Animal 0 Posté(e) le 16 avril 2007 Canada/Chasse au phoques: 2 avril 2007 - Le paradis perdu Une page du journal de Rebecca Aldworth Golfe du Saint-Laurent, 2 avril – Un journaliste m’a demandé un jour de décrire la chasse aux phoques en deux mots. Ce n’est pas facile, mais plusieurs idées me sont venues à l’esprit. « Chaos total » aurait convenu, tout comme « carnage absolu » ou « dévastation complète ». Mais j’ai choisi de lui répondre « paradis perdu ». Pour moi, ces deux mots décrivent parfaitement bien la brutale vérité du massacre commercial des bébés phoques sans défense du Canada. Il y a une semaine, je me trouvais sur les plaques de glace du Golfe du Saint-Laurent avec ces bébés. Âgés de seulement quelques jours, ils se chauffaient au soleil et dormaient. Certains parmi les plus courageux se laissaient glisser dans l’eau et essayaient de nager. Leurs corps tout ronds, encore gras du lait de leur mère, les empêchaient de plonger ou de faire autre chose que d’éclabousser et de regrimper sur la glace. Mais ils essayaient, et c’était fascinant de voir ces animaux attirés par l’eau, obéissant ce rituel instinctif d’apprendre à nager. Il est difficile d’expliquer à quiconque n’y est jamais allé la magnificence du lieu. D’une part, un paysage glacé, un environnement incroyablement beau, composé de douces teintes de bleu, de mauve et de rose. De l’autre, l’océan qui s’étend, totalement plat, et miroite au soleil. Mais ce sont surtout les phoques à selle d’une beauté et d’une gentillesse saisissantes. Si vous ne bougez pas, les bébés phoques vous acceptent parmi eux en quelques minutes. Vous vous allongez sur la glace avec eux et ils se rendorment calmement. Bientôt, d’autres petits s’approchent, et vous finissez par faire partie du paysage. C’est l’un des rares endroits de la planète où vous pouvez être entièrement seul avec les animaux, dans une paix absolue. Les seuls sons proviennent des trilles que font les bébés phoques, et de l’océan qui vient clapoter contre les plaques de glace. S’il fait soleil, vous avez l'impression d’avoir trouvé le plus bel endroit de la terre. Pour moi, c’est le paradis. L’extase et l’agonie Aussi incroyable que cela puisse paraître, j’ai vu une scène de ce genre au beau milieu du massacre samedi soir. C'était le dernier jour de la chasse aux phoques dans le Golfe du Saint-Laurent. Nous avions passé la journée à filmer l'horrible cruauté et à repousser les violentes attaques de chasseurs en colère. Nous étions épuisés, tant sur le plan physique qu’affectif. Le soleil commençait à peine à baisser, et nous savions que notre hélicoptère devait partir vite, car sinon il enfreindrait la réglementation du ministère des Pêches et des Océans. Nous risquions aussi de ne pas pouvoir rentrer en sécurité. Mais alors que nous survolions les bateaux de pêche, nous en avons vu un dont l’équipage était encore en train de matraquer des phoques. À proximité d’eux se trouvait un groupe de bébés, et nous savions que les chasseurs viendraient les chercher. Nous avons décidé de nous poser juste une fois de plus pour filmer ce qui allait se passer. Même après toute la misère et la souffrance que j’avais vues sur ces plaques de glace, je n’étais pas préparée à ce que j’ai trouvé. Au milieu du chaos, du carnage et des plaques de glace imprégnées de sang, ces bébés phoques, environ une trentaine, avaient créé un havre. Ils étaient étendus à profiter du soleil dans une sorte de vallée formée de gigantesques plaques de glace qui s’étaient fracassées. Il y avait des corniches plates et deux petits bassins d'eau libre. Le soleil couchant colorait la glace et l’éclairait en nuances superbes. Les bébés dormaient presque tous, certains museau contre museau. L’un d’eux était sur le dos et se dorait au soleil. Alors que nous nous glissions vers eux pour les filmer, ils n’ont pas montré de crainte. Certains des bébés apprenaient à nager dans les petits bassins. Ils plongeaient dans l’eau en éclaboussant, puis remontaient triomphalement. Le suivant, aussi courageux, plongeait à son tour. À quelques pas seulement de nous, deux bébés phoques nous regardaient silencieusement depuis la plaque de glace. L’un deux n’arrêtait pas de me regarder et je me suis aperçue que je le regardais aussi plus que les autres. Il était si beau, avec ses yeux foncés et sa fourrure argentée. Il s’est tourné vers son ami et lui a doucement touché le museau avec le sien. Je lui ai parlé doucement, et lui ai dit de s’en aller d’ici, de se cacher sous l’eau lorsque les chasseurs viendraient. En quelques minutes, je me suis sentie liée à ces bébés phoques. Je voyais que chacun avait une personnalité distincte, qu’il y en avait des drôles, des courageux, des tranquilles et des gentils. C’est l’une des expériences les plus émouvantes que j’ai jamais connue avec les bébés phoques, et je suis encore bouleversée par la beauté de cette scène. Mais en regardant au loin, je voyais les chasseurs qui attendaient. Il était évident qu'ils ne voulaient pas que nous les filmions en train de tuer ces phoques et je savais que notre présence pouvait offrir une protection temporaire à ces bébés. Le soleil est devenu notre ennemi. Notre pilote nous a avertis que nous devions repartir au plus tard à 18 heures. Il ne restait que 10 minutes, et le soleil descendait rapidement. Je regardais les chasseurs en me répétant : « Retournez sur votre bateau. Faites demi-tour et partez. Partez, c’est tout. Laissez ceux-la. Allez-vous-en. » Mais les minutes s’écoulaient et ils ne partaient pas. Ils sont restés et ont attendu parce qu’ils savaient que notre hélicoptère devait décoller dans quelques minutes, et qu’il leur restait encore un moment pour se faire un peu d’argent rapidement. Avec le cœur brisé, j’ai demandé pardon à ces bébés phoques, et nous sommes repartis, au supplice, vers l’hélicoptère. Les pales ont immédiatement commencé à tourner. Nous étions déjà bien en retard et notre pilote faisait l’impossible pour nous faire gagner un peu de temps. À mi-chemin de l’hélicoptère déjà en mouvement, je me suis retournée. J’ai vu les chasseurs s’approcher de mes nouveaux amis. Mais il était déjà trop tard pour que je les rattrape. Je pleurais tellement que je n'y voyais plus. Nous sommes montés dans l’hélicoptère qui a survolé les lieux, en sachant ce que nous allions voir. Les chasseurs avançaient dans ce paradis, en matraquant tous les bébés phoques. L’un d’eux se tenait avec désinvolture, une botte sur la tête de mon jeune ami. Le sang déversé sous sa tête, ses nageoires qui battaient. Par ce moment de stupidité, de cupidité et de dureté, le paradis était perdu. Et ceci est la vérité simple et crue de la chasse aux phoques. Le gouvernement canadien peut utiliser n’importe quel argument pour défendre la chasse. Moi-même et beaucoup d’autres l’avons vue par nous-mêmes. Nous connaissons la vérité. Nous rapportons nos images et nos observations, et nous les transmettons au monde. Nous luttons contre des opposants puissants, notamment le gouvernement du Canada, mais nous avons un avantage : la vérité est de notre côté. Et à la fin, c’est la vérité qui empêchera le massacre impitoyable des phoques. C’est pourquoi je demande à tout le monde de regarder ce que nous avons vu. Prenez quelques minutes pour regarder les images vidéo que nous avons envoyées et dites à vos amis de le faire aussi. Ensemble, nous sommes les témoins de ces atrocités et il nous appartient de les montrer au monde entier. Rebecca Aldworth est la directrice des questions relatives à la faune canadienne pour la HSUS. Auteur: Rebecca Aldworth HSUS Traduction: Lucie Savard, trad. a./Kind Translators/Traducteurs pour le traitement éthique des animaux Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites