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la lettre hebdo de gérard charollois (01/02)

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Par-delà le césarisme démocratique

En ce pays, de jour en jour, le chef de l’Etat conquiert des pouvoirs nouveaux. Il conduit l’exécutif, nomme des ministres qui n’ont aucune autre légitimité que celle de lui plaire, choisit, via le contrôle de son parti majoritaire, les investitures des candidats aux élections législatives faisant ainsi les députés du parti conservateur, dirige bien sûr l’administration.

Il va nommer et révoquer, (sans hypocrisie aucune), tels des préfets ou directeurs départementaux de la police, les directeurs des chaînes de télévisions et de radios publiques, alors qu’il bénéficie déjà du soutien amical du propriétaire de la chaîne privée de télévision.

Il se propose, en supprimant les juges d’instruction, de confier les enquêtes judiciaires à des magistrats recevant directement des directives du gouvernement, ce qui d’ailleurs représente pour lui une conquête infiniment moins essentielle que la maîtrise du « temps de cerveaux disponibles », clé absolue des résultats électoraux.

Au fond, tout ceci est logique ! rétorquera le récitant de service.

Le souverain suprême n’est-il pas le peuple ? Le chef de l’Etat en est l’élu par excellence. Il possède la légitimité pour exercer non pas le pouvoir exécutif mais tous les pouvoirs : législatifs, administratifs, judiciaires et de contrôle de l’information.

Telle l’onction divine du sacre de REIMS des rois d’antan, le suffrage universel sanctifie le pouvoir et le rend seul légitime. Rien d’autre ne l’est en dehors du sacre démocratique, rien ne peut s’opposer aux volontés du souverain qu’incarne un monarque électif infiniment plus puissant que ne le furent jamais ni les LOUIS XIV, ni les NAPOLEONS.

Les juristes spécialistes de droit constitutionnel appellent « césarisme démocratique » ces régimes personnels dans lesquels un homme providentiel guide le peuple qui le soutient, souvent avec une ardeur populaire massive.

Je n’aurai pas la cruauté d’énoncer les régimes qui au siècle passé illustrèrent le mieux cette union entre un peuple et un chef charismatique.

Bien souvent dans l’histoire contemporaine, démocratie d’une part, liberté, droits de l’homme, respect des personnes, d’autre part, ne furent pas synonymes.

Il advint qu’une majorité décide massivement la privation de droits élémentaires d’une minorité, voire son extermination.

Comme tout souverain, un peuple peut s’égarer, être abusé, sombrer dans la haine ou la sottise criminelles.

Non, une majorité n’eut pas toujours raison et fut occasionnellement bien coupable et paya lourdement ses égarements.

Faut-il remettre en cause la démocratie et la souveraineté non pas du peuple mais de ses ou de son représentant ?

Puisque tout pouvoir corrompt et comporte ses risques d’arbitraire, de népotisme, d’abus, il faut, non pas supprimer la démocratie, mais la cantonner à ce qui relève du souverain.

Que les représentants du peuple votent les lois et les impôts, qu’ils exercent le gouvernement, c’est-à-dire le pouvoir exécutif suffisent à fonder une démocratie, mais l’information, la justice ne relèvent pas de la même légitimité.

Une société de liberté appelle des contre-pouvoirs forts, garantis et légitimes tout simplement parce qu’ils sont des contre-pouvoirs indispensables.

Les journalistes qui présentent l’information n’ont pas de compte à rendre au parti très relativement majoritaire, mais uniquement à la vérité et au pluralisme.

Le juge qui dit le droit et protège la liberté ne le fait pas au nom d’un parti, fut-il majoritaire, mais au nom du droit fondamental, au besoin, contre les fantasmes et les haines du parti majoritaire d’un jour.

La légitimité du journaliste et du juge ne relève pas de l’élection car la liberté, le droit seraient en grand danger, comme ils le furent dans l’Allemagne démocratique de WEIMAR et d’HITLER, la Russie Soviétique et populaire de STALINE, la Chine des masses de MAO et peut-être aujourd’hui, dans la Russie unie de POUTINE.

Les partis politiques d’opposition, les associations, les syndicats, les corps constitués possèdent cette légitimité différente de celle du pouvoir majoritaire d’un jour : ils assurent le contre-pouvoir sans lequel la société bascule inéluctablement dans l’abus de pouvoir quelle que soit la vertu des hommes en place.

D’aucuns évoquent le Second Empire en observant les dérives de la république française et parlent de « césarisme démocratique ».

Par son mode de scrutin uninominal majoritaire à deux tours, ce pays est déjà privé d’un véritable parlement offrant des occasions de débats non réglés d’avance, un parlement où existent de vrais enjeux politiques avec cette incertitude salutaire qui contraint les gouvernants au dialogue et à l’humilité du pouvoir.

Restriction nouvelle : le seul droit d’une opposition caution morale déjà condamnée à n’être que d’opérette, le pouvoir de la parole, va être encadré strictement, au terme d’une « réforme » (traduisez régression), consistant à limiter le temps de tribune octroyé aux députés.

Cette atteinte aux droits de l’opposition s’avère plus symbolique que réelle, puisque l’opposition, structurellement minoritaire, n’a jamais pu inquiéter la majorité, aucune motion de censure n’ayant été adoptée depuis 1962 et qu’il est sans exemple, sous la cinquième république, qu’une opposition n’ait jamais pu entraver l’adoption d’une loi voulue par la majorité !

L’urgence serait d’organiser de véritables contre-pouvoirs en promouvant une télévision publique échappant au contrôle du chef de l’Etat, un pouvoir judiciaire déconnecté du pouvoir politique, des chambres régionales des comptes souveraines, un statut nouveau des partis politiques et associations leur conférant un rôle reconnu dans la société et surtout une séparation strict des pouvoirs désormais suprêmes de l’argent et des médias.

Car, différence tout de même avec le césarisme démocratique classique, le système qui s’implante n’est pas, contrairement aux apparences, l’omnipotence d’un homme mais la mainmise d’un groupe d’individus réunis par la fortune, les intérêts économiques.

Il conviendrait d’aller dans la direction inverse que celle suivie par la ploutocratie.

Citoyens, réveillez-vous. L’heure n’est plus à la réforme : mieux encore elle est à la révolution, révolution sans violence ni haine, mais rupture radicale avec la société de pillage, de cupidité, de dévastation, d’exploitation.

Mais ne le dites pas, cela ferait peur dans les maisons de retraite et ailleurs et la peur est vraiment tendance !

Gérard Charollois
CONVENTION VIE ET NATURE POUR UNE ECOLOGIE RADICALE

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