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birdy1972

Les seiches ont une mémoire épisodique, comme l’Homme !

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Comme nous, les seiches communes possèdent une mémoire épisodique. Ces céphalopodes peuvent donc associer un lieu, un moment et une émotion à un souvenir précis, de quoi accroître leurs chances de survie. Auparavant, cette capacité n’avait jamais été décelée chez un invertébré.

Durant des décennies, l’Homme a été considéré comme le seul dépositaire d’une mémoire épisodique. Grâce à elle, nous nous souvenons d’où, quand et comment nous avons vécu un événement marquant par le passé (mariage, repas, choc émotionnel, etc.). La raison de cette vision très anthropocentrique : la possession de cette capacité nécessite une notion subjective du temps qui passe... dont seul l’Homme serait doté.

   Les seiches communes peuvent atteindre une longueur de 20 à 30 cm (tentacules incluses). Elles vivent notamment sur des fonds sableux ou dans des herbiers. ©️ ZombyLuvr, Flickr, cc by nc sa 2.0

Notre vision a cependant évolué dès 1998. Cette année-là, le geai buissonnier (Aphelocoma californica) s’est fait connaître pour sa capacité à se souvenir des lieux où il enterrait des graines, mais aussi de quand et comment il l’avait fait. Bref, les trois critères requis étaient rassemblés. Depuis, l’existence d’une « pseudomémoire  épisodique » (terme réservé aux animaux autres que l’Homme) a également été prouvée chez les rats et divers grands singes, donc uniquement chez des vertébrés. De là à prendre un nouveau raccourci, il n’y a qu’un pas que l’équipe de Christelle Jozet-Alves (université de Caen) n’a pas franchi !

En effet, elle vient de prouver que la mémoire épisodique est également exploitée par un invertébré, probablement pour accroître ses chances de survie. L’animal en question est un céphalopode : la seiche commune (Sepia officinalis). Par le passé, ce mollusque a déjà surpris grâce à son exceptionnelle mémoire spatiale, ainsi que par l’efficacité de son camouflage. L’information a été présentée dans la revue Current Biology, mais comment a-t-elle été obtenue ?

   Les seiches communes sont douées de mimétisme. Elles peuvent activement changer de couleur pour se fondre dans le paysage. ©️ sarsifa, Flickr, cc by nc sa 2.0


Les seiches passent 95 % de leur temps dans des lieux sécurisants, à l’abri des prédateurs. Mais elles doivent également se nourrir et donc s’exposer au danger. L’idéal voudrait alors que chaque déplacement soit optimisé de manière à réduire la pression de prédation à son minimum. Partant de ce constat, et connaissant la préférence des seiches pour les crabes (fait déterminé lors d’une expérience préliminaire), les chercheurs se sont demandés si une mémoire pseudoépisodique n’était pas utilisée dans ce contexte précis. Pour le déterminer, une solution s’est imposée : l’expérimentation.


Trois seiches fournies par l’aquarium de Saint-Malo ont tout d’abord été conditionnées, le but étant qu’elles associent la présence d’un stimulus (un dessin montrant deux diamants) à la délivrance de nourriture. Plus tard, des crabes leur ont été proposés toutes les trois heures. Ainsi, rien ne leur était proposé à manger si elles réagissaient à un stimulus en dehors du cycle expérimental. Après 21 essais, les mollusques ont appris à ne plus se mettre en danger inutilement, donc à attendre le temps approprié avant de sortir.

 MuseeMer64 27 nov 2008



Enfin, deux dessins ont aléatoirement mais simultanément été montrés 1 h ou 3 h après un repas initial, sachant que des crevettes étaient alors constamment disponibles en un point donné. En revanche, les crabes n’ont été mis à la disposition des seiches que trois heures après le dernier repas, en un autre lieu. Au début, les seiches ont visité les deux points de nourrissage lorsque les signaux leur étaient présentés mais, au bout de 11 cycles, elles ont synchronisé leurs déplacements en fonction des mets accessibles. Ainsi, toutes les trois heures, elles se sont préférentiellement dirigées vers les crabes, et non vers les crevettes comme elles le faisaient si les stimuli étaient montrés une heure après le dernier repas.


Ces mollusques ont donc bien la notion du temps qui passe, et se souviennent d’informations obtenues (type de proie) dans un contexte temporel (temps écoulé depuis le dernier repas) et spatial bien précis (position du site de nourrissage approprié). Tous les critères sont donc réunis pour dire qu’ils disposent d’une mémoire pseudoépisodique. Ici, elle est notamment mise à profit pour réduire les déplacements inutiles, donc pour diminuer les temps d’exposition à d’éventuels prédateurs. Visiblement, cette capacité pourrait être bien plus répandue dans le monde animal que ce qui a longtemps été cru.

 H0NF0 9 nov 2012



F - S 10 DEC 2013

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