Admin-lane 0 Posté(e) le 1 novembre 2015 Cela fait un quart de siècle que les Canadiens désespèrent de la reconstitution du stock de morues de Terre-Neuve. Pour la première fois depuis la fermeture de la pêcherie au début des années 1990, les halieutes constatent enfin une remontée de la population.La morue de Terre-Neuve, c’est le symbole d’une ressource alimentaire qui s’effondre pour cause de surexploitation et de mauvaise gestion par les hommes. Le Dr Rowe marque une morue qui va être relâchée dans le couloir de Bonavista Laura Wheeland c/o Dr George RosePendant des décennies, les pêcheurs ont prélevé tous les ans de 200 000 à 400 000 tonnes de Gadus morhua dans un stock estimé à plusieurs millions de tonnes, constituant l’un des plus grands garde-manger de l’humanité. Dans Pêcheur d’Islande, Pierre Loti décrit ainsi les flots des abords du Canada prenant la couleur grise du dos des poissons, où les terre-neuvas bretons du début du 20ème siècle puisent sans compter.A partir des années 1960, le nombre et la puissance des bateaux augmentent, provoquant une importante surpêche de plus de 500 000 tonnes par an dont l’épilogue intervient en 1991 avec un véritable effondrement de l’espèce. Il ne reste alors que quelques milliers de tonnes de poissons ce qui impose un moratoire drastique. La pêche française est interdite en 1992 et le moratoire total est imposé en 1995, provoquant une crise économique sans pareille sur les côtes du Canada et de Nouvelle-Angleterre. Depuis, on attend le retour de la morue. Jusqu’ici en vain. Malgré la fin de la pêche industrielle, les stocks ne sont pas remontés. Des hypothèses diverses ont été avancées : l’occupation de la niche écologique par d’autres espèces et notamment des crustacés, la prédation des phoques, le braconnage des pêcheurs locaux… Ces dernières années, la morue de Terre-Neuve a été considérée comme un possible exemple d’une pêcherie incapable de se reconstituer.C’est cette histoire que rappelle le Dr George Rose, du Centre de Recherche sur les écosystèmes des pêches, dans une étude publiée mardi par le Journal canadien des sciences halieutiques et aquatiques. Le scientifique y expose les résultats des chalutages et des relevés acoustiques effectués ces dix dernières années sur les trois voies de migration de l’animal à travers le banc de Terre-Neuve. La morue est en effet un poisson migrateur vivant au large, à plusieurs centaines de mètres de profondeur, mais qui se regroupe près des côtes de janvier à juin pour la reproduction. C’est à cette période qu’il est possible d’évaluer la biomasse totale de poissons. La pêche de la morue à Terre-Neuve en 1858. Auteur inconnu / domaine publicDe 1995 à 2006, les trois voies migratoires ont été très peu fréquentées. Les chercheurs n’ont plus constaté qu’un seul regroupement de reproduction, dans un petit fjord de la côte ouest de l’île de Terre-Neuve, estimé à 26 000 tonnes de morues en mauvais état sanitaire. En 2007, cette zone de reproduction commence, elle aussi, à être abandonnée, mais en faveur de la voie migratoire la plus au sud, dite couloir Bonavista. C’est l’étude par filets acoustiques de cette zone maritime qui a révélé une population plus nombreuse et saine qu’estimée auparavant.Depuis 2010, les chalutages scientifiques sur cette région ont révélé une population grandissante, estimée en 2015 à au moins 200.000 tonnes de poissons (contre 450 000 tonnes avant 1990). L’examen des classes d’âge démontre une vigueur retrouvée de la reproduction. Que s’est-il passé ? Les chercheurs ont reconstitué l’évolution des températures de la zone Nord Atlantique. Ils ont constaté une baisse importante de la température de l’eau au début des années 1990 et une remontée à partir de la moitié des années 2000. Ces eaux plus chaudes ont permis le retour du capelan (Mallotus villosus), le poisson dont se nourrit la morue. Avec le retour de sa nourriture préférée, celle-ci se reproduit beaucoup mieux et sa descendance augmente d’autant plus rapidement qu’il n’y a pas de pêche.La morue est-elle pour autant tirée d’affaire ? Les chercheurs incitent à la prudence : - Avec le retour du capelan, c’est la première étape qui est remplie. - Il faudra ensuite que les trois voies migratoires soient de nouveau utilisées avec des regroupements d’au moins 100 000 tonnes de reproducteurs. - Enfin, il faudra constater de forts taux de reproduction sur ces trois zones. Si la pêche reste interdite, le stock pourrait revenir à un niveau “durable” à la fin de cette décennie. Morue au Atlanterhavsparken, Ålesund, Norvège (2006). Hans-Petter Fjeld ccby-sa2.5"Le message le plus important, c’est que la restauration peut se faire grâce à la limitation des prélèvements de pêche basée sur les constats scientifiques, la bonne gestion et le respect de l’écosystème marin, affirme le Dr Rose. Si cette pêcherie peut se relever, alors il existe le même potentiel pour tous les autres stocks surpêchés dans le monde". Actuellement, un tiers des stocks mondiaux sont surexploités et la moitié est au maximum de sa productivité.Ailleurs dans le monde (notamment en Europe) : Des cabillauds (autre nom sous lequel la morue est également appelée) sont capturés de plus en plus jeunes, de plus en plus petits...Normalement, le cabillaud peut vivre plus de 25 ans (voire 40) et peser jusqu’à 70 kg et plus.... Or, actuellement les cabillauds de 1 à 3 ans* représentent 95 % des captures selon Didier Gascuel de l’Agrocampus de Rennes. « on a vu disparaître tous les poissons d’une taille supérieure » explique-t-il.- Vers 1900, le cabillaud pêché pesait en moyenne 12 kg pour 1 mètre.- Vers 1950, le cabillaud pêché pesait en moyenne 6,5 kg pour 80 cm- En 2011, le cabillaud pêché pèse 1,6 kg pour 50 cm !Les quantités de cabillaud pêchées ont baissé de 70 % en 30 ans. Selon 60 Millions de consommateurs, "L’état des stocks est critique dans le sud de la zone de pêche traditionnelle européenne (Mer du Nord, Écosse, Irlande, Bretagne). Il est correct plus au nord". Consoglobe préconise d'éviter ce poisson dans son alimentation... car si rien ne change l'espèce aura disparu à l'horizon 2020 ! - Faute de précision sur les étiquettes, il faut éviter le cabillaud vendu frais dans les poissonneries, qui a de fortes probabilités de venir de mers du sud.- Il faut vraiment éviter le cabillaud de l’Atlantique à moins d’être certain qu’il provient des mers arctiques du Nord-est, de la pêche à la ligne d’Islande.- Il faut se contenter d’acheter de temps en temps, du cabillaud surgelé du nord, pêché au large de la Norvège ou du Groenland. A savoir : Il existe des élevages de morue/cabillaud (aquaculture)- La reproduction du cabillaud est réalisée en écloserie, avec des géniteurs capturés en mer. Des chercheurs norvégiens se sont penchés dès les années 1980 sur l’élevage de cabillaud. Parallèlement, les éleveurs norvégiens de saumon ont commencé à engraisser des cabillauds sauvages capturés en mer, affinant ainsi les techniques de nourrissage. Mais c’est en 2000, avec la première production de cabillaud juvéniles en écloserie, que l’aquaculture du cabillaud a réellement démarré, notamment en Norvège.- L’engraissement des cabillauds se fait dans des cages flottantes, comme pour le saumon, ou dans des bassins à terre équipés d’un système de recirculation. Les cabillauds sont nourris avec des granulés composés de farine et d’huile de poisson et d’extraits végétaux. Ils sont prêts à être consommés lorsqu’ils atteignent 3 à 4 kg, après deux années d’engraissement. (Source Consoglobe)Choisir le cabillaud chez le poissonnier : Il vaut mieux choisir du dos de cabillaud car il est coupé dans des cabillauds de plus de 2 kilos. Donc évitez les filets de cabillaud de 100/200 gr qui sont taillés dans des cabillauds appelés « moruette » qui ne se sont pas reproduits. Consoglobe* Or la morue de l'Atlantique femelle atteint la maturité sexuelle à environ six ans (entre 5 et 8 ans selon la taille), les mâles atteignent généralement la maturité un peu plus tôt et ont une taille plus petite que les femelles. En conséquence les morues ou cabillauds pêchés n'ont pas le temps de se reproduire et donc permettre la reconstitution de l'espèce (ce que généralement on appelle reconstitution des stocks)...A noter : Les femelles d'environ 80 cm de longueur pondent quelque deux millions d'œufs, tandis que celles d'environ 130 cm en produisent plus de 11 millions. Les œufs sont ronds et ont un diamètre de 1 à 2 mm. Ils peuvent flotter dans des eaux dont le degré de salinité est d'environ 30 % (eaux côtières de surface). Ils remontent donc à la surface ou à proximité au moment de l'éclosion. Les œufs fertilisés qui flottent ainsi à la surface et les larves qui en résultent sont à la merci des courants et courent d'énormes risques face à leurs prédateurs. Le taux de mortalité est stupéfiant. Des millions d'œufs pondus par chaque femelle, seulement un par million en moyenne réussit à terminer le cycle et à devenir un poisson mature. WikipediaA lire : le guide d'achat des poissons pour une consommation éclairée et responsable.Sciences et avenir 31/10/2015 Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites