terrienne 0 Posté(e) le 26 avril 2009 Sécurité contre liberté L’ignorance des peuples fait le terreau des démagogues. L’individu ne saurait être libre s’il est soumis à l’insécurité, à la prédation des plus forts, des plus frustres, des plus brutaux. D’autres l’ont dit avant nous : « Entre le fort et le faible, c’est la loi qui protège et la liberté qui opprime ». Le propre de la civilisation est d’édicter des normes protectrices pour prévenir l’agression, l’exploitation inique, l’écrasement des dominés par les dominants. Sauf à concevoir une multitude sage, une société de philosophes justes et bienveillants, l’Etat doit garantir la prévalence de l’intérêt général supérieur et contenir les menées des prédateurs sociaux. Du moins, c’est ce qu’il devrait accomplir dans une république idéale. Toutefois, aussi longtemps que la biologie n’aura pas percé le secret de la duplication cellulaire et abolit la mort (ce qui n’est pas pour tout de suite), l’insécurité règnera pour chaque individu tellement éphémère, tellement menacé dans son existence non pas par les bombes d’un terroriste fou mais simplement par sa propre finitude. Pour l’heure, le tourisme, par les accidents qu’il génère, tue plus de monde que le terrorisme. Mais l’homme préférera toujours avoir peur que le ciel lui tombe sur la tête. Pour asseoir le pouvoir de l’argent roi, les partis politiques conservateurs jouent de la peur des peuples, du sentiment d’insécurité pour manipuler et ranger le troupeau sous la protection des mauvais bergers. En six ans, le gouvernement de « droite décomplexée » fit adopter neuf lois sur la sécurité publique et chaque fait divers tragique devient l’excellente occasion de s’adonner au populisme lourd : Racailles, trublions, terroristes, voyous, fous, délinquants, bandes de jeunes et autres épouvantails à « maisons de retraites », sont magnifiquement instrumentalisés. Bien sûr, il faut préserver le citoyen du crime et prévenir la délinquance contre les personnes et contre les biens (jamais contre les opinions). Mais faut-il que 30% des détenus soient des schizophrènes ? Devons-nous sans cesse remplir les prisons, inventer des infractions, aggraver les sanctions pour satisfaire la vindicte des foules habilement manipulées ? Ce qui est formidable avec la violence, le crime, l’horreur sociale, c’est qu’ils servent magnifiquement les intérêts des grands manipulateurs. Y a-t-il de la délinquance, des petits enfants violés et tués, des attentats abjects et stupides : les dirigeants jouent de la peur, cultivent l’indignation et roulent des mécaniques pour rassurer l’électeur captif. Y a-t-il moins de violences, d’infractions, de faits divers riches d’hémoglobine et d’émotions : les mêmes se congratulent et s’attribuent le mérite de terrasser la canaille ! Que les chiffres, d’ailleurs modifiés à volonté, de la délinquance montent ou descendent : le parti de la peur s’en empare pour faire l’élection et perpétuer un pouvoir au service de moins de 2% de la population. Non, je ne pense pas à un individu en particulier, ni à un moment déterminé, ni même à un pays spécifique. Cette grosse ruse perdure depuis des décennies, partout sur la planète et je pense même que dans les siècles lointains, les tyrans, empereurs et rois divers invoquaient la nécessité de leur protection paternelle pour asservir leurs peuples. Ce qui pose problème est que cette propansion à s’abandonner à la peur, à renoncer à exercer son esprit critique et sa liberté croît quasi-physiologiqement avec l’âge des individus. Or, les populations vieillissent, ce dont il faut se réjouir d’un point de vue démographique et dans la perspective d’une nécessaire décroissance à terme de la population humaine, mais ce phénomène interdit une évolution éclairée, généreuse, novatrice de la société. Alors, résistons à la sénescence et préférons la liberté aléatoire à la sécurité absolue qui implique la négation de la première. Gérard Charollois CONVENTION VIE ET NATURE POUR UNE ECOLOGIE RADICALE Partager ce message Lien à poster Partager sur d’autres sites