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Rebecca Aldworth et David Lavigne devant le comité de MPO

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( Plusieurs des gens présents étaient arrogants) Mad

Comité permanent des pêches et des océans 2006
TÉMOIGNAGES

Le président (M. Gerald Keddy (South Shore—St. Margaret's, PCC)):
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous reprenons notre étude de la chasse aux phoques.

Nous accueillons aujourd'hui M. David Lavigne, du Fonds international pour la protection des animaux, et Mme Rebecca Aldworth, de la Humane Society of the United States.

Je demanderais à M. Lavigne de commencer. Tous les députés ne sont pas encore arrivés, mais je pense que nous devrions débuter. Nous aurons ainsi plus de temps pour poser nos questions.


Dr David Lavigne (conseiller scientifique, Fonds international pour la protection des animaux):
Merci, monsieur le président.


Mesdames et messieurs les membres du comité permanent, merci de votre invitation à comparaître devant vous aujourd'hui.


Je m'appelle David Lavigne et suis conseiller scientifique auprès du Fonds international pour la protection des animaux. Je fais des recherches sur les phoques du Groenland et autres pinnipèdes depuis 1969.


Le Fonds international pour la protection des animaux est un organisme dédié au bien-être des animaux dont la mission est d'améliorer le bien-être des animaux sauvages et domestiques du monde en en réduisant l'exploitation commerciale, en protégeant les habitats de la faune et en prêtant assistance aux animaux en détresse.


Laissez-moi commencer par une vérité de la palisse. La controverse entourant la chasse aux phoques commerciale au Canada, comme tous les débats du monde moderne sur la conservation, ne porte ni sur la science ni sur les faits. Il s'agit au contraire d'un conflit lié à des attitudes, des valeurs, des objectifs sociétaux divergents ainsi qu'à des conceptions différentes du bien et du mal. Autrement dit, le débat sur la chasse aux phoques au Canada est un débat politique teinté de connotations éthiques.


Dans le cadre de ce débat politique, les faits scientifiques sont souvent représentés ou cités à tort, voire fabriqués par certains des intervenants. Aujourd'hui, je voudrais prendre quelques minutes de votre temps pour débattre des certitudes et des incertitudes entourant certains des enjeux de la chasse aux phoques qui se pratique au Canada. Je vous communiquerai également divers éclairages, issus de la biologie de la conservation moderne, qui peuvent faire entrevoir une piste de solution.


La chasse aux phoques au Canada est la plus grande chasse commerciale de mammifères marins du monde. Ce seul fait suffit à soulever une question de conservation d'envergure en dépit de tout ce que vous avez pu lire ou entendre. La conservation moderne, c'est la gestion des répercussions des activités humaines sur les animaux, les populations animales et les écosystèmes, et ce dont il est question ici, c'est des valeurs.


Selon des estimations récentes, la population de phoques du Groenland de l'Atlantique Nord-Ouest était d'environ 5,8 millions de têtes en 2005. Il s'agit d'une estimation dont les limites de confiance sont de plus ou moins 2 millions d'animaux, ce qui signifie que cette population pourrait fluctuer dans une fourchette allant de 3,8 à 7,8 millions d'animaux. Une telle incertitude scientifique doit être prise en considération lorsqu'on élabore des plans de gestion pour n'importe laquelle des espèces exploitées.


Les scientifiques du gouvernement canadien nous disent également qu'aujourd'hui, il faut capturer environ 250 000 phoques pour atteindre un rendement équilibré. Mais bien entendu, cette estimation elle-même est douteuse car si la population actuelle était inférieure à 5,8 millions d'animaux, il s'ensuivrait que le rendement équilibré serait lui aussi proportionnellement plus bas.


Vous n'êtes pas sans savoir que le total autorisé des captures, ou TAC, pour les phoques du Groenland, qui est de 335 000 en 2006, excède le niveau de rendement équilibré prévu. Le TAC actuel devrait par conséquent entraîner un déclin des populations. Dans ce sens, ce TAC ne permet pas à l'espèce de survivre.


Pour la quatrième fois au cours des cinq dernières années, les prises enregistrées au Canada en 2006, soit 353 000 phoques du Groenland, excèdent le TAC, cette fois de presque 20 000 animaux. De tels dépassements ne devraient pas être tolérés dans une chasse dite bien gérée.


