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Contre les essaims de criquets, un parasite intestinal !

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Les essaims de criquets migrateurs sont ravageurs pour les cultures. Sans le savoir, un parasite intestinal pourrait nous avoir indiqué des solutions. En acidifiant son milieu d’accueil, cette microsporidie réduit la production d’une phéromone impliquée dans le rassemblement des insectes. Surprise, elle limite également la synthèse de dopamine et de sérotonine, des neurotransmetteurs.

Les criquets migrateurs Locusta migratoria manilensis sont un exemple typique de polyphénisme. Leur phénotype peut varier sous la contrainte d’un facteur environnemental, en l’occurrence la densité de leur population. Quand elle est faible, ces orthoptères sont solitaires et affichent une longueur à l’âge adulte comprise entre 4 et 6 cm. Au-delà d’un certain seuil, les choses changent. Les insectes deviennent plus petits et grégaires. Ils s’assemblent alors en essaims parfois composés de plusieurs milliards d’individus.

  Les criquets migrateurs Locusta migratoria manilensis sont des insectes orthoptères de la famille des acrididés. Avec les criquets pèlerins et nomades, ils composent en partie le groupe des locustes. ©️ Manfred Beutner, Flickr, cc by nc nd 2.0

Ces essaims posent régulièrement de sérieux problèmes en Afrique, en Asie, en Australie et en Nouvelle-Zélande. En quelques instants, ils peuvent détruire des hectares de cultures, au point de causer des épisodes de famine. La raison est évidente : chaque locuste doit se nourrir. Or, ces insectes consomment tous les jours leur propre poids en graminées (soit quelques grammes). Pour se prémunir des ravages causés par ces animaux migrateurs, plusieurs pays utilisent actuellement de puissants insecticides. Une nouvelle solution pourrait bientôt leur être proposée, grâce à de récentes découvertes.

 Essaim de criquets migrateurs à Madagascar dans la zone Ankilizato (à l'est de Morondava), 21 Avril 2013: Cet essaim n'est plus en transit et pourrait très bien s'installer dans cette région, où la végétation est encore verte. Ce n'est pas seulement la preuve de la présence d'essaims dans la zone d'invasion, mais également le risque pour les cultures d'hiver. ©️ FAO 8/5/2013

En 2004, des scientifiques menés par Wangpeng Shi de la China Agricultural University se sont rendus compte que des locustes infectées par un champignon s’agrégeaient moins que les autres. Depuis, ils ont cherché à en savoir plus. Dix ans plus tard, les mécanismes en jeu viennent d’être décrits dans la revue Pnas. Le parasite en question est une microsporidie qui se développe dans l’intestin des criquets : Paranosema locustae. Ce faisant, elle impacte l’acidité du milieu, tout en agissant sur le fonctionnement du système nerveux central de l’hôte. Comment ?

  Les essaims de criquets couvrent parfois des surfaces de plusieurs kilomètres carrés. ©️ fturmog, Flickr, cc by nc sa 2.0

Lorsqu’il devient temps de s’agréger, les criquets émettent des phéromones spécifiques dans leurs déjections. À la suite de ce constat, des individus sains ont été exposés à des excréments d’insectes sains ou contaminés. Dans le premier cas, ils se sont agrégés normalement, mais pas dans la deuxième situation. Ainsi, la production de la phéromone est perturbée par l’infection. La raison a été déterminée en analysant l’intestin des hôtes. Le champignon acidifie le milieu, ce qui limite le développement des bactéries qui synthétisent les signaux chimiques.

Une autre découverte a été faite. Les locustes infectées produisent moins de sérotonine. Or, il s’agit d’un neurotransmetteur impliqué dans l’initiation du comportement grégaire. Par ailleurs, la sécrétion de dopamine, une molécule intervenant dans le maintien du comportement grégaire, est également amoindrie. La question qui se pose désormais est de savoir comment utiliser ces informations pour développer un nouveau moyen de lutte écologique. Faut-il se focaliser sur les bactéries produisant les phéromones ou sur la sélection de parasites limitant leur activité ? Ensuite, comment diffuser le système de lutte ?

Dernière interrogation : quel intérêt la microsporidie a-t-elle à limiter la formation des essaims… puisque cela contraint également sa propagation ? En effet, elle se répand lorsque les criquets migrateurs entrent en contact avec des déjections contaminées, durant leur reproduction ou lorsqu’ils se cannibalisent. Pour le moment, aucune hypothèse n’a été avancée.

 Des villes et campagnes envahies par les criquets, risque pour la recolte... cmampasu 5/10/2011

Futura Sciences 15/1/2014

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