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Les arbres disposent d'une faible marge de manœuvre face à la sécheresse

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Sous l'écorce de chaque arbre bat un ingénieux système vasculaire qui transporte tous les jours des centaines de litres d'eau vers l'atmosphère. Ce système hydraulique repose sur un mécanisme unique mais très instable car sans cesse soumis aux contraintes de l'environnement.

Des chercheurs de l'INRA associés à un groupe de recherche international ont montré que la plupart des arbres fonctionnent à la limite du point de rupture de ce système hydraulique. Ce travail permet de mieux comprendre pourquoi les dépérissements des forêts provoqués par les sécheresses se produisent non seulement dans les régions arides, mais aussi dans les forêts humides, non considérées à risque jusqu'à ce jour.

Les variations de la disponibilité de l'eau dans le sol peuvent induire une augmentation des tensions sur les colonnes d'eau dans les tissus conducteurs des arbres, notamment en cas de sécheresse. Au-delà d'un certain seuil, ces tensions provoquent une rupture des colonnes d'eau suite à l'apparition de bulles d'air, ce qui conduit à un blocage irréversible de la circulation appelé embolie.

Depuis quelques années, plusieurs études ont démontré expérimentalement que la vulnérabilité à l'embolie était liée à la survie des arbres en condition de sècheresse. Cependant, cette vulnérabilité varie considérablement entre les espèces, ce qui rend difficile la prédiction de l'impact des sécheresses sur les écosystèmes forestiers.

Une équipe internationale de 24 scientifiques spécialistes de la physiologie des plantes ont réalisé une synthèse de données mondiales sur la résistance à l'embolie des plantes ligneuses, dont la plupart sont des arbres[1]. Des chercheurs de l'Inra de Clermont-Ferrand et de Bordeaux ont apporté à cette analyse leur expertise sur la vulnérabilité à l'embolie des espèces ligneuses européennes et des conifères de la planète.

Les chercheurs ont logiquement constaté que les espèces qui poussent dans les forêts humides étaient moins résistantes à l'embolie que celles qui croissent dans les zones arides. Toutefois, il est apparu que la plupart des arbres atteignent d'ores et déjà leur seuil de rupture hydraulique, les rendant ainsi très vulnérables à la sécheresse, et ce quel que soit l'écosystème forestier considéré. En effet, 70% des 226 espèces ligneuses des 81 sites examinés dans cette étude globale fonctionnent avec une «marge de sécurité hydraulique» très faible. L'équipe a constaté que ces marges de sécurité sont largement indépendantes des précipitations annuelles moyennes. Ceci illustre la convergence globale de la vulnérabilité des forêts à la sécheresse car, indépendamment des précipitations reçues dans leur environnement, les forêts apparaissent toutes très vulnérables à la défaillance hydraulique.

Ces résultats permettent de mieux comprendre pourquoi les dépérissements des forêts provoqués par les sécheresses se produisent non seulement dans les régions arides, mais aussi dans les forêts humides, non considérées à risque jusqu'à ce jour. Les arbres optent en effet pour une stratégie hydraulique à haut risque traduisant un compromis qui concilie croissance et protection contre l'embolie.

Pour les arbres, et d'une manière générale pour la planète, les conséquences de sécheresses plus longues et de températures plus élevées sont potentiellement dramatiques. Par exemple, le déclin rapide des forêts pourrait convertir le puits net de carbone des forêts tropicales en une source massive de carbone et provoquer également de profonds déséquilibres de la biodiversité au cours de ce siècle.

Cependant, les résultats de l'étude ne prévoient pas de scénarios catastrophiques pour les écosystèmes forestiers. Malgré les changements de température et de pluviométrie déjà observés, certaines forêts sont en expansion et devraient continuer à progresser. Seuls les peuplements en limite sud d'aire de répartition de l'espèce pourraient être affectés dans un futur proche. Ces recherches devraient permettre d'identifier les espèces qui sont susceptibles de persister et celles qui sont susceptibles de souffrir, voire de disparaître avec l'augmentation de l'aridité (fréquence et intensité des sècheresses). Elles aideront également les modélisateurs à prédire l'équilibre entre les dépérissements et l'expansion des forêts.

Chaque jour, les arbres transpirent de grandes quantités d'eau afin de refroidir leurs feuilles tout en absorbant du dioxyde de carbone pour la photosynthèse. Cette eau est absorbée dans le sol et transportée par un réseau de fins conduits qui relient les racines aux feuilles grâce à une pompe aspirante dont le moteur est l'énergie solaire.

Garder ce système hydraulique fonctionnel est donc l'un des principaux problèmes auxquels sont confrontées les plantes en période de sécheresse. Ce système est en effet très vulnérable et risque de se désamorcer par formation d'embolie gazeuse. Lorsque le sol se dessèche, la sève des arbres est exposée à de très fortes tensions qui peuvent rompre les colonnes d'eau à l'intérieur de leur système vasculaire. Ce phénomène de 'cavitation' produit une embolie gazeuse de la même manière que des thromboses peuvent bloquer le système circulatoire des humains. Lorsque l'intensité de la sécheresse s'accentue, l'embolie s'accumule dans le système vasculaire jusqu'à ce que l'arbre se dessèche et meure.


Notes : Le travail du groupe a été financé par ARC-NZ Research Network for Vegetation Function - Institut National de la Recherche Agronomique



Vue microscopique d'une feuille de noyer montrant une bulle d'air (embolie) dans un vaisseau d'une petite veine. Cette embolie se forme en période de sécheresse et peut entraîner le dessèchement de la feuille. ©️ INRA/Hervé Cochard


Notre Planète Info 14/12/2012

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