À moins que le TAC ne soit réduit et imposé, le modèle gouvernemental prédit que la population des phoques du Groenland continuera à décroître. Plus de 95 p. 100 des animaux abattus dans le cadre de la chasse aux phoques commerciale du Canada sont des blanchons à peine sevrés âgés de deux semaines à trois mois, des animaux que la majorité des Canadiens considèrent comme des « bébés phoques ».


Les sondages d'opinion ne cessent de nous dire que la majorité des Canadiens sont opposés à l'abattage des blanchons.


Alors que l'exploitation optimale reste un des objectifs du ministère canadien des Pêches et des Océans, cet objectif est loin d'être atteint. La plupart des carcasses sont abandonnées sur la glace et un récent rapport de l'Université Memorial de Terre-Neuve soutient que les chasseurs rejettent 80 p. 100 du petit lard. La situation est encore plus grave en Norvège, principal partenaire du Canada pour la chasse aux phoques, où le gouvernement subventionne l'abattage des phoques du Groenland et va même aujourd'hui jusqu'à offrir d'autres subventions pour brûler les fourrures.


En bref, la chasse aux phoques du Groenland, au Canada et ailleurs, s'accompagne d'un gaspillage éhonté qui viole une tradition séculaire de conservation et soulève, dans ce processus, d'importantes questions d'éthique.


Pour revenir à la question de l'éthique et de la graisse de phoque, je note qu'un des témoins invités devant votre comité a admis qu'il avait camouflé des cargaisons d'huile de phoque à destination des États-Unis. Une telle pratique de membres de l'industrie du phoque du Canada n'est pas seulement contraire à l'éthique mais également illégale en vertu de la loi américaine.


Pour passer à des enjeux de plus grande portée dans le domaine de la pêche, nous savons maintenant que les phoques du Groenland n'ont pas causé l'effondrement des stocks de morue au large de la côte Est du Canada. De plus, il n'est nullement prouvé par des méthodes scientifiques que les phoques du Groenland empêchent la reconstitution des stocks de morue ou de toute autre espèce de poisson. En fait, l'élimination génétique des phoques du Groenland pourrait même se faire au détriment du rétablissement de la morue. Il n'existe par conséquent aucune justification scientifique à la réforme des phoques du Groenland.


Comme les scientifiques du MPO, entre autres, l'ont fait remarquer, les propositions légitimes d'abattage de phoques pourraient être soumises à une évaluation indépendante telle que définie dans le Protocol for the scientific evaluation of proposals to cull marine mammals du Programme des Nations Unies pour l'environnement. Le Canada n'y est pas encore parvenu. Quoi qu'il en soit, il existe de nouvelles preuves établissant que les phoques du Groenland jouent un rôle important et positif dans l'écosystème de l'Atlantique Nord-Ouest. De tels écosystèmes marins sont extrêmement complexes et nous n'avons ni l'expertise ni la capacité de gérer des populations fauniques ou des écosystèmes entiers. Tout ce que nous pouvons tenter de faire, c'est de gérer l'activité humaine.


Un autre volet de la conservation moderne est le bien-être des animaux. Depuis 2000, deux groupes de vétérinaires se sont penchés sur la chasse aux phoques commerciale au Canada. Même si le ministère des Pêches et des Océans n'en souffle mot, ces deux rapports sont, qualitativement, remarquablement similaires. Les deux décrivent ce que la plupart des gens raisonnables considèrent comme des niveaux de souffrance inacceptables chez des animaux. Lorsqu'un troisième groupe de vétérinaires a été rassemblé par le Fonds mondial pour la nature en 2005, ce groupe a rédigé 11 recommandations qu'il faudrait mettre en oeuvre pour transformer la chasse aux phoques commerciale du Canada en une activité dépourvue de toute cruauté.


La seule conclusion viable à tirer de la preuve dont on dispose est que la chasse aux phoques commerciale du Canada ne répond pas aux normes modernes d'abattage sans cruauté établies par des organismes comme l'Association américaine de médecine vétérinaire. Considérés dans leur ensemble, les faits portant sur la chasse aux phoques au Canada soulèvent un certain nombre de questions éthiques importantes. A-t-on le droit, au XXIe siècle, de subventionner l'abattage d'un si grand contingent d'animaux, dont un grand nombre de façon cruelle, pour en tirer des produits qui ne sont pas essentiels tout en abandonnant, sans souci du gaspillage, la majorité des carcasses et en jetant la plus grande partie du petit lard?


