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Gabon: Le deuxième poumon de la planète peut-il encore être sauvé?

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Leur pays est une forêt. Avec 87% de son territoire recouvert par l’immense forêt du bassin du Congo, le deuxième poumon de la planète après l’Amazonie, le Gabon fait figure d’exception parmi les pays exportateurs de bois: entre 2000 et 2010, le pays n’a perdu que 0,04% de forêts, quand le bassin amazonien ou l’Asie du Sud-est coupaient leurs arbres dix fois plus rapidement

Du 4 au 15 mai, le Gabon préside le forum des Nations unies sur les forêts, affirmant ainsi sa volonté de devenir un leader mondial sur le sujet.

 20 Minutes 4/5/2015


Pourtant, en sortant de Libreville par les routes goudronnées, on voit pousser plus de maisons que d’arbres. «Une matinée où on ne travaille pas, ce sont deux chantiers qui poussent», soupire Anne-Marie Ndong Obiang, directrice du projet de l’Arboretum Raponda Walker. Dans cet échantillon de forêt préservée à quelques kilomètres au nord de Libreville, dix écogardes veillent chaque jour à ce qu’un mur ne soit pas érigé illicitement là où la forêt de la Mondah devrait reprendre ses droits.

«La déforestation est surtout un problème d’habitations, confirme Eric Arnhem, assistant technique chez Wildlife Conservation Society, une ONG américaine qui travaille main dans la main avec l’Agence nationale des parcs nationaux (ANPN). Le Gabon y a échappé car ce n’est pas un pays très peupléAvec moins de 2 millions d’habitants et plus de 20 millions d’hectares de forêt, les arbres ont jusqu’à présent gagné.

Mais aujourd’hui, face à l’afflux de ruraux et d’immigrés autour des villes et à l’appétit de nombreux exploitants asiatiques pour les essences gabonaises, dont l’okoumé dont on fait le contreplaqué, les forêts ont besoin d’un coup de main

Impossible de mettre la canopée sous cloche: la filière forestière est le deuxième employeur du pays après l’Etat, représentant 28% de la population active et plus de 10% des exportations. «Nous ne pouvons pas faire autrement que d’avoir un impact sur la forêt, reconnaît Tanguy Gahouma-Bekale, conseiller du président Ali Bongo à la tête du Conseil national climat (CNC). Mais nous en assurons une exploitation maîtrisée».

Ainsi, en 2002, la création de treize parcs nationaux a permis de mettre 2,8 millions d’hectares de forêts à l’abri des tronçonneuses. Déjà doté d’un code forestier depuis 2007, le Gabon a interdit en 2010 l’exportation du bois en grumes, c’est-à-dire des troncs entiers, afin de rapatrier les activités de découpe du bois à plus haute valeur ajoutée

C’est maintenant un plan national d’affectation des terres qui va voir le jour pour réguler les conversions de terres forestières en cultures, en villes ou en scieries. «Nous ne voulons pas devenir des rentiers de la forêt. Nous sommes un pays en développement qui a la volonté de devenir un pays émergent», martèle Tanguy Gahouma-Bekale.

Une stratégie payante pour l’Etat, qui est aidé dans cette tâche par l’Agence française de développement (AFD) dont le bureau gabonais finance à hauteur de 10 millions d’euros un projet de modernisation et de régulation de l’économie forestière. Ce programme permettra par exemple d’améliorer les techniques de découpe des troncs pour réduire la quantité de déchets, énorme actuellement: environ 70% du bois d’un arbre coupé n’est pas exploité au Gabon, contre 10% en Europe

Reste à lutter contre l’exploitation illégale, un fléau selon Eric Arnhem: «Les espèces les plus rares font l’objet de trafics et certaines essences sont surexploitées», déplore-t-il, rappelant que la survie des 87.000 gorilles et 47.000 chimpanzés du Gabon dépend de la préservation des précieuses forêts.


20 Minutes 4/5/2015

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Bitam (Gabon) (AFP) - Sur une piste rouge sillonnant la dense forêt équatoriale, apparaissent soudain d'imposants engins agricoles, des tracteurs et des camions transportant des centaines d'ouvriers. C'est la fin de la journée de travail sur la plantation d'hévéas de Batouri, dans le nord du Gabon.

Hommes et machines regagnent la ville de Bitam et les villages avoisinants. La plantation doit à terme compter 28.000 hectares d'hévéas.

Ce projet colossal dont le maître d’œuvre est le géant singapourien Olam génère la controverse

- ses défenseurs y voient une promesse de diversification d'une économie de rente pétrolière à bout de souffle, 

- ses détracteurs critiquent son impact environnemental, social et culturel.

 Récupération du caoutchouc à la plantation d'hévéas de Batouri, dans le nord du Gabon, le 30 avril 2015 (c) Afp

Face à la promesse de 400 millions de dollars d'investissements, d'une usine de transformation du caoutchouc et de 5.000 emplois à terme, le pouvoir gabonais a ouvert ses portes. "Ce projet permet de développer le Gabon" et son milieu rural, assure Gagan Gupta, le patron d'Olam Gabon, qui a aussi lancé des plantations de palmiers à huile dans le pays.

