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la lettre hebdo de gérard charollois (10/01)

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Pour la Nature : intervenir ou s’abstenir ?

Etant de ceux pour lesquels la Nature tient lieu de parti, de patrie, de religion, je me suis toujours interrogé sur les meilleures façons de l’aimer, de la servir, de la sauver de la nuisance d’homo economicus.
Faut-il réintroduire des espèces disparues dans les milieux naturels, creuser des points d’eau, favoriser l’élevage extensif de montagne pour empêcher la forêt de conquérir l’espace et maintenir ainsi artificiellement des sites d’accueil de telle ou telle espèce d’oiseaux charognards ?

L’homme doit-il, par sa technique et par des incitations économiques, interférer positivement pour la biodiversité ou inversement laisser faire, s’abstenir de toute aide à la Nature pour qu’elle survive à la Catastrophe ?
Paraphrasant RENAN, parlant de la France, pourrait-on dire : « Jeune homme, la Nature se meurt. Ne troublez point son agonie ».
S’agissant des nostalgies anthropocentriques, la réponse s’impose : il ne faut pas intervenir pour recréer un passé irrémédiablement éteint.
Comme nous ne pouvons pas l’ignorer, l’humain est un animal cupide par nature. Nul ne voudra, pour lui-même, revenir à l’agriculture bocagère des siècles passés et les « bucoliques bergers » des montagnes n’entendent pas partager les troupeaux avec les loups et les pâturages avec les marmottes.
Le culte du profit maximisé, de la rentabilité, de la production optimale sévissant partout, il est illusoire ou malhonnête de favoriser une quelconque activité économique au nom de la biodiversité. L’opération se retourne toujours immanquablement contre la Nature.
La subvention massive de l’élevage de montagne débouche sur le surpâturage, la guerre faite aux prédateurs et en bout de course, via l’aseptisation et l’interdiction d’abandon des cadavres d’animaux domestiques, à la privation de ressources pour les vautours.
La « fermeture du milieu » par le reboisement spontané eut été moins nocive pour la biodiversité.
Est-ce à dire que toute intervention humaine doive être proscrite ?
Autrefois, lorsque l’homme ne disposait pas des moyens techniques de la nuisance absolue, les réalisations anthropiques furent heureusement appropriées par nombre d’espèces : ainsi les haies, les mares, les vastes prairies humides, milieux artificiels furent colonisés par d’innombrables oiseaux et mammifères.
Bien sûr, l’homme de jadis, pas plus généreux que celui d’aujourd’hui, n’édifia pas des clochers pour y faire nicher la chouette effraie et n’entretint pas les « bouchures » pour offrir des nids aux passereaux.
Des considérations plus futiles et plus perverses motivaient ses ouvrages, mais la Nature pouvait tirer, elle aussi, profit de ces œuvres, alors qu’elle ne pourra rien faire de bon d’une ligne de TGV, d’une autoroute, d’un champ de maïs empoisonné, d’une cité de béton et de verre ou même pigeons et moineaux domestiques ne peuvent plus vivre.
En cela, la nuisance humaine a changé non seulement de degré mais de nature.
Trop nombreux, trop puissants techniquement, les homo economicus n’offrent plus à la biodiversité la moindre place.
Dans ce contexte nouveau, ceux qui aiment la Nature ne sauraient se contenter de laisser faire, sur le thème : la vie est plus forte que la mort et le vivant, conçu comme divers, saura bien s’adapter. Après tout, diront les observateurs pressés, « il y eut dans toute l’histoire de la planète plusieurs grandes phases de disparition d’espèces et la vie est toujours là ».
C’est oublier que les bouleversements du passé planétaire furent ponctuels et que toute phase de disparition s’accompagnait d’une phase de renouveau et de diversification. Cela s’appelait l’évolution des espèces.
Or, l’homo economicus fait bien pire que détruire telle ou telle espèce, il interrompt l’évolution en aseptisant progressivement la terre.
Dans l’espace anthropisé contemporain, aucune espèce ne peut apparaître au lieu et place d’une autre.
Ce monde devient biocidaire.
Alors, face à la catastrophe, il faut agir :
Restituer des espaces naturels exempts d’activités lucratives,
Aménager positivement des lieux privilégiés de vies en entretenant des réserves naturelles dont l’unique vocation, à l’exclusion de tout usage mercantile et récréationnel, sera la sauvegarde de la biodiversité,
Réintroduire des espèces disparues en se donnant les moyens techniques et juridiques de rendre effective ces réintroductions et nous pensons, entre autres, aux ours pyrénéens qu’il faut préserver des idiots de village dont l’unique loisir est de courir le cochonglier le dimanche venu.
Faut-il nourrir les oiseaux en hiver, par temps de gel et de neige ?
Oui, pour l’oiseau que l’on sauve et tout autant pour la dignité humaine, dignité à laquelle n’accéderont jamais ceux qui tuent.

Gérard CHAROLLOIS
CONVENTION VIE ET NATURE POUR UNE ECOLOGIE RADICALE

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