Aller au contenu
Rechercher dans
  • Plus d’options…
Rechercher les résultats qui contiennent…
Rechercher les résultats dans…
terrienne

bel article du canard enchainé

Messages recommandés

Canard Enchaîné, 14/03/2007, page 5.

Animal, on a mal

Tiens, si on parlait des animaux ? On ne les entend pas beaucoup,
dans cette campagne. Nous autres humains avons déjà assez à faire :
s'il fallait, en plus, s'occuper des bestioles, n'est-ce pas...
Voici pourtant l'occasion : pour le film "Notre pain quotidien",
qui sort cette semaine, Nikolaus Geyrhalter a planté sa caméra dans
les abattoirs, les élevages industriels, les serres géantes, les
champs, les mines de sel, les vignes de notre moderne Europe. Il
nous motre ce que nous n'aimons pas voir : comment fonctionne
l'énorme machinerie grâce à laquelle nous remplissons nos
assiettes. Non, nous ne voulons pas voir ces milliers d'animaux qui
passent leur vie entassés, enfermés dans leurs boîtes, leurs cages,
leurs prisons ; voir ce boeuf qui tremble de terreur devant le
tueur qui va l'exécuter d'un coup de pistolet électrique, et son
cadavre être retourné par un robot, saisi par les pattes arrière,
suspendu à la chaîne, et son successeur s'affoler à cette vue,
rouler des yeux effarés et trembler devant le pistolet qui
s'approche... C'est trop facile de jouer sur notre sensibilité de
citadins, sur notre, lâchons le mot, sensiblerie.
Nous savons bien qu'on ne fait pas d'omelette sans casser d'oeufs
ni de steaks saignants sans tuer les boeufs. Ne nous montrez pas
ces robots qui tuent, éventrent, découpent, trient ; et qui
laissent à de rares salariés le soin de faire ce que les machines
ne peuvent encore exécuter habilement, édenter les porcelets, leur
couper la queue, etc. Ne nous montrez pas ces ouvriers solitaires,
enfermés dans le mutisme et le boucan mécanique, esclaves de la
cadence imposée par la machine, cheptel pas moins entravé que
l'autre.
Que l'industrie agroalimentaire n'ait plus aucun rapport avec la
ferme d'antan ; que le vivant y soit formaté pour la consommation
de masse ; que ses méthodes déshumanisent, nous le savons,
évidemment. Mais nous préférons croire au monde enchanté des
publicités, où de braves paysans aux tronches authentiquement "à
l'ancienne" nous vantent leurs "produits du terroir". Nous voulons
du rêve et de la légende, pas du réel.
La dernière fois qu'on nous a parlé d'animaux, c'était il y a un
mois, lorsque le virus H5N1 a débarqué dans un élevage de dindes
anglais. 860 bêtes sont mortes, mais, plutôt que de soigner ou
d'épargner les autres, on a préférer les tuer. 160 000 dindes
exécutées. Oublions vite. Arrêtez de nous parler des animaux...

Partager ce message


Lien à poster
Partager sur d’autres sites

×
×
  • Créer...