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BelleMuezza

Le climat passé aurait été influencé par la formation des sols

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Au cours des derniers 50 millions d’années, les grandes variations climatiques ont été attribuées aux surrections des grandes chaînes de montagnes. Deux chercheurs du CNRS viennent de montrer que l’aptitude des surfaces continentales à former des sols influence aussi le climat de la Terre.

Avant le réchauffement global actuel, le climat de la Terre n’a cessé de se refroidir depuis environ 50 millions d’années. Les raisons sont âprement discutées dans la littérature scientifique. La surrection des grandes chaînes de montagnes du Tertiaire, et en particulier celle de l’Himalaya, est très souvent invoquée comme la principale cause de cette détérioration climatique.

 Profil latéritique de la région de Foumban, au Cameroun. ©️ J.-J. Braun

En effet, le rapport isotopique du lithium de l’eau de mer (7Li/6Li) enregistré dans les coquilles carbonatées d'organismes fossiles du microplancton, publié en 2012, semble à première vue renforcer le rôle de l'Himalaya. Ce rapport a considérablement augmenté au cours des derniers 50 millions d’années. Or, l’isotope 6 du lithium est préférentiellement piégé dans les argiles qui se forment au cours de l’altération des roches exposées à la surface des continents, alors que l’isotope 7 est plus facilement emporté à l’océan par les rivières.

Une équipe américaine en avait donc conclu en 2012 que l’augmentation du rapport 7Li/6Li de l’eau de mer signifiait davantage de formation d’argiles, et donc davantage de dissolution de roches continentales. Comme ce processus consomme du CO2 et réduit par conséquent l’effet de serre, on pouvait y voir la raison du refroidissement du climat depuis 50 millions d’années.

Quant au moteur de cette évolution, il était une fois de plus attribué à l’Himalaya : l’érosion intense de la chaîne brise les roches en petits morceaux et favorise l’altération et la formation d’argiles.


Les auteurs de cette nouvelle étude, publiée dans la revue Climate of the Past, viennent de montrer qu’une interprétation différente du signal isotopique du lithium est aussi possible. Ils ont analysé la concentration en lithium de la kaolinite de sols et de latérites de Côte d’Ivoire, des États-Unis, d’Amazonie et du bassin parisien. Il apparaît que ces profils d’altération, qui peuvent être très épais, stockent beaucoup de lithium. Il y a 50 millions d’années, la quantité de lithium capable d’échapper à ce piège pour atteindre l’océan sous forme dissoute devient très faible et, en réponse, le rapport 7Li/6Li de l’eau de mer s’effondre. D’où un nouveau scénario proposé par les deux chercheurs du Laboratoire Océanographique de Villefranche-sur-mer (UPMC, CNRS) et de Géoscience Environnement Toulouse (CNRS, Toulouse 3, IRD).

 Le plateau himalayen photographié en mai 2012 par André Kuipers, à bord d’ISS, à quelque 400 km d’altitude. ©️ Esa, Nasa

Il y a 50 millions d’années, le contexte tectonique était marqué par l’absence de grandes chaînes de montagnes et donc d’érosion intense. Les continents d’alors présentaient des altitudes et des pentes faibles, et des sols épais pouvaient aisément se développer, comme en attestent de nombreuses archives géologiques. Ces sols ont protégé les roches mères de la dissolution. En réponse, le niveau de CO2 atmosphérique a pu s’envoler, car il n’était plus pompé efficacement par l’altération. Un climat chaud et humide s’est installé globalement, ce qui est à nouveau confirmé par les archives paléoclimatiques.

Lorsque les chaînes de montagnes surgissent à partir de 40 millions d’années. L’apparition de nouveaux reliefs et pentes sur les continents va briser cet état chaud. Mais pas directement en augmentant l’altération, plutôt en limitant la capacité du système Terre à former des sols épais. Le lithium parvient à nouveau à rejoindre les océans sous forme dissoute, poussant le rapport 7Li/6Li de l’eau de mer à augmenter.

 Sol latéritique aux îles Marquises, Polynésie française.  Leandro Kibisz CC BY-SA 3.0

Les isotopes du lithium révèlent donc une histoire géochimique et climatique de la surface de notre planète plus subtile qu’il n’y semble au premier abord. Cette nouvelle étude révèle le rôle clé joué par les grandes surfaces continentales planes sur l’évolution climatique de notre planète.



La latérite (du latin later, brique) est une roche rouge ou brune, qui se forme par altération des roches sous les climats tropicaux. Les sols latéritiques sont des sols maigres, lessivés et appauvris en silice et en éléments nutritifs fertilisants (Ca, Mg, K, Na).

Une latérite peut se former à partir de n'importe quel type de roche, mais seulement si le climat est chaud et humide sur une période prolongée. Cependant, il se forme autant de types de latérites qu'il y a de roches d'origine. Lors de l'altération, les minéraux de base les plus instables disparaissent (comme les feldspaths), et les ions les plus solubles s'échappent en solution. Les autres restent sur place en formant de nouvelles roches. Plus d'informations, ICI.


 La kaolinite est une espèce minérale composée de silicate d'aluminium hydraté, de formule Al2Si2O5(OH)4 du groupe des silicates, sous-groupe des phyllosilicates. Ce nom provient du chinois (sinogrammes : 高岭土, pinyin : gāo líng tǔ), signifiant terre des hautes collines. La kaolinite se trouve dans les roches argileuses, comme le kaolin, ou dans les roches magmatiques, résultat de l'altération des feldspaths, des granites. (Photo Kaolinite (silicate d'aluminium et d'hydroxyde) USGS / domaine public). Plus d'informations, ICI




Le lithium est un métal alcalin et un élément chimique de symbole Li et de numéro atomique 3, situé dans le premier groupe du tableau périodique des éléments. C'est l'élément solide le plus léger.

En raison de sa très grande réactivité chimique, le lithium n'existe pas à l'état natif dans le milieu naturel. Il n'y est présent que dans des composés ioniques. On l'extrait de minéraux de type pegmatite, ainsi que d'argiles et de saumures.

Le lithium est présent à l'état de traces dans les océans et chez tous les êtres vivants. Il ne semble pas avoir de rôle biologique notable car les animaux et les végétaux peuvent vivre en bonne santé dans un milieu dépourvu de lithium. 

Le lithium est trouvé à l'état de traces dans le plancton, dans de nombreuses plantes et invertébrés à des concentrations variables. Les organismes marins accumulent davantage de lithium dans leurs tissus que leurs homologues terrestres.

L’extraction du lithium a un impact environnemental important. Le procédé d'extraction consiste à :

- pomper la saumure présente dans le sous-sol des lacs salés ;
- augmenter la concentration de la saumure par évaporation ;
- purifier et traiter la saumure afin d’obtenir le carbonate de lithium (Li2CO3) pur à 99 % ;
- effectuer la calcination du carbonate pour obtenir le métal lithium.

Pour pomper la saumure, on a besoin de carburant : puis l'évaporation nécessite de larges espaces de salins ; enfin, la calcination du carbonate de lithium libère du CO2.

Le lithium est peu recyclé, en raison du faible taux de collecte, des prix bas et volatiles du lithium sur les marchés, et des coûts élevés du recyclage. Plus d'infos sur Wikipedia.

Explications sur les isotopes du Lithium 6Li et 7Li (Plus de détails ICI):

Lithium 6 : Le lithium 6 (6Li) possède un noyau composé de trois protons et de trois neutrons. Stable, il constitue environ 7,5 % du lithium présent dans la nature. 

Lithium 7 : Le lithium 7 (7Li) est l'isotope stable le plus abondant du lithium (92,5 %). Son noyau est constitué de trois protons et de quatre neutrons. 




Futura Sciences 3/4/2015

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