"Ce sont 3.000 personnes qui travaillent (...) et 5.000 en comptant les emplois indirects. Et elles ne travaillent pas pour seulement quatre à cinq années, mais pour au moins 45 à 50 années. C'est un projet de développement durable", assure-t-il.

Une analyse que tout le monde ne partage pas. "Allez voir en Malaisie, en Indonésie!", où le groupe a d'immenses plantations, s'insurge Franck Ndjimbi, auteur d'un rapport pour les ONG World rainforest movement et FERN. "Les retombées sociales et économiques sont surestimées", dit-il. "C'est un projet qui a été mal pensé parce qu'il a été imposé", selon lui. 


Il estime qu'"avec ces plantations, les populations risquent d'être transformées en ouvriers agricoles": elles sont implantées dans une région où vivent des milliers de petits exploitants. Dans la forêt autour de la plantation de Batouri, les villageois cultivent manioc, banane, tubercules et cacao tout en "saignant" d'innombrables hévéas sauvages. De petites coupelles sont attachées au bas des arbres, dont les écorces sont entaillées pour faire couler le latex.

La première plantation d'hévéas dans le secteur date de 1914-1918, quand le colonisateur français voulait du caoutchouc pour son effort de guerre, explique Dieudonné Minlama, qui préside un collectif d'ONG de lutte contre la pauvreté, puis "les plantations ont été abandonnées et l'hévéa s'est propagé dans la forêt". Ce collectif est favorable au projet Olam: il estime qu'il va créer des emplois, susciter le développement d'infrastructures autour de la plantation et globalement favoriser l'activité dans la région.

Pour le moment, la plantation de Batouri compte 5.000 arbres qui seront à maturité dans huit ans. Mais pour planter, Olam a dû déforester, faisant craindre une atteinte à la biodiversité.

"Il va y avoir sans doute de l'épandage, l'utilisation d'engrais, des pesticides... Ca nous amène à nous interroger sur les impacts environnementaux. D'autant que les études ont été menées à la va-vite et leur validation ressemble plus à une formalité administrative qu'à un vrai outil de développement durable", dénonce M. Ndjimbi.

Le patron d'Olam Gabon, Gagan Gupta, rétorque que son groupe respecte "les normes" et qu'il a signé des "contrats sociaux" avec les villages: il achètera aux petits exploitants leur production, il a installé l'électricité et l'eau dans de nombreux villages et a rénové les pistes de cette zone enclavée. Dans les villages, certaines maisons en bois aux toits en tôle sont neuves. Les pompes à eau et panneaux solaires siglés Olam sont légion. Pourtant de nombreux habitants restent sceptiques.

"Les problèmes ne manquent pas. Ils ont construit des pompes mais avec l'afflux de population, il n'y a plus d'eau. On est obligé de creuser des puits", explique l'un d'eux sous couvert de l'anonymat. "Olam a gaspillé la forêt. Des bois sacrés, des totems... Je travaille à Olam mais c'était mieux avant", poursuit-il, en soulignant qu'il y a "beaucoup d'étrangers, Camerounais, Tchadiens, Nigérians, avec des problèmes de cohabitation".

Selon M. Gupta, les Gabonais bénéficient normalement d'une priorité à l'embauche et composent 97% des effectifs d'Olam. Mais des dizaines d'immigrés venus jusque du Mali travaillent aussi à Batouri.

Si certains ouvriers se disent "heureux d'avoir du +taf+" dans un pays où le taux de chômage est supérieur à 20%, beaucoup se plaignent :

- "Travailler à Olam c'est dur. Je gagne 150.000 F CFA (230 euros) par mois. Six jours par semaine, nous commençons à 6h30 pour terminer à 14h30. Je pars de chez moi à 4h. La paie n'est pas bonne par rapport au travail", raconte un immigré malien.

- "La paie, c'est pas ça! C'est pourquoi il y a des grèves", abonde Aurélien Mengue, un Gabonais.

Gagan Gupta répond: "Olam ce n'est pas une société qui gagne en +coupant+ 10.000 francs (15 euros) de quelqu'un", c'est-à-dire en retenant cette somme sur son salaire. "Olam, c'est 20 milliards de chiffre d’affaires (environ 30 millions d'euros). On paie normalement tous ceux qui sont réguliers (assidus) mais pour ceux qui ne le sont pas, c'est normal qu'on coupe. C’est un problème de compréhension et non de paiement", assure-t-il.

Dieudonné Minlama estime qu'il faudra "encore du temps" pour que le projet Olam que son collectif soutient soit accepté par les populations locales, "notamment pour que les activités génératrices de revenus pour les villages soient mises en œuvre". "A partir de là, tout ira mieux".



Sciences et avenir 20/5/2015

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