En plus des questions factuelles, nous connaissons tout un éventail d'autres choses, mais leurs effets ne sont pas connus ou sont difficiles à prévoir avec précision. Donald Rumsfeld parlerait sans doute d'une « incertitude incontestable ». La plus grande et plus importante incertitude incontestable à laquelle on est aujourd'hui confronté est le réchauffement planétaire et ses effets sur les phoques du Groenland et les phoques à capuchon. Les meilleures études de ces effets portent sur l'incidence du réchauffement planétaire sur la formation des glaces dont dépendent ces phoques en février et mars pour s'accoupler et nourrir leurs petits au large de la côte Est du Canada.


Au cours de la plupart des 11 dernières années, cette région a connu des températures hivernales plus chaudes que la moyenne et une couverture glaciaire inférieure à la moyenne. Même s'il est relativement facile d'établir les effets du réchauffement planétaire sur les conditions de glaciation, il est beaucoup plus difficile de mesurer les répercussions précises de ces bouleversements sur les phoques.


Un manque de glace utilisable, combiné à des tempêtes violentes et des débâcles précoces, compromet la saison normale de reproduction des phoques. Si les femelles ne trouvent pas de glace sur laquelle donner naissance, le niveau des avortements augmente et si la glace se rompt avant la fin de l'allaitement, les nouveau-nés meurent. Par exemple, pour l'année 2002, les scientifiques du MPO estiment que 75 p. 100 de tous les blanchons nés dans le golfe du Saint-Laurent sont morts avant même l'ouverture de la chasse. De tels effets, n'importe quelle année, réduisent la taille des cohortes, ou classes d'âge, et ont des répercussions à long terme sur la taille et l'évolution des populations.

(1110)


Si les années chaudes qui réduisent la couverture de glace deviennent la norme, comme il semble que ce soit le cas, l'incertitude ira en croissant. La fonte des glaces bouleverse la saison de reproduction et compromet l'habitat de reproduction essentiel. Elle a également, sur le poisson et les invertébrés, des répercussions qui modifient l'accessibilité des proies pour les phoques et ont à leur tour une incidence sur la condition, la croissance, le taux de reproduction et de survie des phoques.


Les gestionnaires ne disposent que d'une poignée d'options pour faire face aux impondérables scientifiques et environnementaux croissants associés au réchauffement planétaire. Mais l'une des choses qu'ils peuvent faire pour compenser les effets du réchauffement planétaire sur les espèces exploitées comme les phoques du Groenland, tel que le recommande le Programme des changements climatiques du Fonds national pour la nature, c'est de limiter les sources de stress qui ne sont pas liées au climat, notamment la surpêche.


La stratégie utilisée par le Fonds mondial pour la nature pour construire la résilience aux changements climatiques est un bon exemple de mise en application d'une approche préventive en matière de conservation. Le Canada renvoie à l'approche préventive dans le préambule de sa Loi sur les océans. Et le gouvernement prétend que sa gestion de la chasse aux phoques est fondée sur ce principe de précaution. Elle ne l'est pas.


Dans les approches préventives modernes, les prises totales d'une population faunique donnée sont directement liées au degré d'incertitude scientifique et environnementale. Lorsque l'incertitude est élevée, le total autorisé des captures est réduit pour garantir que les populations fauniques seront maintenues à un niveau qui suffit à assurer la survie.


Aux antipodes de cette position, le plan de gestion de la chasse aux phoques du Canada ne contient aucun mécanisme qui lie le total autorisé des captures à l'incertitude scientifique et environnementale de l'heure. De plus, la stratégie de gestion du Canada n'a jamais été soumise aux essais rigoureux qui représentent une exigence obligatoire dans le cadre de l'élaboration de procédures de gestion modernes et prudentes.


Une récente étude scientifique s'est penchée spécifiquement sur l'approche mise de l'avant par le gouvernement du Canada pour déterminer l'état et l'évolution des populations de phoques du Groenland de l'Atlantique Nord-Ouest et pour fournir des avis sur le total autorisé des captures. Les chercheurs ont trouvé que, dans le cadre de sa stratégie de gestion, le Canada allait vraisemblablement maintenir un haut niveau de prises en dépit d'une population déclinante et qu'il risquait de décimer la population des phoques du Groenland dans une proportion pouvant atteindre de 50 à 70 p. 100 au cours des 15 prochaines années.


Cette étude recommandait que le Canada réduise son TAC en vigueur pour les phoques du Groenland à un niveau calculé selon une procédure prudente bien établie telle que la méthode du prélèvement biologique potentiel qu'il faut appliquer aux mammifères marins en vertu de la législation américaine. Une telle mesure réduirait de façon spectaculaire le TAC du Canada pour 2007. Elle réduirait aussi la probabilité que la population soit décimée par une chasse excessive, fournirait certaines mesures de la résilience des phoques aux prises avec les effets du réchauffement planétaire, réduirait le nombre d'animaux tués de façon cruelle et réduirait le volume de déchets associés à la chasse commerciale aux phoques au Canada.


Je vous remercie de votre attention.

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Le président:
Merci.


Madame Aldworth.



Mlle Rebecca Aldworth (directrice, Questions portant sur la faune canadienne, Humane Society of the United States):
Je m'appelle Rebbeca Aldworth et je suis la directrice chargée des questions portant sur la faune canadienne auprès de la Humane Society of the United States.


La Humane Society of the United States, ou HSUS, est la plus grande association de défense des animaux au monde. Nous avons près de 10 millions de membres et d'éléments constitutifs à l'échelle mondiale et, par le biais de la Humane Society International, nous assumons une présence au niveau international.


Notre association s'intéresse à tous les aspects de la protection des animaux, ce qui veut dire que nous nous attaquons à une toute une série de questions, de la condition des animaux de fermes commerciales et de laboratoires à la protection des mammifères marins, en passant par les usines à chiots, à la dénonciation de la cruauté envers les animaux et l'élimination du commerce des fourrures.


La campagne visant l'élimination de la chasse aux phoques commerciale au Canada est l'une de nos activités principales à l'heure actuelle. Cela fait des années que nous tentons d'y mettre fin, une fois pour toutes.


Je dois vous avouer que la décision de comparaître aujourd'hui n'a pas été facile. J'estime que le comité manque d'impartialité dans son traitement de la question de la chasse aux phoques commerciale. J'ai assisté à certaines des délibérations précédentes et lu les rapports du comité et je suis d'avis que les conclusions qui émaneront du comité au terme des audiences ont déjà été fixées. Mes collègues me disent que je suis trop cynique et c'est pour ça que j'ai accepté de venir vous entretenir sur la chasse aux phoques commerciale.


Cela fait huit ans que j'observe de très près la chasse aux phoques commerciale au Canada. Je l'ai observée dans la golfe du Saint-Laurent et dans le nord-est de Terre-Neuve, région qu'on appelle le « Front ». Par conséquent, j'estime que j'ai une certaine expérience des questions de cruauté et comme cela fait dix ans que j'étudie le phénomène, je comprends les aspects économiques de la chasse aux phoques commerciale ainsi que les tenants et aboutissants de cette pratique au Canada.


Permettez-moi de vous parler brièvement de certains mythes véhiculés par le comité. Je vais passer très rapidement parce que je n'ai pas beaucoup de temps et vous demanderai d'être patients.


Tout d'abord, les bébés phoques. C'est une question que M. Lavigne a abordée brièvement et je pense que ça vaut la peine d'y revenir. Les rapports sur les prises émanant du gouvernement canadien démontrent clairement que 97 p. 100 des phoques tués au cours des cinq dernières années sont des blanchons de moins de trois mois. D'ailleurs, la majorité d'entre eux avaient moins d'un mois quand ils ont été abattus.


Lorsque ces animaux sont tués — et là, je vous fais part de mon opinion personnelle —, beaucoup d'entre eux ne savent pas encore nager et ne sont pas encore sevrés. Ils sont sans défense et ne peuvent pas échapper aux chasseurs.


On utilise différents termes pour les qualifier, blanchons, phoques juvéniles, autres. Moi, je les appelle des bébés phoques, tout comme je dirais bébés éléphants ou bébés hippopotames, par exemple. Pour moi, comme pour toute personne les ayant vus sur la glace, ce sont des bébés phoques.


J'aimerais maintenant vous parler d'un mensonge éhonté répété par nos autorités gouvernementales à maintes reprises au cours des derniers mois et je dois vous dire que je suis outrée, à titre de Canadienne, que vous vous comportiez ainsi: le fait que les vidéos que nous diffusons en Europe et ailleurs à la télé et sur nos sites Internet datent de 20 ans. J'étais sur les lieux, dans la plupart des cas, lorsque ces vidéos ont été tournées au cours des dernières années. Il n'y a pas un seul groupe qui diffuse des vidéos désuètes. En effet, les prises ont été tournées au cours des dernières campagnes de chasse aux phoques au Canada.


Je vais vous montrer une vidéo aujourd'hui parce que je veux que vous voyiez comment se déroule la chasse aux phoques commerciale. Si je vous disais que nombreux sont ceux dans cette salle qui n'ont pas été témoins de la chasse aux phoques commerciale, je ne pense pas que vous me contrediriez. Moi, ça fait huit ans que j'en suis témoin.


J'ai été outrée d'entendre des membres du comité dire, devant une délégation européenne le mois dernier, que la chasse aux phoques était, plus que tout autre type de chasse, exempte de cruauté. À cause des lois canadiennes et de nos règlements anticonstitutionnels sur les mammifères marins, je n'ai pas pu intervenir quand j'ai vu qu'on poignarde des blanchons conscients avec des gaffes en les traînant sur la banquise. J'ai vu de mes yeux vus qu'on empilait les animaux morts et mourants. J'ai été témoin, impuissante, de la mort d'un blanchon de trois semaines, mort au bout de 90 minutes, asphyxié par son propre sang. Ce sont des choses qui se passent régulièrement dans le cadre de la chasse aux phoques commerciale. On voit les animaux blessés qui souffrent, des phoques qui ont été abattus, certains peuvent même rester dans cet état pendant huit minutes dans l'eau.


Ce sont des choses que j'ai constatées tous les ans. D'ailleurs, j'ai été témoin de certaines choses qu'aucun être humain devrait être obligé de voir, y compris les chasseurs eux-mêmes. J'ai vu moi-même dans quelles conditions travaillent les chasseurs sur les banquises, les chasseurs que vous prétendez défendre. Certains d'entre eux ont la cinquantaine, voire la soixantaine, et doivent traverser la banquise en courant et travailler aussi rapidement que possible dans un climat excessivement rigoureux. C'est un travail déshumanisant et extrêmement dangereux. D'ailleurs, les compagnies d'assurance n'imposent pas une franchise de 250 000 $ aux bateaux des chasseurs qui vont dans la banquise pour le plaisir.


Il suffit de lire les journaux. Chaque année, il y a des bateaux qui sont pris dans la glace. Des chasseurs qui doivent être héliportés. La chasse est dangereuse pour ceux qui y participent.

(1120)


J'aimerais maintenant vous parler de la relation entre les phoques et les poissons. Il y a un autre mythe qui est véhiculé par le comité: si on ne tue pas les phoques, tous les stocks de poisson vont continuer à décliner et ne pourront jamais se rétablir.


Je me permets de vous signaler que même les chasseurs de phoques des Îles-de-la-Madeleine qui ont témoigné dans cette même salle ont reconnu, lorsque je discutais avec eux dans le couloir, que les phoques étaient nullement responsables de l'effondrement des stocks de morue ou de poisson de fond. Si vous voulez vraiment savoir ce qui a causé cet effondrement, posez la question aux pêcheurs, qui vous le diront. La cause, c'est la mauvaise gestion du gouvernement fédéral.


Je pense que les gens dans cette salle, pour protéger leur carrière politique, font passer la mauvaise gestion des pêches sur le dos des phoques. Ainsi, dans votre rapport vous affirmerez que les phoques ont un impact négatif sur les stocks de poisson même si les recherches effectuées par le ministère des Pêches et des Océans font état du contraire.


Passons maintenant brièvement au traitement qui est réservé aux phoques pendant la chasse. Je vous demanderais de me permettre de vous montrer une vidéo. J'estime que c'est important étant donné qu'on vous a dit à maintes reprises que les images étaient soit désuètes soit trafiquées soit prises hors contexte. J'aimerais vous expliquer certaines choses qu'on constate tous les ans sur la banquise.


Est-ce que vous acceptez que je vous montre la vidéo, monsieur le président?



Le président:
Vous avez quatre minutes et vous pouvez en faire ce que vous voulez.



Mlle Rebecca Aldworth:
Ces images ont été tournées pendant la campagne de chasse aux phoques commerciale au Canada en 2005. Comme vous pouvez le constater, les phoquiers ne prennent pas le temps de s'assurer que les animaux sont bien morts avant de passer au suivant. C'est un comportement qui va à l'encontre des règlements sur les mammifères marins. Ainsi, on ne peut qualifier ce comportement d'abattage conforme aux règlements. Et pourtant nous sommes maintenant en 2006, près d'un an plus tard, et personne n'a été poursuivi en dépit du fait que cela fait près d'un an que le MPO est en possession de ces images. Comme vous pouvez le constater, les animaux sont tués à coup de gourdin en présence d'autres phoques. Souvent, ils sont blessés, souffrent et sont asphyxiés par leur propre sang, et on les laisse à leur triste sort.


