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Il faut donner de la valeur aux arbres », dit Jane Goodall

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En tournée européenne, l'infatigable Jane Goodall a rencontré ses fans français dans un jardin parisien, à l'abri des regards. Futura-Sciences était là, pour interroger la primatologue devenue messagère de la paix des Nations unies et ardente activiste de la protection de l'environnement.

Alors qu’elle vient de fêter ses 80 ans, elle voyage 300 jours par an pour la défense des chimpanzés en particulier et de l’environnement en général.

 Jane Goodall a fêté en avril son 80e anniversaire. Après l'Espagne et la Belgique, elle est passée par la France pour faire vivre son institut. ©️ Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences

On ne présente plus Jane Goodall, cette jeune dame qui, dans les années 1960, a réalisé les premières études du comportement des chimpanzés chez eux, dans la jungle. En Tanzanie, dans ce qui est aujourd’hui le parc national de Gombe, la jeune primatologue britannique, seule puis en compagnie du photographe Hugo van Lawick, observe durant des mois une communauté et finit par se faire accepter par les chimpanzés.

Elle peut ainsi étudier scrupuleusement la complexité des relations sociales entre individus, riches d’amitiés, de confrontations, de jeux d’alliances et de stratégie, mais aussi d’embrassades et de chatouilles. Elle met en évidence les fortes différences de personnalités. Les lecteurs de son premier livre, Les chimpanzés et moi, découvriront Flo, la femelle de haut rang, prisée des mâles et très bonne mère (mais qui aura du mal avec Flint, son dernier, un peu simplet) et Mike, le jeune ambitieux qui détrône le chef Goliath en lui faisant peur avec des bidons.

Et puis vinrent les outils. Un jour, celui qu’elle a surnommé David Greybeard (ce qui donnerait David Barbegrise en français) coupe devant elle un long brin d’herbe et s’en sert comme attrape-termite. Plus tard, devant la caméra d’Hugo van Lawick, d’autres effeuillent des tiges pour le même usage. La nouvelle fait le tour du monde : l’Homme n’est pas le seul à fabriquer des outils.

 Jane Goodall, le 18 mai 2014, fait une pause à Paris, dans le jardin du Ruisseau, où l'on fleurit une partie de l'ancienne ligne de train dite de la Petite Ceinture. La Britannique vient y rencontrer des membres français de son institut. ©️ Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences

Depuis, les observations de ce genre se sont multipliées et on ne s’étonne plus de voir un orang-outan utiliser un bâton pour mesurer la profondeur d’un cours d’eau pendant qu’il le traverse ou construire savamment son couchage pour la nuit. Il faut désormais voir des corvidés piquer des larves d’insectes avec des brindilles soigneusement conservées pour être surpris. Notre vision des animaux a définitivement changé !

Pourtant, les chimpanzés, malgré leur sensibilité manifeste, sont en voie d’extinction. Ils ne seraient plus aujourd’hui que 250.000 environ, alors qu’il y en avait au moins un million dans les années 1960.[/i] « En fait, on ne connaît pas vraiment l’effectif de l’époque », explique Jane Goodall lors de l’entretien qu’elle nous a accordés. « Il y en avait entre un et deux millions. C’était sans doute plus près de deux… » La première cause de leur disparition est la destruction de la forêt, comme bien d’autres espèces, notamment de grands singes.

 Mister H, une peluche fétiche offerte à Jane Goodall par Gary Haun, un magicien... aveugle. ©️ Jean-Luc Goudet, Futura-Sciences

La primatologue s’est depuis longtemps transformée en défenseur de la nature, en fondant l’institut Jane Goodall et en arpentant la planète, inlassablement. Son programme Roots and Shoots (littéralement Racines et pousses) est destiné aux jeunes pour les aider à prendre des initiatives. « Mais il y a aussi des retraités ! » corrige-t-elle.

Jane Goodall, optimiste inoxydable, ne vit que dans l’action. « Les chimpanzés peuvent-ils être sauvés ? » lui demandons-nous. La réponse est « Oui ! Il faut fournir une alternative à la déforestation pour les populations locales. Et pour cela, il faut donner de la valeur aux arbres. L’une des voies est le programme REDD des Nations-Unies. REDD signifie Reducing Emissions from Deforestation and forest Degradation. Ce sont des choses qui marchent… » Pour elle, « les Hommes et les chimpanzés ont besoin des arbres. Les chimpanzés un peu plus que nous ».

Si les actions de son institut se tournent vers l’environnement, la Britannique n’oublie pas ses protégés. Au Congo notamment, le sanctuaire de Tchimpounga, financé par l'institut Jane Goodall, recueille des chimpanzés orphelins, quand les adultes ont été tués ou capturés, puis les relâche sur l'île de Tchindzoulou. La vidéo montrant Wounda, une femelle enlaçant longuement Jane Goodall à l’endroit où elle recouvrait la liberté, a fait le tour du Web. « On ne sait pas ce qui s’est passé, témoigne-t-elle. Tout le monde pleurait… »

Dans sa tournée européenne, Jane Goodall fait un passage à Paris puis à Aix-en-Provence. Elle en profite pour écrire à Alexandre de Juniac, PDG d’Air France, « seule compagnie aérienne majeure qui accepte de transporter des singes destinés à des expérimentations en laboratoire. » Selon le document, des témoignages montrent que de jeunes singes ont été capturés, installés dans des cages minuscules et maintenus complètement isolés. Un combat de plus pour la jeune dame de 80 ans.

Futura Sciences 19/5/2014

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