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terrienne

quelques textes percutants de michel tarrier

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Attachez vos ceintures !

Je suis plutôt fier d’avoir été élevé dans les années 1950 : sans babyphone, sans ceinture, ni harnais, ni gilet de rien, sans airbag, sans casque intégral agréé, sans dorsale, protège-tibia et protège-coude, sans bouchons de sécurité, sans bloque-porte, fenêtre et tiroir, sans protège-coins et arêtes, sans anti-pince doigt, sans cache-prise, sans vidéo-surveillance, sans alarme aux portes et fenêtres, sans portable, sans GSM, sans Internet, mais avec de vrais amis, sans psychopédagogue, mais avec une vraie maman, sans conseils nutritionnistes, mangeant de tout sans devenir obèse, sans eaux minérales et buvant celle du robinet, mon berceau et mes jouets nappés de peinture au plomb, sans coupable désigné pour tout ce qui pouvait m’arriver dans la cours de récré, en classe, au réfectoire, au dortoir, sur le chemin de l’école ou des vacances, sans aucun code-barre ou autre code, sinon celui de bonne conduite, sur un chemin des écoliers non piégé, sans experts en prudence et pour une vie meilleure…

J’ai eu de la chance, quelle chance ! Je ne suis pas tombé de ma table à langer, je n’ai pas eu les roubignoles aplaties par mon pot de chambre, je ne me suis pas noyé dans mon bain, je ne suis pas mort d’asphyxie par obstruction ou confinement, je n’ai pas été étouffé ni dans mon couffin, ni par un de ces sacs plastique qui écrasent les prix et les enfants, aucune dragée ne s’est mise en travers de ma gorge, je n’ai pas été mordu par un chien policier (peut-être et seulement par le policier lui-même…), je n’ai pas avalé un hyménoptère, les araignées, les scorpions et les vipères n’avaient rien contre moi, je n’ai pas dégringolé les escaliers, je n’ai pas goûté à la soude caustique, je n’ai ni été électrocuté, ni défenestré, ni brûlé par une queue de casserole, ni calciné par un incendie domestique ou forestier, ni même intoxiqué au monoxyde de carbone, je n’ai pas fini empalé sur la grille du jardin, ni même éborgné par une fléchette.

En ces temps de grande imprudence, quand les marchands de peurs n’avaient pas encore harnaché les bébés d’une panoplie de Mad Max, le risque était partout ! On ne pensait pas à nous avec tant de prévention et de précautions, à dire qu’on ne nous aimait pas ou que l’inconscience parentale était grande. Déjà, on accouchait sans douleurs pour la mère, mais avec violence pour l’enfant. Je n’ai pourtant pas succombé à ces années « dégueulasses » !

Mais…, on ne me parlait pas, non plus, d’extinction des espèces et des espaces, de laminoir de biodiversité, de déliquescence des écosystèmes, de métastase écologique, de désertification galopante, de tarissement des ressources, de trou d’ozone, de réchauffement planétaire, de réfugiés de l’environnement, du cancer tapi dans chaque bol alimentaire et dans chaque bol d’air. Aujourd’hui, où le tourisme organisé est la seule alternative au cocooning, que de pointilleuse sécurité pour la fin annoncée de notre humanité ! Kamikazes, n’oubliez pas votre casque !

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L’arbre qui cache l’irrespect

Il y a ceux qui vénèrent l’arbre, et ceux qui pissent contre. Ces derniers sont les maîtres du Monde, de notre Monde. Réfléchissons ! Quand l’envie de pisser prend le mâle monothéiste, il cherche le plus souvent un arbre pour l’honorer de son urine, sans même songer un instant, ni à la nocivité de son geste, et encore moins à la symbolique dégradante qu’il représente à l’égard de la Nature dédaignée, dégradée, mise au rang de l’ordure, de déversoir. Pourtant, en matière de symboles, l’endoctriné en est pour le moins encombré. Uriner au pied d’une quelconque statue de plâtre d’un saint bidon ou d’une sainte inventée, sous le portrait d’un « président » ou sur une tombe (« J’irai cracher sur vos tombes »), ne lui viendrait à l’esprit que dans un geste insurrectionnel, ou surréaliste. Pourtant, il n’y aurait aucun mal objectif. Mais pour nous, les arboricides, le sacré ne touche jamais la Nature, d’où le traitement infligé et l’insouciance conférée. Enfin, exhiber un membre phallique semblerait moins « scandaleux » que d’utiliser une noble créature végétale pour cacher la partie « honteuse ». Le geste en dit long sur l’hypocrite héritage judéo-chrétien : biologie humaine dévoyée, dédain pour le Vivant. Cet état d’esprit fait que tout recoin gagné par la Nature est pour nous propice à dépotoirs, que nos eaux courantes ou dormantes font office de décharges. Nous sommes plus immondes que nos immondices.
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Et puisque la Terre est plate

La Terre est plate ! La Terre est plate ! La Terre est plate !

Ah, vous n’aviez pas remarqué ?

Elle n’a pas 4,55 milliards d’années, mais seulement 6000 ans.

C’est écrit !

La Terre est plate, docile, prolixe, inépuisable.

Les animaux sont des machines.

Les forêts sont pour l’ébéniste.

Les fleurs pour le fleuriste.

Les oiseaux sont en cage.

Les poules et les vaches pour nos élevages.

Les poissons sont des aliments très sains.

Les animaux sauvages pour nos ménageries et nos manteaux.

Le chien, la femme, le Noir sont fidèles.

Le chat indépendant.

Le cheval est notre plus belle conquête.

Les singes nous font bien rire.

Les serpents nous font bien peur.

Il faut protéger les espèces utiles, il faut détruire celles nuisibles.

Ne vous méprenez pas entre les bonnes et les mauvaises herbes.

La Nature est reposante, décorative, elle ne sert qu’aux vacances et aux balcons fleuris.

Les montagnes, c’est pour le ski.

Les déserts pour les rallyes.

La mer pour le balnéaire et la pêche au gros.

Le Nord, c’est pour travailler.

Le Sud, c’est pour bronzer.

L’homme civilisé est un roi, il lui suffit de commander pour se satisfaire. Tout est à nous, nous sommes propriétaires de tout.

La Terre est plate, elle est au centre de l’univers, le canyon du Colorado date de 6000 ans, nous avons eu la révélation : un Dieu a tout façonné, par n’importe lequel, le nôtre !

L’eau douce, les océans, le pétrole, le gaz sont intarissables, le sol est infatigable, nous avons mille astuces nommées progrès pour en tirer un parti éternel et exponentiel.

Et si nous nous trompons un jour, nous avons des recettes pour y remédier : l’écologisme, le développement durable, la confiture bio, le poulet fermier, les circuits courts, les biocarburants, le recyclage, l’écotourisme, le commerce équitable, des énergies alternatives…

La recherche rend possible des avenirs…

Il ne nous manque rien au magasin des accessoires.

Nous trierons nos ordures : les fruits et les légumes empoisonnés dans une petite poubelle, leurs emballages polluants dans une grande.

La Terre est plate ! La Terre est plate ! La Terre est plate !

Et le réchauffement planétaire n’existe pas !

Tout le reste est littérature, ou religion d’un nouveau type.


Belle tirade judéo-chrétienne, société dont la maladie incurable est un somnambulisme écologique implicite, sans controverse.


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Michel R. TARRIER

tarrier@ctv.es

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