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Comment joindre l'inutile au désagréable

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Comment joindre l’inutile au désagréable

André Méry, Président Alliance Végétarienne

Juin 2006



Une grande partie des céréales cultivées dans le monde ne sont destinées qu’à nourrir le cheptel des animaux d’élevage. Avec une perte conséquente en termes de calories et de protéines (par exemple, 11 calories végétales pour produire 1 calorie de bœuf [1] et 10 kg de protéines végétales pour produire 1 kg de protéines de bœuf [2])

Selon les dernières données de la FAO, compilées pour la période 2002/2003, 1950 millions de tonnes de céréales ont été produites au niveau mondial… dont plus du tiers (36,4 %) ont servi a nourrir les animaux d’élevage ! Cette proportion se monte à 58 % de la production des pays développés, dont les animaux sont évidemment bien plus engraissés artificiellement que ceux des pays en développement (chez ces derniers, la proportion de céréales données aux animaux n’est « que » de 23 % de la production) [3].

Il faut à peu près 30 kg de protéines par an pour un individu adulte moyen (faites le calcul : à raison de 1,25 g de protéines par kg et par jour, pour une personne de 66 kg, on aboutit à 30 kg par an).

Dans son rapport 2003 sur l’état de l’insécurité alimentaire dans le monde [4], la FAO estimait cette année-là que 800 millions de personnes souffraient à divers titres de la faim dans les pays en développement (cela n’a guère changé depuis).

Examinons ce qui se passerait si les pays développés acceptaient de réduire de moitié leur consommation de produits d’origine animale. Globalement, la moitié des céréales données aux animaux serait économisée. Les pays développés ont produit 765 millions de tonnes de céréales pour la période 2002/2003 dont 443 ont été données aux animaux (58 %). L’économie serait donc de 221,5 millions de tonnes.

La part de protéines dans les céréales est variable mais on peut l’estimer globalement à 10-11 %. Les céréales économisées fourniraient donc entre 22,2 et 24,4 millions de tonnes de protéines, permettant de nourrir… entre 738 et 812 millions de personnes ! Si l’on voulait exprimer ceci d’une manière un peu percutante, on dirait que le monde développé tient la résolution de la question mondiale de la faim au bout de sa fourchette.

Soit l’égoïsme prédomine et 800 millions de personnes ne peuvent se nourrir à leur faim parce que le monde de type occidental veut continuer à manger de l’animal tous les jours, soit l’altruisme prend le dessus et cette question de la faim peut théoriquement appartenir au passé.

Quand on transpose ces calculs au cas de la France, sachant qu’en 2003 on a donné quasiment 20 millions de tonnes de céréales aux animaux [5], on voit qu’une réduction de moitié de la consommation des produits animaux permettrait d’économiser assez de protéines pour nourrir 35 millions de personnes, soit plus de la moitié de la population française.

Une réduction quasi-complète de la consommation de produits animaux libérerait donc assez de protéines pour nourrir au moins l’équivalent de la population française. Rapidement exprimé, cela signifie qu’à l’heure actuelle, chaque français est responsable de l’alimentation d’une personne du Tiers-Monde. C’est un peu difficile à supporter, sans doute, ce qui explique qu’il ne soit jamais question de remettre en cause sa propre alimentation lorsqu’on fait l’effort de s’intéresser au Tiers-Monde.

Il est inutile de consommer des animaux pour se maintenir en bonne santé ; il est donc inutile de les entretenir et de les nourrir. Et il est fortement désagréable de constater à quel point l’inutile peut recueillir l’assentiment de la majorité. En cette question – comme en bien d’autres d’ailleurs – l’espèce humaine apparaît particulièrement performante (et supérieure aux autres animaux, pour une fois…) dans sa façon de joindre l’inutile au désagréable.



Sources :

[1] World Food Summit (13-17 November 1996, Rome), Section 3 “Some future scenarios”, Point 3.80 [http://www.fao.org/documents/show_cdr.asp?url_file=/docrep/003/w2612e/w2612e04b.htm]
[2] The rabbit husbandry, health and production (FAO, 1986), Chapter1 “World production and trade” [http://www.fao.org/documents/show_cdr.asp?url_file=/docrep/x5082e/X5082E00.htm]
[3] Food Outlook, No 1, April 2004 [http://www.fao.org/giews/english/fo/index.htm]
[4] The State of Food Insecurity in the World, 2003 [http://www.fao.org/documents/show_cdr.asp?url_file=/docrep/006/j0083e/j0083e00.htm]
[5] FAO Statistical Databases (Commodity Balances / Crops Primary Equivalent) [faostat.fao.org/faostat/collections?subset=agriculture]

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André Méry a réussi à faire tout le tour de la question sur une seule petite page, simple et facile à comprendre ! Et quelle belle conclusion il fait ! thumleft

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