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Une nouvelle espèce de baleine à bec redécouverte grâce à de la viande séchée

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Une espèce de baleines à bec, décrite en 1963 puis tombée dans l’oubli, vient d’être remise sur le devant de la scène. La redécouverte de ce cétacé repose entre autres sur un événement peu banal : la remise de viande séchée à un biologiste par des insulaires du Pacifique. L’histoire est passionnante.

Près de 40 ans après sa découverte, une nouvelle espèce de baleines à bec vient enfin d’être reconnue. Présentée sur le site Science Mag, l’histoire de cette description est étonnante à bien des égards.



La baleine de Sowerby (Mesoplodon bidens) appartient, comme Mesoplodon hotaula, à la famille des ziphiidés. Ces mammifères marins à dents, ce sont des odontocètes, se démarquent par leur long museau, qu’ils utilisent entre autres pour attraper des calmars. ©️ Christine Veeschkens, Flickr, cc by nc nd 2.0


Elle débute en 1963 sur une plage sri-lankaise, à la suite de l’échouage d’une baleine adulte de sexe féminin. Le directeur du Muséum national de Colombo de l’époque, Paulus Edward Pieris Deraniyagala, a alors déterminé qu’il s’agissait d’une espèce inconnue du genre Mesoplodon, qu’il a nommée Mesoplodon hotaula.


Deux ans plus tard, l’existence officielle de cet odontocète a pris fin après sa reclassification par d’autres scientifiques. Mesoplodon hotaula est alors devenu un synonyme de M. ginkgodens, une espèce déjà connue et uniquement décrite à partir d’animaux échoués. Puis… plus rien jusqu’au début des années 2000, mais les chercheurs n’en étaient pas encore conscients.

En visite dans les îles Gilbert, un archipel des Kiribati situé dans le Pacifique, un biologiste a alors reçu de la viande séchée provenant d’une des sept baleines à bec qu’avaient rabattues des insulaires vers une plage, avant de les tuer.

Ces morceaux de chair n’ont pas été consommés, mais bien envoyés à l’université d’Auckland (Nouvelle-Zélande), où des généticiens compilent une banque de données sur le groupe de cétacés en question. Surprise : l’ADN extrait de la viande était inconnu. Il était donc plus que probable qu’une nouvelle espèce venait d’être identifiée.

 Lisa Thompson, Island Conservation Society, Seychelles.  l'ADN d'une baleine à bec échouée aux Seychelles (en haut) et une étude approfondie de son crâne (en bas) ont aidé à la redécouverte de M. hotaula.


Difficile cependant de la décrire à partir d’un morceau de muscle séché. Par la suite, d’autres indices ont été récoltés en 2005 sur l’atoll Palmyra, 2.600 km au nord-est des îles Gilbert. Il s’agit de dents et d’os dont l’ADN s’est révélé être identique à celui de l’échantillon inconnu. L’élément manquant a été trouvé en 2009 sur une plage des Seychelles, dans la partie occidentale de l’océan Indien, à plusieurs milliers de kilomètres des îles Gilbert. Il s’agit d’un corps de baleine complet, dont l’ADN extrait a lui aussi été associé à celui séquencé à partir de la viande

Des analyses complètes ont depuis été réalisées afin de décrire l’espèce, qui n’est en réalité pas nouvelle. Il s’agit de M. hotaula. La voilà donc réhabilitée !


Il est vrai que cette espèce est particulièrement proche de M. ginkgodens, mais plusieurs différences les distinguent néanmoins sur le plan génétique, que ce soit dans l’ADN mitochondrial ou nucléaire, ou morphologique. Présentées par Merel Dalebout (Université de Nouvelle-Galles du Sud, Australie) dans la revue Marine Mammal Science, ces variations expliquent logiquement pourquoi l’ADN de la viande n’a pas été attribué à une entité biologique précise en son temps. Grâce à tous ces éléments, on peut dorénavant affirmer qu’au moins sept baleines M. hotaula ont été trouvées dans le monde.

 Ce squelette est celui d’un Mesoplodon mirus, autrement dit d’une baleine à bec de True. Comme ses congénères du même genre, cette espèce ne possède que deux dents qui sont situées sur la mâchoire inférieure. ©️ Ryan Somma, Flickr, cc by sa 2.0


Les baleines à bec sont méconnues car elles vivent en plein océan, dans des zones parfois peu étudiées par l’Homme. Grâce aux indications données par les pêcheurs des îles Gilbert, nous savons maintenant que l’espèce réhabilitée vit en groupe. Comment sinon expliquer la capture de sept individus d’un coup ? Auparavant, il avait été supposé que cet animal était solitaire. Quoi qu’il en soit, cette découverte porte à 15 le nombre de représentants du genre Mesoplodon connu, ce qui en fait de loin le genre le plus riche en espèces chez les cétacés.

F-S 7FEB2014

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