Admin-lane 0 Posté(e) le 9 juin 2015 Pretoria (AFP) - Après l'Europe et les Etats-Unis, l'Afrique du Sud est à son tour touchée par la disparition des abeilles, indispensables pollinisatrices d'un grand nombre d'espèces végétales nécessaires à l'alimentation humaine.Une épidémie de loque américaine, une maladie mortelle pour les ruches causée par un germe, est en train de faire des ravages, pour la première fois dans l'histoire récente du pays, explique Mike Allsopp, agronome spécialiste des abeilles à Stellenbosch, dans l'arrière-pays du Cap. Schéma présentant le cycle de vie de l'abeille : de l'oeuf à l'adulte. JMKM CC BY-SA 3.0"C'est exactement la même chose qui se passe partout dans le monde", dit-il. Les abeilles attrapent des maladies parce qu'elles sont "stressées par les méthodes d'apiculture intensive, les pesticides et la pollution", alors qu'"autrefois, elles étaient moins vulnérables", dit-il. Elles souffrent "de l'homme, des pressions et du stress que les humains leur imposent".Les experts redoutent que la maladie ne se propage vers le nord, pour s'étendre au reste du continent africain, où l'apiculture artisanale fait vivre des centaines de milliers de personnes. "C'est une bombe à retardement. Toutes les ruches que j'ai examinées avec un cas de loque américaine sont mortes", indique M. Allsopp. Diagnostic : La présence de la loque américaine va provoquer des symptômes similaires à de nombreuses maladies pouvant toucher les abeilles, comme la présence d’un couvain en mosaïque, une faible activité de la colonie, ou encore une population déclinante. Il existe un test très simple pour vérifier si une ruche est infectée par P. larvae. Il faut mettre une allumette dans un alvéole encore operculé et la retirer. Si un filet visqueux s’étend de l’alvéole sur l’allumette, la loque américaine est présente. Ce filet correspond en fait aux restes de la larve complètement rongée par la bactérie qui s'est multipliée en elle.. Tanarus cc by-sa 3.0Lorsque Brendan Ashley-Cooper a découvert la maladie dans ses ruches en 2009, il s'est immédiatement inquiété: "Nous savions que nous allions avoir cette explosion massive de loque", raconte cet apiculteur du Cap. "Je ne savais pas quoi faire, je ne savais pas quelle serait l'étendue des dégâts. Je m'inquiétais juste pour mes abeilles".Six ans plus tard, le cauchemar est devenu réalité. Les ruches s'éteignent les unes après les autres.La loque américaine s'attaque au couvain (l'ensemble des larves), empêchant la reproduction des ouvrières. Lorsqu'une ruche est morte, des abeilles d'autres ruches s'y précipitent souvent pour en récolter le miel. C'est ce miel contaminé qu'elles rapportent dans leur propre ruche, propageant la maladie.L'Amérique du Nord et l'Europe sont confrontées à cette maladie depuis des siècles, mais les abeilles sud-africaines y avaient jusqu'ici résisté notamment grâce à la grande diversité des espèces d'abeilles locales, estiment les scientifiques. Un règlement imposant que tous les produits de la ruche importés en Afrique du Sud soient irradiés a également permis d'éviter la contamination pendant très longtemps.En 2015 cependant, la bataille est mal engagée: "la loque s'est répandue massivement ces cinq derniers mois (pendant l'été austral), elle a gagné dans l'ouest du pays un territoire de 500 km sur 400 où quasiment tous les ruchers sont infectés", déplore Mike Allsopp. "Elle progresse rapidement et je ne vois pas pourquoi elle s'arrêterait, à moins qu'une intervention humaine ne parvienne à la contrôler", poursuit-il.Comme partout, les abeilles ne sont pas seulement des fournisseuses de miel, elles sont surtout indispensables à la pollinisation de centaines d'espèces végétales."Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre nos abeilles", dit M. Allsopp. "Non pas à cause du miel, mais parce que nous avons un secteur agricole d'une valeur de 20 milliards de rands (1,5 milliard d'euros) qui dépend de la pollinisation par les abeilles". (En France, l’impact de la pollinisation est estimé à 3 milliards d’euros, ce qui renforce le caractère essentiel de l’abeille domestique).Selon l'organisation Greenpeace, qui a lancé une campagne pour sauver les insectes, quelque 70% des récoltes dans le monde, qui fournissent 90% de la nourriture consommée sur terre, sont pollinisées par les abeilles."Nous avons une équipe qui travaille actuellement à un programme d'actions qui sera annoncé dans les prochaines semaines", assure Mooketsa Ramasodi, directeur au ministère de l'Agriculture.Le plan du gouvernement prévoit de limiter les autorisations d'ouvrir des ruches, d'informer largement sur la maladie et de créer des règles plus strictes de gestion des colonies, comme l'analyse régulière des larves