s.deschamps 0 Posté(e) le 11 décembre 2009 Le périple des Sentinelles du Littoral devrait s'arrêter sur la Côte d'Opale. Le Dunkerquois est connu comme zone industrialo-portuaire. C'est en fait un littoral tout à fait particulier pour faire voisiner industries et espaces naturels ainsi que pour avoir une histoire récente forte en remaniements. Un lieu, la digue du Braek, raconte cela en 7 kilomètres de route entre le bassin construit pour Usinor et la plage de la Mer du Nord. Un documentaire, co-produit par France 3 Nord-Pas-de-Calais, en a fait son sujet (La digue 2006/07). L'ADELFA et d'autres collectifs souhaiteraient emmener les téléspectateurs de Thalassa au Clipon, tout à l'ouest du Dunkerquois, au delà de la digue du Braek. Pour quelques temps encore, le Clipon est une zone de pelouses sèches, de dunes en reconstitution et de plages – verte et sableuse. Son nom est celui d'un hameau agricole de Loon-Plage qui n'existe plus depuis que l'industrialisation massive est arrivée dans la contrée la plus septentrionale de France. Quand le port de Dunkerque s'est étendu vers l'ouest dans les années 60-8O, le Clipon est devenu propriété du PAD (Port Autonome de Dunkerque) pour être une réserve foncière. Une réserve au sens large puisque le PAD s'est étonné récemment qu'une partie du Clipon soit en Domaine Public Maritime alors que pour lui, n'existent que les « tolérances » d'usages qu'il octroie. Par exemple, de laisser 23 hectares pour un terrain de motocross en 2003. Sept cents hectares du Clipon ont été classés, en 1982, en ZNIEFF de type 1. Là et aux proches alentours, la nature a repris ses droits et des usagers somme toute respectueux. Bien sûr, le site est aussi sous PPI (Plan particulier d'intervention) parce qu'entouré de 13 usines Seveso seuil haut et à 3 km de la troisième centrale nucléaire du monde, et donc, à risques technologiques. « Pas plus que nos maisons » pour la plupart des personnes qui le fréquentent. Des Dunkerquois, mais pas seulement, le considèrent même comme plus naturel que d'autres plages. Surtout, le Clipon est un espace de libertés. Depuis le projet de terminal méthanier des deux maîtres d'ouvrage que sont le PAD et EDF, l'avenir du Clipon est devenu une réelle préoccupation. Pas seulement parce que ce site, à la fois naturel et bien fréquenté, est menacé de disparition mais aussi en raison des choix de société qui amèneraient cette disparition. Pour les défenseurs de milieux naturels, coté terre, le Clipon est unique en Côte d'Opale. Les ornithologues alertent : le site abrite une des plus importantes colonies de reproduction de sternes naines de France et même d’Europe (400 couples). D’autres oiseaux peu communs y nichent, notamment une dizaine de couples de Grands Gravelots et autant de Gravelots à collier interrompu, l’Huîtrier pie. En hiver, cette plage accueille en nombre d’autres espèces patrimoniales comme le bruant des neiges ou le hibou des marais. Enfin, depuis 30 ans, la jetée toute proche est un haut lieu européen pour l’observation de la migration en mer avec 250 espèces recensées dont des espèces très rares comme l'Albatros à sourcils noirs, la Mouette de Ross ou l'Océanite de castro. Les entomologistes parlent de deux espèces patrimoniales de papillons et une reproduction abondante d’une espèce peu commune. Les botanistes insistent sur le nombre de plantes protégées et sur le fait que les espaces relictuels ont beaucoup d'importance parce qu'ils sont les derniers témoins de la biodiversité spécifique de milieux dunaires. En outre, actuellement, l'ingénierie ne permet pas d'assurer les conditions de reconstitution de tels milieux – ce qui n'empêche pas d'envisager des expérimentations. Symboliquement, on trouve au Clipon une « pensée sauvage », la violette de Curtis, que l’on ne trouve guère plus au sud. C’est une relique glaciaire. L’installation d’un terminal méthanier aura pour incidences, entre beaucoup d’autres, que des dépôts de sable de dragage seront effectués au large. Or, le Clipon se prolonge par une aire maritime en voie de classement Natura 2000 en mer. Deux classements selon les directives européennes « Oiseaux » et « Habitats » sont en cours sous l'intitulé « Bancs de Flandres ». Ces bancs sont des dunes hydrauliques caractéristiques du sud de la Mer du Nord. Ces écosystèmes sont fragiles. Ils accueillent des espèces typiques parmi lesquelles le Phoque veau-marin et le Marsouin commun. Pour ces mammifères marins, mais aussi pour toute la faune et la flore aquatique marine, le Clipon est un lieu d'échanges vitaux entre les mondes terrestres et marins. Nourricerie pour les uns, abri pour les autres, il est l'un des maillons essentiels du maintien de la biodiversité marine au niveau européen. Parmi les poissons, il accueille le cabillaud, l'anguille, et l'alose, trois espèces fortement menacées. Il participe également au maintien de la sole, d'une grande importance économique pour la région. Il abrite beaucoup d'autres espèces, moins remarquées. C'est cette richesse qui attire de nombreux pêcheurs, venus des quatre coins de France, de Belgique, et d'ailleurs. Au vu de la fréquentation du site, tous ses défenseurs ne sont pas des « écolos ». Un collectif « Sauvons le Clipon » s'est formé en mai 2008 pour une première manifestation festive : une ducasse publique maritime (DPM) pour tous « les usagers de ces lieux libres ». Le collectif entend bien reprendre la formule en avril/mai 2009. Et si tous ses défenseurs ne se sont pas signalés, tous s'interrogent comme citoyens. Il y a eu débat public à propos du projet de terminal méthanier, ici comme ailleurs. Le débat fut biaisé à plusieurs titres et notamment parce qu'ont été annoncés d'emblée « un large consensus des acteurs politiques et économiques et une forte acceptabilité sociale pour un développement industriel durable » au niveau local. En dépit de leurs efforts, des « acteurs » locaux, ceux des « cahiers d'acteurs » qui s'opposaient plus ou moins au projet, n'ont jamais pu élargir les perspectives pour des décisions (accords de Kyoto, suites du Grenelle de l'environnement, politiques et marchés énergétiques européens – Zeebruge est à 50 kilomètres -, … pas même le problème de l'élévation du niveau de la mer). Peu de Dunkerquois savent ce qu'est un développement industriel durable, au vu de l'existant. Combien de français ? En outre, la crise économique a d'ores et déjà des répercussions sur les productions industrielles locales. Le terminal méthanier au Clipon est prévu pour durer 50 ans. Au delà : ? Les industries, le trafic portuaire, l'économie dans le Dunkerquois reposent sur l'exploitation d'énergies fossiles, et ce projet n'entame aucun virage vers les sources d'énergies renouvelables. Il a été dit, par les animateurs du débat public notamment, que les Dunkerquois n'attendent que des « compensations » au regard de ce projet. De leur côté, les élus politiques attendent 20 millions d'euros de recettes fiscales et le PAD, entre 6 et 10 millions de recettes. Et de nouveaux investisseurs (du secteur secondaire ?) puisque « l'attractivité du territoire » serait accrue. Au delà de 50 ans ? De façon faussement contractuelle, EDF s'est engagé à rendre alors le Clipon «en l'état initial». Comment des décideurs politiques et économiques peuvent-ils dire cela ? Le Clipon pose questions bien au delà de son périmètre... Son sort préfigure-t-il celui de tout patrimoine côtier et maritime, naturel et culturel, que les intérêts économiques veulent saccager ? Le Collectif "Sauvons Le Clipon" : La pétition en ligne : http://www.mesopinions.com/Non-a-la-creation-d-un-terminal-methanier-a-Dunkerque-petition-petitions-c324fd07c429935b2bc1bfe0a20e7dd8.html Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites