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La cage et la maison

Ce fait vécu m’a toujours émue et m’émeut à chaque fois que je le relis. Pour tous ceux et celles qui n’ont jamais lu ce fait émouvant, j’aimerais le partager avec vous ; le !

Tiré du Journal de Montréal, le 16 mai 1998. Texte intégral. Page 6- Collaboration spéciale de Pierre Bourgault

J’ai perdu mon Isabelle. Elle est morte lundi dernier, pendant La fin du monde est à sept heures.
Il y a la grande fin du monde, qui n’arrive jamais, et il y a toutes ces petites fins du monde qui nous bouleversent et nous laissent sans voix.

Isabelle était un perroquet, un gris d’Afrique. De tous les perroquets, c’est celui qui parle le plus. On dit qu’il peut accéder à un vocabulaire de près de mille mots, soit plus qu’un Québécois moyen.
Isabelle parlait beaucoup. Elle disait : « Qu’est-ce que tu racontes, ma beauté d’amour? »

Ou encore : « Je veux un beau champignon. » Elle parlait au téléphone et raccrochait à la fin de la conversation. Elle toussait comme moi et elle criait « quel con ! » quand elle pensait à Franco.

Lorsque Beau Bonhomme ( mon chien ) se dirigeait vers la porte arrière, elle disait : « Tu veux aller dehors ? » Parfois, elle se retrouvait quelque part dans l’appartement et, pour m’avertir de sa position, elle murmurait : « Viens mon petit bébé. »

« Quelle salope ! »
C’est la première fois qu’elle avait fugué ... Ne la retrouvant pas, je partis à sa recherche en l’appelant ainsi. Elle chantait Au clair de la lune aussi mal que moi. À ma grande honte, elle disait aussi
« Quelle salope ! » et, consciente que cela m’indisposait, elle s’amusait à le répéter sans cesse.

Tout un moineau que ce perroquet…
Elle hurlait comme toutes les sirènes qu’elle entendait et, quand elle lançait ses grands cris de la jungle, elle mettait toute la maisonnée en émoi.

Isabelle était belle, tout habillée de gris et de rouge. Elle avait une présence redoutable et exigeait toutes les attentions. Elle m’a vite appris que les oiseaux sont sans doute plus intelligents qu’ont le croit.

Isabelle est morte lundi. Jamais je n’aurais cru que j’allais, une fois dans ma vie, pleurer la mort d’un oiseau. Elle est morte très vite, en moins de trente secondes. Quelques petits spasmes, un cri étouffé et c’était fini. Je l’ai caressée, je l’ai un peu bousculée pour tenter de la ramener à la vie. Mais
c’était fini. Je ne m’en suis toujours pas tout à fait remis.

Amour-haine

Nous avions une relation amour-haine qui nous rendait indispensables l’un à l’autre.
Quand elle est entrée chez moi, elle était d’une douceur et d’une drôlerie merveilleuses. Je pouvais la caresser à qui mieux mieux et elle se couchait sur le dos dans ma main. Elle montait sur mes doigts sans réticence et me mordait un peu, juste pour le plaisir.

Puis, un jour, la vie a changé. Par ma faute. Parce que je ne connaissais pas mon oiseau.
Un soir qu’elle était sur sa cage, je voulus la faire entrer à l’intérieur la nuit venue. Comme elle refusait, je l’y ai entrée de force. Ce ne fut plus jamais comme avant. Dès lors, nos rapports furent plus difficiles et, jusqu'à sa mort, elle s’est souvenue de cet incident fâcheux. J’avais appris trop tard que, la nuit venue, elle entrait tout simplement dans sa cage, pour y dormir, comme on entre à la maison.




La leçon….

Mais elle m’avait donné une leçon que je n’oublierai jamais. C’est tout simple : il suffit de laisser la porte ouverte pour que la cage devienne maison.

Sa maison est vide aujourd’hui. La mienne aussi. Mais la porte est ouverte.

Texte repris par :

Huguette Lalonde

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