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pacemaker91

La chrysomèle

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http://www.lemonde.fr/planete/article/2009/08/17/la-chrysomele-menace-le-mais-en-france_1229162_3244.html#ens_id=1229238

Venue des Etats-Unis et débarquée en Europe au début des années 1990, la chrysomèle du maïs s'installe-t-elle en France ? Diabrotica virgifera virgifera, de son nom latin, a été surnommée outre-Atlantique "the billion dollars bug" (l'insecte à 1 milliard de dollars), en raison des dégâts qu'elle occasionne : là où il n'est pas combattu, ce coléoptère peut faire baisser les rendements de 80 %.

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Depuis le début de l'été, il a été piégé dans plusieurs régions de France. Il y avait fait des incursions répétées, mais jusqu'alors contenues, depuis sa détection, en 2002, près des aéroports parisiens. Le 13 août, la préfecture de Savoie a annoncé que plusieurs nouveaux foyers avaient été découverts. Des captures avaient déjà eu lieu, depuis juillet, en Haute-Savoie, dans l'Ain et le Rhône. Mais c'est l'Alsace qui est en première ligne, avec une multiplication des piégeages : quelque 150 insectes sur neuf foyers, contre quatorze individus sur trois foyers en 2008, deux coléoptères piégés en 2007 et un seul en 2006.

Alors même que l'été n'est pas terminé, la découverte de nouveaux foyers, mais aussi de récidivistes là même où la lutte avait été menée les années passées, est une mauvaise nouvelle. "La situation n'est pas hors de contrôle, mais l'éradication n'est plus envisageable dans certaines régions", reconnaît-on au ministère de l'agriculture.

Cette invasion discrète - il n'y a pas encore de dégâts dans les champs - inquiète les agriculteurs et les pouvoirs publics, qui se sont mobilisés en urgence : deux décrets ont été pris, l'un en mars, l'autre en juillet, pour définir les modalités de lutte dans les zones infestées et de compensation financière des exploitants. Le ministère de l'agriculture vient d'adresser un courrier aux préfets pour les sensibiliser à cette menace et leur rappeler les modes de lutte.

Il n'y a pas de temps à perdre : la bestiole peut emprunter l'avion pour passer d'un continent à l'autre. C'est ainsi qu'elle a débarqué des Etats-Unis en Europe, à au moins trois reprises : Serbie au début des années 1990, Italie vers 2000 et région parisienne en 2002. Mais qui prend l'avion peut aussi faire de l'auto-stop. En outre, par ses propres moyens, Diabrotica peut se déplacer de vingt à quarante kilomètres par an. Et fonder de nouveaux foyers.

"La chrysomèle est actuellement classée en France sur liste de quarantaine, explique Jean-Baptiste Thibord, chargé de la protection contre les ravageurs à l'institut de recherche en agriculture Arvalis. Ce qui implique deux mesures. En premier lieu, les directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt mettent en place une surveillance du territoire, avec des pièges à phéromones (substances chimiques émises par l'insecte)." Deux mille sites étaient ainsi surveillés en 2008, sur les zones les plus propices à l'apparition du coléoptère : aéroports, régions frontalières et grands axes routiers.

"Ensuite, en cas de capture, il faut passer à l'étape de lutte, en suivant des mesures réglementaires d'éradication", poursuit M. Thibord. Une "zone focus" est alors délimitée, sur un rayon d'un kilomètre, où la culture du maïs ne pourra être effectuée qu'une année sur trois, imposant une rotation des cultures. Une seconde zone, dite "de sécurité", est mise en place, formant un disque de cinq à dix kilomètres à partir du foyer, où le maïs pourra être cultivé une année sur deux.

En parallèle, un traitement insecticide a été mis au point. il peut être utilisé sur les plants de maïs "sans aucun danger sur la santé des consommateurs", assure Sophie Winninger, directrice du service régional de l'alimentation d'Alsace. L'association Alsace Nature s'inquiète cependant de l'utilisation de ces pesticides et demande la constitution d'une cellule "de réflexion, de proposition et de suivi des mesures engagées, sous la présidence du préfet", explique Michel Breuzard, son président.

Certains agriculteurs, qui sont parfois aussi apiculteurs, redoutent l'impact des épandages sur les abeilles, mais aussi sur l'image de leur profession. Les traitements ne seront pas effectués par voie aérienne, répond Mme Winninger, qui précise que "la date de l'application du traitement est suffisamment éloignée de la date de récolte pour qu'il n'y ait aucune incidence".

Le monde agricole s'inquiète aussi de l'incidence économique de ces mesures. En Alsace, il a consenti de lourds investissements pour l'irrigation et ne dispose pas forcément de cultures de substitution là où la rotation devient obligatoire. Or celle-ci pourrait toucher quelque 900 exploitations, selon un décompte de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles du Bas-Rhin.

Même si un dispositif de compensation financière a été mis en place, il risque d'être insuffisant si la situation se pérennise, estiment les agriculteurs. Ce à quoi certaines associations environnementales répliquent que l'arrivée de Diabrotica devrait pousser ceux-ci à envisager d'autres modèles que la monoculture intensive.

"Une chose est sûre, insiste M. Thibord, il faut agir pour réduire la multiplication de ces insectes. Et il y a un exemple à ne pas suivre : celui de la Hongrie." Comptant parmi les premiers pays touchés en Europe par la chrysomèle, celle-ci n'avait pas réagi à temps. Si bien qu'en 2000 le pays a dû faire face à un niveau de nuisibilité très intense. Diabrotica virgifera virgifera n'y est plus classée comme insecte de quarantaine, mais comme espèce "installée".

Les agriculteurs n'ont d'autre choix que de s'adapter à sa présence. Aux Etats-Unis, où la chrysomèle est combattue depuis des décennies, les agriculteurs peuvent cependant avoir recours à une autre réponse : les plantes transgéniques. Lancé en 2003, le maïs MON 863 de Monsanto y a été cultivé sur environ 11,5 millions d'hectares en 2008, soit une surface représentant le triple des surfaces cultivées en maïs en France.

Cet outil de lutte deviendra-t-il incontournable en Europe, où l'opposition aux organismes génétiquement modifiés est forte ? On n'en est pas encore là. Mais "avec des captures dix fois supérieures aux années précédentes, nous sommes actuellement à un tournant de la situation épidémiologique", estime Sophie Winninger.

Le ministère de l'agriculture attend les conclusions des experts entomologistes sur l'année 2009, attendues d'ici à septembre, pour envisager les suites à donner à la lutte contre le coléoptère.

Lucie Lecocq et Hervé Morin
Article paru dans l'édition du 18.08.09.

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