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Brochets en danger : pourquoi il est urgent de restaurer des zones de frai

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Très présent dans les cours d’eau français au siècle dernier, le brochet (Esox lucius) se fait désormais plus rare.

«Catch and release» (en français, «Attraper et relâcher»). C’est ainsi que les Américains désignent la pêche sportive. Autrefois, les brochets pêchés atterrissaient sur les tables familiales dominicales, c’était un « poisson de fête ». Mais les modes de vie actuels conduisent à préférer des produits de la mer préparés en filets.

 Brochet dans une gravière d'Alsace. 0x010C CCBY-SA3.0


Bourré d’arêtes, le brochet est plus difficile à consommer qu’un autre poisson d’eau douce, le sandre. Aujourd’hui les pêcheurs remettent donc à l’eau les quelques brochets qu’ils attrapent, "mais 1 sur 5 ne survit pas", témoigne Bernard Breton, président de la Fédération de pêche du Val d’Oise, secrétaire général de la Fédération nationale de la pêche en France et de la protection du milieu aquatique. Expert auprès de L'Union internationale pour la conservation de la nature, il sait que l’espèce est classée « vulnérable ».

Fautifs les pêcheurs ? Non. Ce ne sont pas eux qui ont entamé les stocks. Le déclin des populations réside dans l’urbanisation, la disparition des prairies inondables, la construction des barrages, écluses et autres mécanismes de retenues d’eau. « Entre faire passer les bateaux, gérer la pollution, éviter les inondations, les poissons n’ont jamais eu droit de cité, poursuit-il. Ce n’était pas la priorité des politiques ».

Mais en 2015, le respect de la biodiversité est une priorité. « Le brochet a beaucoup régressé dans les grands cours d’eau régulés par l’homme, Loire, Seine et ses affluents », précise Jérôme Belliard, ichtyologue à l’unité de recherche Hydrosystèmes et bioprocédés de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l'environnement et l'agriculture.

La reproduction du brochet est très spécifique: elle s’effectue sur des prairies inondées qui doivent être submergées pendant une période assez longue (50 à 60 jours). « La femelle pond à partir de fin février sur des végétaux aquatiques ou des végétaux terrestres submergés. Si l’eau se retire trop vite, les œufs/alevins ne survivent pas. L’assèchement leur est fatal ».

Drainage, déboisement des bassins versants, régulation des rivières… participent à raccourcir les temps d’inondation de ces quelques espaces de frai. « Dans dix ans, le brochet sera classé "en danger’’ si on ne le protège pas », prédit Bernard Breton. Cette espèce « parapluie » et emblématique du milieu se trouve au sommet du réseau trophique. Si on la protège, on préserve également d’autres espèces qui exploitent le même habitat (amphibiens, oiseaux tel le râle des genêts…).


 Le clapet automatique, pour maintenir inondées les zones de frai des brochets. Brevet INPI n° FR2995506. (Photo ©️ Hydrosphère, 95)

Pour pallier les aléas de la reproduction, le bureau d’études spécialisé en milieux aquatiques Hydrosphère, basé à Saint-Ouen-l’Aumône dans le Val d’Oise (95) a inventé un système hydraulique automatique, qui via des flotteurs est capable de réguler le niveau de l’eau d’une plaine inondable.

"Autrefois, les associations de pêche essayaient de maintenir des zones inondables avec des ouvrages personnels, des vannes avec des manivelles", analyse son directeur Pascal Michel. Mais il fallait aller sur le terrain régulièrement, contrôler la baisse du niveau des eaux, se rendre dans des endroits souvent peu accessibles. Or dans les associations, il y a de moins en moins de bénévoles. Ce type de solution n’était plus viable.

Avec ce procédé, plus d’intervention humaine aléatoire, les alevins seront toujours en zone humide et pourront grandir normalement. « Ce système permet aussi de favoriser certaines espèces végétales ou de les limiter, conclut-il. Si on veut faire disparaître des saules par exemple. Au lieu de les éradiquer avec des produits chimiques, il suffit de les maintenir dans l’eau un certain temps ».


Le Parisien 27/9/2015

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