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Pourquoi les tomates n'ont-elles plus de goût ?

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Aujourd'hui, elles déçoivent les papilles. Retour sur une histoire de goût dont s'est emparée la recherche scientifique.

Cuites au four à la provençale, en salade avec un filet d’huile d’olive et des feuilles de basilic, nature ou croque au sel en pic-nic… les tomates sont plus que jamais au menu pendant les mois d’été. Pourtant, souvent, les papilles sont déçues. «Les tomates n’ont plus de goût»… peut-on souvent entendre. Est-ce vrai ? La mise à disposition de la communauté scientifique de la séquence génétique de la tomate va-t-elle permettre de remédier à ce problème existentiel ?

 tomates marché de rungis( (Witt/SIPA)



Pour Mathilde Causse, qui se préoccupe du goût de la tomate à l’Inra depuis 15 ans, l’appréciation de ce fruit est en bonne partie subjective. Texture saveur, arômes... Tous les consommateurs n‘ont pas les mêmes préférences… Cependant, «lorsque la sélection des variétés de tomate a été organisée à partir des années 50, elle ne s’est pas préoccupée du goût», reconnaît la directrice de recherche au GAFL (laboratoire Génétique et amélioration des fruits et légumes, Inra, Avignon). Résistances aux maladies et aux ravageurs, rendements, précocité, texture et conservation étaient prioritaires. «Le goût semblait inhérent au fruit...»

Pourtant, au fil des sélections et des hybridations, les qualités gustatives de la tomate ont trinqué. Ce fruit originaire d’Amérique du Sud, de la famille des solanacées comme la pomme de terre, a commencé à être cultivé sous serre, toute l’année, y compris dans des pays du nord de l’Europe. «Les variétés ont été adaptées aux conditions de culture sous abri et avec moins de lumière, or la chaleur et la lumière sont déterminantes pour le goût» résume Mathilde Causse.

Un autre palier a été franchi dans les années 80 :«des sélectionneurs israéliens ont mis sur le marché une variété –Daniela- pouvant se conserver 3 semaines après récolte, grâce à une mutation sur le gène rin, relate la scientifique. Mais cette mutation a un défaut très net : le fruit est plus ferme et mûrit moins vite. A la fin des années 80, les consommateurs ont commencé à se rebeller contre la perte de goût !».

Les sélectionneurs ont donc tenté de corriger le tir mais ils ne sont pas les seuls en cause dans cette histoire de goût : toute la chaîne est impliquée, de la culture au frigo du consommateur. Les tomates sont cueillies avant maturité, lorsqu’elles sont orange en France ou encore vertes aux Etats-Unis, alors que «les arômes se dégagent dans les dernières phases de maturité», précise la spécialiste. Ensuite il y a le transport, le stockage, puis la conservation chez le consommateur. Lorsqu’on les met dans le réfrigérateur, elles perdent leurs arômes. Il faudrait les sortir au moins 24h avant de les servir en salade pour récupérer leur saveur.

Fin juin des chercheurs américains ont publié une étude dans la revue Science montrant qu’en surexprimant le gène SIGLK2 dans des tomates ont augmentait la quantité de sucres. Ce gène étant inactif dans les variétés vendues en supermarché, Ann Powell (University of California, Davis, USA) et ses collègues y voient un moyen d’améliorer le goût des tomates.

Face à ces travaux, Mathilde Causse est sceptique. «Il y a d’autres moyens d’augmenter le taux de sucres dans la tomate sans passer par ce gène qui donne des tomates bicolores, avec un collet vert, pouvant devenir jaunes s’il y a trop de lumière. Et puis le sucre ne suffit pas à faire une bonne tomate, il faut aussi de l’acidité, et des arômes…». Ces arômes sont des molécules volatiles perçues par le système olfactif. Il y a plus de 400 composés volatils dans la tomate, produits par la dégradation de lycopènes, de carotènes, d'acides aminés...

Tous les composants du goût –texture, saveur (sucré/acide), arômes- dépendent donc d’un très grand nombre de gènes, dont certains ont déjà été identifiés. «Cependant créer des combinaisons est complexe, nuance la chercheuse, et les contraintes sont fortes : il est difficile de revenir en arrière sur les rendements, les résistances aux maladies ou la conservation».

En attendant que la génétique fasse progresser le goût des tomates adaptées à des circuits de production et de distribution de masse, le chemin le plus court vers une tomate savoureuse est le suivant: s’approcher au plus près d’un pied de tomate bien exposé au soleil et cueillir le fruit à maturité…


SCIENCES ET AVENIR 23/8/2013/

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