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Maroc Moyen Atlas : Evaluation du stock de carbone organique dans les forêts de chênes verts

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La présente étude a été réalisée dans la chênaie verte du Moyen Atlas Central Marocain (Tafachna et Reggada). Elle a pour objectif la détermination du stock de carbone organique dans les différentes couches des sols, la litière et les différentes composantes de l'arbre (bois du tronc, écorce, branches, rameaux et feuilles).

Il ressort de cette étude que le stock de carbone total (SCOT) dans l'écosystème du chêne vert est de 145 tC/ha pour Tafachna et 114 tC/ha pour Reggada.

- Le stock de carbone organique des sols (SCOS) représente plus de 50% du SCOT. Le SCOS varie considérablement avec la densité du peuplement avec 80 tC/ha pour Tafachna (5192 pieds/ha) et 56 tC/ha pour Reggada (1584 pieds/ha).

- Au contraire, le stock de carbone dans la biomasse (aérienne et racinaire) est plus important dans Tafachna que dans Reggada (64,4 tC/ha pour Tafachna et 58 tC/ha pour Reggada).

- Plus de 80% du stock de carbone organique des sols est emmagasiné dans les 30 premiers centimètres. Le stock de carbone dans cette couche (0-30 cm) est de l'ordre de 63 t/ha (43% du SCT) pour Tafachna et 47,1 t/ha (41% du SCT) pour Reggada.

Le Chêne vert est l'espèce la plus répondue au Maroc, avec 1.394.000 ha (Benabid & Fennane, 1999). Il est présent sous différents bioclimats, allant du semi-aride, où il apparaît sous forme de matorral plus ou moins dégradé, peu dense et peu vigoureux, jusqu'à l'humide, où il forme les meilleurs peuplements, voir de belles futaies.

Le chêne vert est considéré depuis longtemps comme une espèce de faible valeur, puisqu'il ne permettait pas de produire du bois de qualité financièrement très rentable (Belghazi et al., 2001 ; Ezzahiri et al., 1995). Cependant, cette espèce joue un rôle incontestable du point de vue économique, écologique et social. La moitié de la production est utilisée comme bois de feu et de carbonisation. D'un point de vue social, la forêt de chêne vert est largement utilisée par la population riveraine, car en plus du feuillage utilisé en période estivale pour le bétail, le bois est aussi employé pour la confection artisanale d'outils nécessaire à la vie rurale (Qarro et al., 1995).

Chêne vert - Maroc DR

Malgré la superficie importante couverte par le chêne vert, il reste néanmoins parmi les essences autochtones les moins étudiées au Maroc, et plusieurs facteurs de dégradation ont contribué à la régression de cet écosystème dont principalement l'absence quasi-totale de la régénération naturelle, l'exploitation abusive et le surpâturage.

Par ailleurs l'absence d'outils scientifiques performants pour évaluer la ressource, complique davantage la gestion de peuplements de chêne vert.

La présente étude vise à combler en partie ce manque de connaissance, surtout en ce qui concerne l'aspect quantification du stock de carbone dans nos ressources. Utilisant de nouvelles approches et techniques d'ajustement et de modélisation, les carbomasses élaborés, constituent des outils nécessaires et incontournables pour une gestion durable et raisonnée de l'écosystème du chêne vert.

Selon le rapport du groupe d'experts Intergouvernemental de l'Evolution du Climat GIEC (2001), les océans stockaient 93% du carbone de la planète, soit environ 39.200 GtC et les 7% restants se répartissent entre la biomasse terrestre, les sols et l'atmosphère. La végétation et les animaux terrestres constituent un stock de 610 GtC.

Les sols contiennent deux fois plus de carbone organique que l'atmosphère. Avec 750 GtC, elle représente moins de 2% du carbone de la planète. L'augmentation de la quantité de carbone dans cette fraction (atmosphère) est responsable du réchauffement climatique. Les forêts stockent plus que la moitié du carbone organique des terres émergées (1.120 GtC) et le carbone emmagasiné dans les sols des forêts représente 35% du total du carbone présent dans les réservoirs du sol (Robert, 2002). Les forêts jouent donc un rôle déterminant dans la régulation du niveau du CO2 atmosphérique.

Le cycle de carbone de la biosphère terrestre ou océanique est considéré comme le régulateur à court terme des échanges avec l'atmosphère. Dès la fin du XIXème siècle, ce cycle est en cours de perturbation par l'entrée non négligeable dans l'atmosphère du CO2 provenant des combustibles fossiles (6,3 Gt (C) an-1) et des changements d'usage des terres (1,6 Gt (C) an-1) (Beaudoin, 2003 ; Arrouays et al., 2005).

La matière organique augmente la qualité du sol et améliore la capacité de régulation de l'eau et de l'atmosphère du sol, en influençant sa structure, sa capacité de rétention en eau, ses réserves en éléments nutritifs, sa biodiversité ainsi que la profondeur d'enracinement des végétaux qui y croissent (Lal & Follet, 1998). De plus, le carbone organique constitue un réservoir important dans le cycle global du carbone du sol. En effet, Schlesinger (1986) a estimé qu'il y avait environ trois fois plus de carbone dans le sol que dans la végétation des écosystèmes terrestres.

La quantité de C organique dans un sol forestier est le résultat de l'équilibre entre la production primaire nette de la végétation et la décomposition de la matière organique (Liski & Westman, 1997a ; 1997b). Ces deux processus dépendent à leur tour des conditions climatiques qui sont principalement la température et l'humidité.

Toutefois, les sols forestiers peuvent devenir une source importante de CO2 advenant un réchauffement climatique, car ce dernier entraînerait une plus grande augmentation du taux de décomposition que le taux de production primaire nette de la végétation (Liski, 1999 ; Bernoux et al., 2005). Même de petits changements du réservoir du carbone organique dans le sol peuvent affecter significativement la concentration de CO2 dans l'atmosphère, car le sol contient deux fois plus de C que celle-ci (Schlesinger, 1977 ; Post et al., 1982 ; Watson et al., 1990).

L'exploitation intensive des forêts des Iliçaies du Moyen Atlas Marocain peut entraîner une diminution du réservoir du carbone organique dans le sol par l'accélération de la dynamique de décomposition de la litière dû à l'augmentation de la température du sol.

Makipaa et al. (1999) ont estimé qu'une augmentation de la température de 4°C dans la zone boréale entraînerait une augmentation de 10% du réservoir du carbone dans la végétation, mais aussi une diminution de 30% du réservoir de carbone dans le sol. Ainsi, Aber et al.. (1978), Covington (1981) et St-Laurent et al. (2000) ont observé après une coupe totale une diminution du contenu en carbone de la litière de l'ordre de 50% pendant la première année.


D'après nos investigations, aucun travail n'a ciblé auparavant la quantification du stock de carbone dans les écosystèmes forestiers Marocain. L'objectif de cette étude d'évaluer le stock de carbone organique emmagasinée dans les Iliçaies du Moyen Atlas Marocain (végétation, sol et litière).

La dynamique de l'accumulation de la biomasse dans les peuplements forestiers est au centre du bilan du carbone. Les taux de séquestration du carbone dans les réservoirs de la biomasse et du sol déterminent la capacité de la forêt à retirer le carbone de l'atmosphère.

On constate que la densité de peuplement n'a pas d'effet significatif sur la potentialité de séquestration du carbone dans la biomasse (64,4 pour Tafachna et 58 tC/ha pour Reggada). Alors qu'il a un effet très marquant sur la séquestration du carbone dans les sols et plus précisément sur la couche 0-15 cm (52,7 pour Tafachna et 33,2 tC/ha pour Reggada) et sur la couverture morte (8,65 pour Tafachna et 3,5 tC/ha pour Reggada).

Par extrapolation de ces résultats préliminaires avec un stock moyen de carbone organique de 130 tC/ha sur toute la superficie qu'occupe l'écosystème des illiçaies au Maroc (1 394 000 ha) ha (Benabid & Fennane, 1999), on conclut que cet écosystème séquestre environ 181 Millions de tonnes de carbone (soit environ 2,8 Mt C/an). Ceci montre que ce réservoir de carbone peut devenir une source importante du dioxyde ce carbone dans l'atmosphère après une simple perturbation.

L'exploitation d'un hectare de chêne vert (exportation de bois d'œuvre) entraîne une libération d'environ 477 tonnes de CO2 (sans parler du protoxyde d'azote) dans l'atmosphère. En plus, la déforestation a pour conséquence l'élévation de la température du sol ce qui accélère la dégradation de sa matière organique et parsuite libération du dioxyde de carbone.


Le sol est une ressource non renouvelable dont la qualité doit être préservée que ce soit pour ses fonctions environnementales (pouvoir épurateur pour les eaux de surface, érosion physique et chimique, amélioration de la qualité de l'air) ou écologiques (préservation de la biodiversité végétale et animale, qualité du paysages).

Auteur : Mohamed Boulmane / Haut Commissariat des Eaux et Forêts


Notre Planète Info 02/07/2012

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