pour identifier les malades avant qu'elles ne contaminent toute la ruche. L'usage d'antibiotiques pour protéger les ruches, très controversé, ne sera retenu "qu'en tout dernier ressort", assure M. Ramasodi.Pour l'apiculteur Ashley-Cooper, ces mesures risquent cependant d'être insuffisantes et d'arriver trop tard, dans un secteur agricole où l'habitude est de ne pas intervenir et de laisser faire la nature. Une méthode qui avait toujours réussi aux apiculteurs, depuis des décennies.Paenibacillus larvae est une espèce de bactéries responsable d’une maladie connue sous le nom de loque américaine (American foulbrood), qui touche spécifiquement le couvain (zone regroupant les larves) de la colonie d’abeilles. En France, la loque américaine est une maladie réglementée faisant partie de la liste des maladies réputées contagieuses (MRC) de l’article D223-21 du code rural. Il s'agit de maladies ayant un fort impact sur la santé publique, l'économie de l’élevage ou le commerce international. En cas de constat de la maladie, sa déclaration aux autorités sanitaires et vétérinaires est obligatoire et conduira à la prise de mesures destinées à assainir et à bloquer l’expansion de la maladie.L'abeille mellifère Apis mellifera, espèce la plus connue d’abeille domestique, présente un rôle essentiel dans le maintien de la biodiversité et dans la reproduction de nombreuses plantes à fleurs. En outre, avec d’autres pollinisateurs, elle participe grandement au rendement des productions agricoles. Les abeilles sont néanmoins sensibles à de nombreux agents pathogènes responsables de maladies, tels que des virus (virus de la paralysie aigüe, virus de la « maladie noire »), des champignons parasites (Nosema apis et Nosema caranae, responsables de la nosémose), des ectoparasites (Varroa destructor, responsable de la varroase), des bactéries (Paenibacillus larvae) et aussi d'autres insectes tels que le frelon asiatique.Paenibacillus larvae est une bactérie sporulante Gram positive. Les spores, qui constituent le mode de dissémination et de contamination de la bactérie, sont extrêmement résistantes. En effet, des tests montrent que celles-ci peuvent résister 35 à 40 ans dans le milieu extérieur, plus d'un an dans le miel, et également à certains solvants tels que le benzène. L’infection des larves (âgées d’environ 2 jours) se réalise donc par l’intermédiaire de nourriture contaminée par des spores de P. larvae, apportée par les abeilles nourrices. Les spores ingérées par les larves vont germer au niveau du tube digestif de celles-ci pour donner des formes végétatives qui pourront se multiplier de manière exponentielle. Il est important de noter que P. larvae produit une substance antibactérienne empêchant le développement d’autres bactéries. L’infection va ensuite se propager dans l’hémolymphe de la larve (l’équivalent de notre sang), puis dans tous ses tissus, conduisant à sa mort par septicémie. La larve est à ce stade entièrement déstructurée, et consiste en une masse visqueuse et collante. Lorsque toutes les ressources nutritives seront consommées, la bactérie va sporuler afin de survivre dans ce milieu devenu défavorable. Chaque larve morte peut contenir jusqu'à plusieurs milliards de spores. Même à travers l’opercule présent sur l’alvéole, les abeilles « sentent l’infection » et essayent d’éliminer de la ruche les larves contaminées. Malheureusement, la consistance visqueuse de la larve rend difficile le nettoyage de l’alvéole par les ouvrières, qui répandent les spores de P. larvae partout dans la ruche. La loque américaine mène donc à la destruction du couvain, conduisant à une forte diminution, voir à la disparition totale de la colonie d’abeilles. Traitement : Bien que la forme végétative de P. larvae soit sensible à la streptomycine, à la pénicilline et à la terramycine, il n’existe à l’heure actuelle aucun traitement utilisable contre la loque américaine. L’utilisation d’antibiotique est en effet interdite dans le domaine apicole européen, en raison de l’interdiction par la réglementation de retrouver des résidus d’antibiotiques dans le miel. La prophylaxie reste donc le meilleur moyen de lutte, et consiste en de bonnes pratiques apicoles, comme la désinfection du matériel utilisé, ou l’absence de carence en pollen qui est un facteur favorisant. Si la colonie est trop atteinte, il faudra l’éliminer en asphyxiant les abeilles par une mèche de soufre incandescente. La ruche sera ensuite brûlée pour éviter la contamination des autres ruches. Des recherches ont cependant montré que certaines huiles essentielles d’oranger, de cannelle, de cumin, avaient une activité sur P. larvae. WikipediaSciences et avenir 6/6/2015 Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites