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la lettre hebdo de gérard charollois (11/02)

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Polémique ou apologie

Il est acquis que lorsqu’un média dans lequel l’honnêteté intellectuelle n’est pas une préoccupation première parle d’écologie ou inversement de mort loisir et d’exploitation du vivant, il convient de ne pas faire de la polémique.

Au 18ème siècle, ces revues, fussent-elles « philosophiques », traitant de l’esclavage, auraient refusé à Antoine de CONDORCET et à la société des AMIS DES NOIRS, l’expression de leur réfutation : histoire de ne pas faire de polémique.

Aujourd’hui, il ne faut donner la parole, selon certains médias, qu’aux propagandistes de la chasse, de la torture tauromachique, des pesticides, des OGM, du bétonnage généralisé. A défaut, il y aurait, horreur, polémique et la polémique, c’est mal.

Alors, comme au pire temps de la propagande, les chantres des agressions contre les êtres sensibles et contre la Nature récitent leur verbiage convenu, à l’abri des polémiques, c’est-à-dire, à l’abri de la censure frappant d’ostracisme leurs opposants.

« La chasse gère la faune et participe de la culture locale. »

« La torture tauromachique symbolise le combat de l’homme contre le sauvage et la bravoure théâtralisée. »

« Sans les pesticides et les OGM, l’humanité mourrait de faim et le propre de l’homme est de se débarrasser des « bestioles » qui lui nuisent.

«Les écologistes ne sont que des catastrophistes, peureux de tous les temps face aux innovations, des frileux qui tremblent pour leur santé en oubliant que les humains sont morts dans un passé où n’existaient ni pesticides, ni chimie, ni OGM, ni pollution. »

Oui, et même plus fort : en ces temps, pas si lointains, ils mouraient plus jeunes.

Voilà des sophismes qui vous assureront la promotion d’un mauvais livre, des articles sans polémique dans des revues, des passages à la télévision.

Admettons que nous, écologistes, n’expliquons pas toujours clairement l’éthique nouvelle qui est la nôtre.

Certains, de bonne foi ou par tactique de « communication », ont pu jouer de la peur et de la frilosité égoïste pour alerter l’opinion publique.

Je n’ignore pas l’heuristique salutaire de la peur mais, globalement, ce sentiment malsain, tellement utilisé par les réactionnaires, n’est guère sympathique et n’engendre que trop rarement des attitudes constructives, généreuses, ouvertes.

Laissons la peur aux hommes d’Ordre qui tiennent ainsi en respect les foules asservies : peur du père fouettard qui est aux cieux, peur des étrangers, peur des délinquants, peur des changements.

Faisons plutôt œuvre explicative en s’adressant au cœur et à la raison.

Pourquoi, par exemple, n’acheter que des produits dits « bio » ?

Pour préserver sa santé ?

Par peur de tomber malade et de devoir mourir ?

Sans doute, car les pesticides ont le bon goût de fertiliser les cancers, particulièrement chez ceux qui les répandent, mais le technicien appointé a beau jeu de répliquer que la Nature n’a jamais conféré à un vivant, l’immortalité et que les hommes sans chimie se sont tous évanouis dans le morne horizon du temps qui passe, souvent à un âge bien plus jeune.

Or, il faut impérativement, dans une éthique écologiste, consommer « bio » pour préserver l’essentiel : la santé de la terre, pour sauver la biodiversité, pour qu’il y ait encore des « bestioles » qui ont noms papillons, oiseaux, micro-mammifères, amphibiens, reptiles.

Ce qui nous sépare des zélateurs de l’agrochimie, de l’artificialisation, de l’urbanisation outrancière n’est pas la peur, l’amour de soi, la crainte de la nouveauté, c’est l'amour du vivant et le refus proclamé, courageux, lucide, d’une planète vouée au seul productivisme.

Pour nous, la Nature vaut par elle-même et nous récusons un monde dont elle serait expulsée.

Pour nous, la poisseuse littérature des tastes-mort dissertant sur la chasse et la corrida n’a pas de sens puisque rien, ni art, ni sport, ni culte du profit, ni pseudo-culture, ni paillettes, ni costumes d’infamie, ne justifiera jamais la torture et la mort d’un être sensible.

Les propagandistes du mépris de la vie ne parviendront pas à étouffer la vérité éthique dont nous sommes porteurs.

Un jour, celle-ci s’imposera dans la lumière de la conscience de tous : la vie vaut par elle-même et il n’y a pas de civilisation sans son respect.

Messieurs les Littérateurs, abrités derrière l’absence de polémique, récitez au bon peuple que la corrida est un art, une culture locale hautement symbolique, que la chasse gère la faune et réjouit le rural profond, que les pesticides combattent la faim dans le monde et que rien ne vaut un golf, un lotissement, une autoroute, une zone industrielle et commerciale pour faire vivre un pays.

Demain, ces mensonges feront honte à ceux qui vous liront, si toutefois il reste encore quelqu'un pour vous lire !

Gérard Charollois
CONVENTION VIE ET NATURE POUR UNE ECOLOGIE RADICALE

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