Ce phoque-ci a langui pendant 90 minutes avant que le chasseur ne décide de l'achever en lui enfonçant dans le crâne la partie pointue de l'hakapik. Ceux qui parmi vous qui connaissent les méthodes utilisées, savent que ce n'est pas comme ça qu'on est censé se servir de cet instrument.


Ces animaux sont blessés et souffrent puisqu'ils sont toujours conscients et sont abandonnés sur la banquise. Le gouvernement canadien et les phoquiers vous diront que ces images reflètent le comportement de 2 à 3 p. 100 des phoquiers qui ne se conforment pas aux règles. Tout ce que je peux vous répondre, c'est que ça fait huit ans que je filme la chasse aux phoques. Et ces images sont le reflet de tous les bateaux que je filme, de tous les phoquiers que je suis sur la banquise, dans toutes les directions.


La chasse est complètement anarchique. C'est une activité qui est menée à 70 milles des côtes, et jusqu'à 150 milles, dans des conditions climatiques rigoureuses et sur une banquise instable. Les phoquiers se disputent les quotas. Ils abattent un maximum de phoques aussi rapidement que possible. Pensez-y. À Terre-Neuve, plus de 140 000 phoques sont tués normalement en moins de deux jours. Quand on pense à l'envergure de cette chasse et au traitement accordé aux phoques étant donné les conditions de travail...


Ces images qui dérangent, je vous les montre parce qu'elles ne sont pas diffusées par les médias canadiens. Par contre, elles sont diffusées ailleurs dans le monde, ce qui explique que beaucoup de nations aient agi en vue de ne plus importer de produits du phoque. Ces images ont été diffusées par des chaînes de télévision partout dans le monde. Mais ce ne sont pas nos images qui ont été reprises. En effet, les médias étrangers se sont déplacés pour filmer eux-mêmes la chasse aux phoques. Il y a plus de parlementaires européens qui ont été témoins de la chasse que de députés canadiens. C'est une honte pour le Canada.


Les images ne sont pas truquées et ce qu'on y voit se produit tous les ans dans le cadre de la chasse aux phoques commerciale. Les animaux sont victimes de tant de cruauté qu'aucun être humain normalement constitué, qu'aucun Canadien, ne pourrait accepter cette situation s'il pouvait en être témoin. Je vous le dis à titre de Terre-Neuvienne. Je suis convaincue que tous les Terre-Neuviens que je connais dénonceraient la chasse s'ils savaient ce qui se passe véritablement sur la banquise.


En guise de conclusion, je voudrais vous remercier de m'avoir invitée à comparaître aujourd'hui. Je vais vous donner des informations sur les aspects économiques de la chasse aux phoques commerciale. J'espère qu'on pourra en discuter pendant la période des questions.


On pourrait se passer de la chasse aux phoques. En effet, les recettes générées représentent moins de 1 p. 100 du PIB de Terre-Neuve et moins de 3 p. 100 de la pêche commerciale. Les phoquiers terre-neuviens ont gagné, en moyenne, moins de 1 500 $ en 2005. Il serait facile de mettre un terme doucement à la chasse aux phoques et de la remplacer par autre chose. Si on se décidait, et j'espère que vous vous déciderez, ça pourrait se faire rapidement.


Comme vous le savez, la chasse aux phoques nous coûte beaucoup trop cher. En effet, l'impact du boycott des produits de la mer canadiens commence à se faire ressentir sur les exportations de poissons canadiens à destination des États-Unis. Vingt mois se sont écoulés depuis la mise en place du boycott en 2005 et la valeur du crabe des neiges canadien exporté aux États-Unis a chuté de plus de 330 millions de dollars. Nous ne pensons pas que le boycott soit le seul responsable de cette situation, mais il est clair qu'il s'agit d'un facteur déterminant.


La HSUS serait ravie que l'embargo soit levé et voudrait collaborer avec le gouvernement canadien afin de trouver des solutions de rechange viables pour les gens des ports reculés de Terre-Neuve et du reste du pays qui chassent actuellement le phoque à des fins commerciales. Mais pour cela, il faudra que le gouvernement fédéral collabore avec nous pour mettre un terme à l'abattage des phoques au Canada à des fins commerciales.


Merci.

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Le président:
Merci, madame Aldworth.


Avant de passer à M. Byrne qui sera le premier à poser des questions, j'aimerais clarifier quelque chose. Vous avez dit que tous les phoques étaient tués de cette façon, et pourtant il y a de nombreux phoquiers qui nous ont dit que les phoques étaient assommés, qu'on vérifiait leur réflexe et qu'on les drainait de leur sang.


Il est clair que le cas que vous nous avez décrit ne respecte pas les règles définies par le MPO. Mais ça ne veut pas dire que tous les phoques sont tués de la sorte. Le cas que vous nous avez montré, de 350 000 animaux tués, est un exemple clair de violation des règles. Mais cela ne veut pas dire que tous les phoques sont ainsi tués. Je voulais que cela soit dit.


Monsieur Lavigne, vous avez dit que la réforme des phoques n'était fondée sur aucune preuve scientifique, mais personne ne procède à l'abattage sélectif des phoques. Il faut faire attention aux termes qu'on utilise. Dans le cas qui nous intéresse, il s'agit d'une chasse.



Dr David Lavigne:
Puis-je intervenir?


Cela dépend de ce que vous entendez par abattage sélectif des phoques. Dans certains ouvrages scientifiques, on qualifie d'abattage sélectif les plans de gestion dont l'objectif est de réduire la taille de la population. Or, le TAC excède le niveau de rendement équilibré. On ne peut qu'en conclure que cela a été fait à dessein pour réduire la population des phoques. C'est ainsi qu'on peut parler d'abattage sélectif, parce que l'objectif est de réduire la taille de la population.

(1130)



Le président:
Les termes, ou l'aspect sémantique, sont intéressants.


Nous allons maintenant passer aux questions. Allez-y, monsieur.



L'hon. Gerry Byrne (Humber—St. Barbe—Baie Verte, Lib.):
J'aimerais remercier M. Lavigne et Mme Aldworth de leur comparution. Ils nous ont fait part de perspectives intéressantes qui nous seront utiles.


Les membres du comité ne sont pas aussi cyniques que ça. Au contraire, nous sommes toujours prêts à accepter les faits. En réalité, on est ici pour les mettre en question.


Madame Aldworth, vous avez dit que dans le cadre de la pêche au phoque commerciale, les phoquiers terre-neuviens touchaient en moyenne 1 500 $, et que ce n'était pas une grosse somme. Croyez-vous vraiment que 1 500 $, c'est dérisoire pour un phoquier terre-neuvien?



Mlle Rebecca Aldworth:
Oui, c'est ce que je pense. En effet, quand on fait les calculs, on se rend compte que ça ne représente qu'un vingtième de leur revenu. Bien évidemment, il n'y a pas de petites économies et je ne tente pas de minimiser les problèmes de revenu dans les collectivités rurales terre-neuviennes. D'ailleurs, c'est dans une de ces communautés que j'ai grandi.


Cela dit, si le gouvernement fédéral prenait une décision en ce sens, il pourrait rapidement mettre un terme à cette industrie en mettant en place un programme de retrait de permis. D'ailleurs, je pense que les personnes y participant toucheraient plus d'argent de cette façon.


Sachez que j'en ai discuté avec les phoquiers, qui ne sont pas contre cette idée. En effet, ils n'aiment pas aller sur la banquise pour tuer les phoques. C'est un travail difficile, dangereux et pas très rigolo. On ne devrait pas accepter que cette situation perdure.


Ces cinq dernières années, les phoques ont représenté moins de 3 p. 100 de la valeur au débarquement. Ce n'est pas la chasse aux phoques qui va permettre d'éradiquer la pauvreté dans les zones reculées. Ça ne pourra jamais être la solution.



L'hon. Gerry Byrne:
Y aurait-il des organisations qui se seraient manifestées pour remplacer les revenus qui seraient ainsi perdus? Il est clair que différents groupes de défense des animaux ont mené des campagnes de financement importantes pour véhiculer leur propre version de la chasse aux phoques. Y a-t-il des organisations qui auraient investi dans des opérations mixtes aux Îles-de-la-Madeleine ou encore à Terre-Neuve-et-Labrador dans le but de créer des industries de remplacement? Y a-t-il eu un quelconque mouvement en ce sens? Si 1 500 $ ce n'est pas une somme importante, je suppose qu'il y en a qui sont prêts à s'en départir.


J'ai le nom d'un phoquier qui m'a dit que si vous lui donniez un chèque de 1 500 $ de votre poche, il arrêterait sans doute de chasser le phoque.



Mlle Rebecca Aldworth:
Je suis prête à vous faire le chèque dès aujourd'hui. À titre personnel, je suis prête à vous faire le chèque.



L'hon. Gerry Byrne:
Je suis prêt à l'accepter. Voulez-vous faire le chèque?



Mlle Rebecca Aldworth:
Oui, je vous ferai un chèque personnel dès aujourd'hui.



L'hon. Gerry Byrne:
Votre organisation serait-elle prête à aller plus loin?



Mlle Rebecca Aldworth:
Vous avez soulevé plusieurs points, auxquels j'aimerais réagir, un à la fois.


D'abord, vous avez demandé s'il y avait des organisations qui avaient fait des investissements en vue de trouver des économies de remplacement aux Îles-de-la-Madeleine, par exemple. Je vais demander à M. Lavigne de vous faire part de la perspective de la Humane Society of the United States, mais je peux d'emblée vous dire que la réponse est oui. Certaines de ces démarches ont été fructueuses; d'autres, pas.


Certaines organisations se sont dites prêtes à participer à un programme de retrait des permis; par contre, il est impossible d'agir avant que le gouvernement fédéral n'ait décidé d'arrêter une fois pour toutes la pêche au phoque commerciale. En effet, pour que le programme de retrait des permis permette d'arrêter définitivement la chasse aux phoques commerciale, il faut que le gouvernement plafonne les permis et arrête d'en émettre. Autrement, la génération de phoquiers visée par ces mesures risque de se faire remplacer par une nouvelle génération.


Nous demandons que le gouvernement fédéral mette en place un programme de retrait de permis et collabore avec nous à sa mise en oeuvre afin de mettre un terme à la chasse aux phoques commerciale. Comme vous le savez, il y a des gens fortunés partout dans le monde qui en parlent et qui songent à avancer les fonds nécessaires pour y parvenir.


Cela dit, j'estime...



L'hon. Gerry Byrne:
Mais pourtant, ils ne le font jamais, Rebecca. Ce qui est intéressant ici, c'est que jamais, au grand jamais, ils ne le font.



Mlle Rebecca Aldworth:
Mais ils ne pourraient le faire qu'avec votre coopération.



L'hon. Gerry Byrne:
Et pourquoi donc?



Mlle Rebecca Aldworth:
Parce qu'à moins que vous ne leur disiez non, nous n'allons pas accorder davantage de permis, nous nous contentons essentiellement d'acheter des permis existants. Vous pourriez très bien faire volte-face et délivrer 5 000 nouveaux permis demain.



L'hon. Gerry Byrne:
Ce modèle ne suit pas celui de la pêche au saumon du Groenland, pas plus que le moratoire qui existe là-bas. Cela ne correspond à aucun modèle existant.

(1135)



Mlle Rebecca Aldworth:
Il y en a un. C'est le modèle de la chasse à la baleine au Canada. Si vous revenez aux années 70 et au moratoire sur la chasse commerciale à la baleine...



L'hon. Gerry Byrne:
Pourrais-je vous poser une question à propos de l'enregistrement vidéo que vous nous avez fait voir ce matin? Il est évident que vous pouvez compter sur des vidéographes de très haut niveau. Ce que j'ai trouvé intéressant dans cet enregistrement, c'est que d'abord on voit la chasse proprement dite, après quoi il y a une interruption et tout d'un coup il y a les scènes en plan rapproché qui montrent des phoques. Pourquoi n'avoir pas suivi le phoquier en continuant à montrer l'animal en question?


Il me semble qu'il y a pas mal de scepticisme à Terre-Neuve-et-Labrador et aux Îles-de-la-Madeleine du fait que bien souvent, les gens là-bas ont été dupés par de prétendus vidéographes qui n'étaient pas là pour les raisons qu'ils invoquaient. D'ailleurs, certaines atrocités ont même été commises par ceux qui étaient là pour filmer et qui voulaient obtenir un certain effet.



Mlle Rebecca Aldworth:
Le seul organisme qui, à ma connaissance, n'ait jamais été...



L'hon. Gerry Byrne:
Cela me semble un peu étrange, madame Aldworth, que vous ne les ayez pas suivis de manière à pouvoir établir une preuve indiscutable.



Mlle Rebecca Aldworth:
Me permettrez-vous de répondre?


POURSUIVRE LA LECTURE: http://cmte.parl.gc.ca/cmte/CommitteePublication.aspx?SourceId=188524&Lang=2&PARLSES=391&JNT=0&COM=10480

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Citation :
( Plusieurs des gens présents étaient arrogants)


Je crois qu'ils l'étaient tous et que leur idée était faite d'avance ! Ils ont traité Rebecca et D. Lavigne comme des accusés ! Pitoyable ! Rolling Eyes

Rebecca et D. Lavigne se sont très très bien défendus

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