !… C’est bien ce que je disais : tu es une EGOISTE qui a fait des enfants pour elle !!! Vic s’étonne de son self-contrôle : sois calme ma fille, sois calme, vire-le, il est devenu complètement dingue… Elle crois trouver la solution, elle connaît son esprit de contradiction, si elle lui donne raison, il va abandonner : — D’accord : tu as raison sur tout, je suis une mère indigne, j’ai fait les enfants pour moi, je me fiche pas mal de les détraquer… Elle abonde dans son sens pour qu’il la laisse, pour qu’il débloque son pied de la porte et qu’elle puisse la fermer à clef. Elle échoue. Dès cette phrase finie, une seconde, elle voit les yeux de fou exorbités, elle sent deux mains puissantes lui étreindre les épaules, elle ne touche plus terre, vol plané, elle atterrit sur la moquette. Le blanc. Un écran blanc occupe l’espace, une douleur aiguë lui transfixe la nuque, elle ne peut plus bouger, elle sent le bois du meuble contre lequel elle a cogné, elle entend, comme dans un rêve de l’au-delà : «Victoire !… Qu’est-ce-qu’il y a ?… Relève-toi ! Parle-moi !…» Elle ne peut pas se relever, elle ne peut pas parler. Explosée comme un verre jeté par terre de rage… Le blanc de son cerveau se colorie soudain : une multitude de scènes défile à toute allure, sans queue ni tête, des bribes de vie qui lui semblent vécues, d’autres qui ne lui disent rien, elle gît sur la moquette, anéantie. Elle se souvient qu’au moment de la mort, la vie défile. Elle pense qu’il lui a rompu le cou et qu’elle est en train de mourir, tout simplement. Mourir un premier de l’an, des mains d’un assassin… Le cinéma des images continue, comme si elle était par instant très consciente, à d’autres victime d’hallucinations. Elle se souvient de son oiseau Coco, au cou cassé d’avoir voulu volé contre la fenêtre, tombé en perpendiculaire et qui n’a plus volé, de ce médecin martyre dont elle a lu l’histoire ce matin au bureau : violée, violentée, puis salement égorgée par un toxicomane en mal de drogue. Elle voit du sang sur la moquette, elle ne sait d’où il sort. Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 31 mai 2006 voila c'est fait ma kti Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 31 mai 2006 Pardon, y'a eu un beug !!!! hihi C'est pas drôle Ca loupe mon effet de fin, mais bon........ Y'a-t-il un Vini sur le forum pour retirer le trop plein ???? VINI !!!!! Ce texte devient incompréhensible !!!!!!! VIIIIIIIIIIIIINNNNNNNNNNNNNNIIIIIIIIIIIIII Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 31 mai 2006 FIN (3000 messages !!!, c'est le trois millième !!!!) Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
carlla 0 Posté(e) le 1 juin 2006 Waowwww 3000 :bravo: Continue..... carlla Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
carlla 0 Posté(e) le 1 juin 2006 Je viens de relire 3 fois... Ne me dit pas que c'est la fin? Bon, je vais le relire aprés-midi.... carlla Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 1 juin 2006 Et si Carlla, pour celui-ci, c'est fini. J'ai remis le prologue en épilogue (deux fois à cause du beug lol)... Parce que le bouquin commence par la fin et qu'ensuite, ce sont des flash-backs (quand l'héroïne est éclatée par terre, le cou cassé, et qu'elle voit sa vie défiler). Sur ce sujet (la violence conjugale, le mariage mixte, le racisme), je n'avais rien d'autre à dire. Je suis désolée de te décevoir si tu en voulais davantage (c'est un beau compliment)... Mais j'ai écrit plein d'autres titres !!!! Bisous Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
carlla 0 Posté(e) le 1 juin 2006 t'ention Kti Je le crie..... BRAVO!!! Tu l'as raconté, tu l'as dit, tu l'as écrit.... J'y était dedans Et même si personne n'en voulais de ton bouquin Kti carlla Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 1 juin 2006 Ne vous inquiétez pas, ma Victoire n'est pas morte !!! (Victoire est increvable). On la retrouve toute jeune dans le Soleil Rose (écrit avant) Puis, on suit sa vengeance (elle bute le père), dans «Le Loft» Elle devient mère une troisième fois, dans «l'Affaire MCJ» Puis elle part en vacances (Caroline en vacances) Et travaille en bureau (Harcellement, sexe, mobbing et licenciement) Puis elle rencontre l'amour de nouveau (Souris-moi) Ah ma Victoire ne chôme pas !!! lol! D'ailleurs, moi, elle me tue...... hihi Faut la suivre, cette bestiole ! Merci de me lire, merci à vous !!! Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites
kti 0 Posté(e) le 4 juin 2006 Lol Vini !!! Merci d'avoir ôté ce doublon du dernier chapitre (quand j'ai envoyé la première fois, on m'a répondu : «error, no request», alors j'ai reposté mais le premier texte était passé..) Non, là, ce qui me fait rire, c'est que ta correction est signée de moi : Donc, Kti, avec en face :« voila c'est fait ma kti » Donc Kti parle à sa Kti et ça les fait bien marrer toutes les deux !!! _________________ Kiss à tous Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites